Crédits photo : Pochette du single "Casser la voix"
C'est l'histoire d'une naissance, et d'une renaissance. Ou comment Patrick Bruel va voir sa carrière exploser en un seul titre et se retrouver au coeur d'un véritable tourbillon médiatique. Cette chanson s'appelle "Casser la voix" et le chanteur la doit à un artiste aujourd'hui disparu : Jacques Higelin. Remontons le fil de l'histoire jusqu'aux années 80. A cette époque, Patrick Bruel connaît un début de carrière en dents de scie. S'il se fait remarquer au cinéma ("P.R.O.F.S.") ou sur les planches ("Le Charimari"), il connaît aussi son premier tube en 1983 avec "Marre de cette nana-là", un premier single qui se vend à plus de 200.000 exemplaires. Sauf que son premier album "De face", publié en 1986, est un échec avec seulement 20.000 ventes. Malgré ces faibles scores, il convainc le directeur de l'Olympia de lui laisser le lieu pour plusieurs soirs : résultat, il joue quatre soirs de suite dans une salle pleine à craquer.

La révélation Jacques Higelin

Mais c'est en juillet 1989 que Patrick Bruel va avoir la révélation de sa vie aux Francofolies de la Rochelle. Après son concert en plein après-midi devant quelques curieux, duquel il dit lui-même sortir véritablement déçu, il assiste, le soir venu, à celui de Jacques Higelin, dont la réputation des shows marathons n'est alors plus à faire. « C'est un monument pour moi. À la sortie de ce spectacle, je me dis : "Voilà un artiste libre, c'est ça. Voilà ce que je veux être, ce que je veux devenir" » confie aujourd'hui le chanteur dans l'émission "50 Minutes Inside" de TF1. C'est alors que lui vient l'idée des paroles de "Casser la voix", qu'il écrit d'un seul jet et dans lequel il met toute sa rage et sa frustration de ne pas être, à l'époque, l'artiste qu'il rêve d'être : « J'ai passé une nuit très particulière. Je rentre dans ma chambre d'hôtel, je prends ma guitare et, tout doucement parce qu'il est 6h du matin, je chante : "Si ce soir, j'ai pas envie de rentrer tout seul, si ce soir, j'ai pas envie de rentrer chez moi. Si ce soir, j'ai pas envie de fermer ma gueule, si ce soir, j'ai envie d'me casser la voix". Et là, je me mets à hurler, un vrai dingue ».

Regardez le clip de "Casser la voix" de Patrick Bruel :


"Casser la voix" sort le 2 octobre 1989, en préambule de l'album "Alors regarde...". Et le succès est immédiat : 400.000 copies du single s'arracheront, permettant à la chanson d'atteindre la troisième place du Top 50 derrière les tubes de Roch Voisine ("Hélène") et François Feldman ("Les valses de Vienne"). Ce « cri », cette « révolte » contre lui-même, devient le plus grand succès commercial de sa carrière. Le chanteur se transforme en véritable idole déclenchant des scènes d'hystéries : commence alors la "Bruelmania". Sorti un mois plus tard, l'album "Alors regarde" se transforme en machine à tubes ("J'te l'dis quand même", "Alors regarde", "Places des Grands Hommes", "Décalé"...) et s'écoule à plus de deux millions d'exemplaires, devenant ainsi l'un des disques les plus vendus de tous les temps en France. « Elle m'a ouvert toutes les portes. Elle a ouvert les portes d'une carrière, d'un public, elle est rentrée dans le coeur des gens. C'est une putain de chanson » réagit aujourd'hui l'artiste face à cette chanson aux allures de déclic.

La bruelmania atteint son pic en 1990 avec une tournée française ultra-complète ainsi qu'un épisode resté célèbre dans une pizzeria des Champs-Elysées où le chanteur, qui y dînait tranquillement avec des amis, voit le lieu assiégé par les fans et doit quitter l'établissement avec l'aide de la police. Un épisode autant commenté que moqué qui prouve à quel point le chanteur est devenu celui qu'il a toujours voulu être... en quelques mois. Toujours aussi populaire au fil du temps, Patrick Bruel fera de "Casser le voix" un des classiques évidents de son répertoire, interprété à quasiment chacun de ses concerts.

Regardez Patrick Bruel chanter "Casser la voix" en live :