Oasis triomphe à Londres : un concert déjà entré dans l'histoire
La tournée de reformation d'Oasis pose ses valises au Wembley Stadium de Londres pour sept dates d'anthologie. Purecharts a assisté à la première soirée ce vendredi, et vous l'assure : ce concert est d'ores et déjà historique !

Lewis Evans
Certains hurlent de joie. D'autres se prennent dans les bras. On entend même un groupe de Français s'exclamer « Ça y est, on y est ! ». Nous ne sommes qu'à la sortie du métro que, déjà, tout le monde exulte et a du mal à y croire. Quelques centaines de mètres plus loin se trouve le mythique Wembley Stadium, qui accueille ce vendredi 25 juillet le premier concert londonien de la tournée de reformation événement d'Oasis. Une émulation qui commence dès les rues de la ville, où il est impossible de faire quelques mètres sans croiser un t-shirt, un maillot ou un bob à l'effigie des frères Gallagher réconciliés. Aux abords de Carnaby Street, où une boutique a été ouverte pour l'occasion, les passants s'époumonent sur "Don't Look Back in Anger" avant de brûler leurs dernières économies à l'intérieur. On y propose t-shirts, mugs, posters, puzzles, vinyles spéciaux, bobs, programmes ou collection limitée Adidas. Et tout s'y arrache comme un jour de solde. Environ 250.000 euros y auraient été dépensées sur la seule journée du vendredi. Les retombées économiques des seules 17 dates britanniques sont estimées à plus d'un milliard de livres au Royaume-Uni, soit plus que Taylor Swift l'été dernier. Qui a dit que le rock ne faisait plus recette ?

"Oasis vibes in the area"

Comme en ville, l'excitation est de mise en traversant la longue allée qui mène au stade, bardée de chaque côté par les stands de merchandising pris d'assaut. Excitation doublée d'une impatience en prenant place au sein du stade qui a vu défiler les plus grandes stars de la musique et du ballon rond. Soit les deux protagonistes d'une soirée qui s'ouvre sur une mise en bouche de choix : après le groupe Cast, c'est au tour de Richard Ashcroft, et sa gestuelle à mi-chemin entre Liam Gallagher et Mick Jagger, de chauffer une audience déjà bouillante. Et qui explose de joie quand résonnent les classiques de son groupe The Verve, de "Lucky Man" à "The Drugs Don't Work" jusqu'à bien évidemment un "Bittersweet Symphony" de près de 10 minutes délicieux.

20h15 précises, "Fuckin' in the Bushes" résonne à plein tubes dans les enceintes. L'intro est la même depuis 25 ans, mais le frisson est comme au premier jour. Et enfin, le moment tant attendu : main dans la main et bras levés, Liam et Noel Gallagher débarquent sur scène triomphants. Les hurlements des spectateurs, venus des quatre coins du monde, couvrent le son. « Oasis vibes in the area. London vibes in the area » lance d'emblée Liam Gallagher, vêtu de sa traditionnelle parka kaki et d'un bob couvrant la moitié de son visage. La foule exulte. Aucune note n'a été jouée, mais la partie est déjà gagnée. Et c'est parti ! Les premières notes de "Hello" font voler les pintes de bière et sauter à l'unisson des fans hallucinés de revoir leurs héros ensemble sur une même scène. Le son n'est clairement pas à la hauteur, mais le bruit de 81.000 voix se répercutant, dans un écho aussi divin qu'assourdissant, aux quatre coins de Wembley vaut tous les pounds du monde.

Une setlist divine, un concert historique

L'autoroute des tubes commence. Face B divine, "Acquiesce" déboule ventre à terre et le public hurle, 162.000 bras dans les airs. « Because we need each other, we believe in one another ». Des mots qui prennent une autre signification, 16 ans après le dernier passage des Mancuniens à Wembley, à l'époque au bord de la rupture. "Morning Glory" et "Some Might Say" viennent donner le coup de grâce au bout de seulement un quart d'heure. Dans les tribunes et la fosse, sourires et larmes se mélangent. Comme si Oasis représentait le dernier espace de liberté et d'union fraternelle dans un monde de plus en plus divisé. Celui où un inconnu sur la place voisine que vous ne reverrez plus jamais devient votre meilleur pote le temps d'une soirée. C'est là la force d'un groupe qui, s'il a souvent été pointé du doigt pour ses emprunts pompiers aux Beatles ou à T-Rex, voit ses chansons résonner en chacun des 81.000 spectateurs, comme un moment de vie à la fois personnel et universel.

Impassible mais impeccable vocalement, toujours les mains dans le dos et courbé, Liam tient le stade entre ses mains. Et en fait ce qu'il veut. Comme lorsqu'il lance une saillie à destination du club d'Arsenal, assure en rigolant que ses piques vont lui valoir « des problèmes », ou réclame un "Poznan", typique des matchs de foot. Et le public s'exécute : dos à la scène, tous les fans sautent comme un seul homme, bras dessus bras dessous. Même les stars dans les tribunes VIP s'y mettent, de Tom Cruise à Dua Lipa. L'image est puissante. « Is it my imagination ? » chante Liam. Non, mais une réalité encore plus difficile à croire. D'autant que, comme tous le reconnaissent, Oasis n'a jamais aussi bien sonné en live depuis 30 ans. Discrets, Paul "Bonehead" Arthus (guitare), Andy Bell (basse), Gem Archer (guitare) et Joey Waronker (batterie) assurent comme jamais.

C'est bien simple : outre "Little By Little" de 2002, aucun titre de la setlist ne date d'après 1997, unanimement considéré par les spécialistes comme la fin de l'âge d'or d'Oasis. Et qu'importe si certaines pépites manquent à l'appel ("Go Let It Out" ou "Columbia" en tête), la liste des chansons apparaît comme une sorte de perfection qu'aucun best-of ne viendrait égaler. Vous en voulez encore ? "Supersonic" et "Roll With It" font à nouveau trembler la foule avant que Liam ne s'éclipse, laissant la place à son aîné. Avare en paroles, Noel Gallagher lance un simple « Thank you » ou quelques dédicaces diverses au cours de la soirée (aux femmes, aux "lads" ou aux supporters de Manchester City, ce qui lui vaut d'être copieusement hué), puis entonne un "Half The World Away" aux allures de karaoké géant.

Larmes, sueur et mur de son

Et puis Liam reprend les choses en main. La scène se baigne de rouge sang. Cette fois-ci, pas celle d'une énième baston entre frangins qui, d'ailleurs, gardent leur distance pendant deux heures. Le trop bon et trop oublié "D'You Know What I Mean?", issu de l'album "Be Here Now" trop attendu et forcément trop décevant, n'a rien perdu de son efficacité, avec même un clin d'oeil au riff de "Wonderwall" en prime. Du même disque, on est plus surpris par "Stand By Me", pas forcément la chanson la plus inoubliable, mais qui prend une immense dimension en live lorsqu'elle est chantée par tout le stade. Assurément, l'un des moments les plus émouvants du concert.

Sur cette deuxième moitié de concert, Oasis ralentit la cadence : plus de mid-tempo mais aucune baisse de régime. Au contraire, un grand huit d'émotions : "Cast No Shadow", "Slide Away", "Live Forever" ou "Whatever" procurent d'intenses souvenirs à ceux qui ont connu l'époque où Oasis était le plus gros groupe du monde. Avant l'explosion finale "Rock 'n' Roll Star", dédié à Ozzy Osbourne qui vient de nous quitter. « C'est juste du rock & roll » chante Liam. Oui, mais aux allures de grand-messe.

Le concert d'une vie, de nos vies

Rappel, et dernier défilé de tubes. Et pas des moindres. Noel laisse le public chanter "Don't Look Back In Anger" à sa place et l'inévitable "Wonderwall" est accueilli d'un bruyant « Oh my god ! » de la part de notre très jeune voisin de rangée. On a beau l'avoir entendue ad nauseam, la ballade n'a rien perdu de sa puissance, de son intemporalité et de son émotion. « And after all, you're my wonderwall » chanté par tout un stade, gonflé à bloc comme lors d'une finale de Coupe du Monde, et c'est l'une des plus belles images qu'il nous ait été donnée de voir. "Champagne Supernova", leur chef d'oeuvre absolu et incontestable, conclut ensuite le concert. Déjà. Deux heures trop vite passées. Les larmes montent aux yeux de certains, conscients que le retour à la réalité est imminent. Un feu d'artifice vient conclure le show. Le groupe quitte la scène. Pas d'au revoir. Pas besoin. Les yeux embués des 81.000 fans, dans lesquels se reflètent les explosions de couleurs, suffisent.

Les premiers retours dithyrambiques de Cardiff et Manchester n'étaient pas feints. Si l'on flaire bien évidemment le côté mercantile de cette reformation, Oasis livre un concert comme personne d'autre. Liam et Noel ont beau limiter au minimum les interactions entre eux (quelques regards et deux poignées de main suffisent) et éviter les discours factices façon « On est tellement heureux d'être là », eux et leur groupe soudé déroulent deux heures d'un mur de son ultrapuissant et de tubes intemporels. Droit au but, sans fioriture mais avec une intensité et une précision inégalées. La tournée a à peine commencé qu'elle est déjà entrée dans l'histoire. Et ceux qui hurlaient de joie à l'entrée du Wembley Stadium en ressortent sans voix. Dans tous les sens du terme !

Setlist du concert d'Oasis

Hello
Acquiesce
Morning Glory
Some Might Say
Bring It On Down
Cigarettes & Alcohol
Fade Away
Supersonic
Roll With It
Talk Tonight
Half the World Away
Little by Little
D'You Know What I Mean?
Stand by Me
Cast No Shadow
Slide Away
Whatever
Live Forever
Rock 'n' Roll Star

Rappel :
The Masterplan
Don't Look Back in Anger
Wonderwall
Champagne Supernova

Par Théau BERTHELOT | Journaliste
Passionné par la musique autant que le cinéma, la littérature et le journalisme, il est incollable sur la scène rock indépendante et se prend de passion pour les dessous de l'industrie musicale et de l'organisation des concerts et festivals, où vous ne manquerez pas de le croiser.
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