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Gauvain Sers décortique la société et ses travers dans son troisième album, l'engagé "Ta place dans le monde". Entré deuxième des ventes derrière Kanye West en septembre dernier, ce disque est en quelque sorte né en réaction à l'épidémie de Covid-19 et ses bouleversements. « On ne vit pas de la même manière. Des choses ont changé et il faut l'accepter. Le but, ce n'est pas de faire des chansons sur un virus mais de dire ce qui a pu changer, ce qui va changer et d'interroger les choses (...) Ce qui rejoint tous les personnages de l'album, qui sont tous différents avec des âges et des milieux sociaux différents, c'est qu'à un moment donné de leurs vies, ils se sont demandés ce qu'ils faisaient là » décrypte dans une interview pour Pure Charts le chanteur au béret, qui aborde sa vie intime sur "Elle était là", dépeint le quotidien des "petites gens" dans "La France des gens qui passent" et s'empare de la question du racisme dans "Sentiment étrange".

"C'est assez fou de voir toute cette intolérance"

Justement, ce titre engagé, dans lequel Gauvain Sers prend le point de vue d'une personne de couleur, vient d'être envoyé aux radios dans une nouvelle version un peu plus pêchue. « C'est un truc qui m'est assez insupportable au quotidien d'imaginer qu'en 2021, toute forme de racisme existe encore. C'est assez fou de se dire ça, de voir toute cette intolérance, cette impression de revenir en arrière et d'être en boucle un peu tout le temps sur les mêmes problèmes. C'est tellement dommage de se pourrir la vie avec ça, de catégoriser beaucoup les gens » confie le musicien, révolté, à notre micro, qui se permet de faire une référence à la chanson "Lili" de Pierre Perret dans son texte : « L'idée c'était de faire un état des lieux par rapport à cette chanson [de 1977, ndlr] pour savoir ce qui avait changé, ce qui avait évolué et ce qui reste à faire. Il y a des choses qui ont changé mais il y a encore beaucoup de boulot. Je pense que je n'en finirais pas d'écrire sur des sujets comme ça car c'est le genre de choses qui rendent dingue. Ça fait partie des nombreuses injustices dans le monde qui nous entoure et il faut continuer à les pointer du doigt ».

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"Ça reste un sujet clivant"

Dans cette chanson à la guitare, Gauvain Sers dresse le portrait de cet homme qui « porte le maillot de la différence » et devient « un bouc émissaire » parce que son père « est né sur l'autre hémisphère » : « Toi tu ne les connais pas, les rues de Kinshasa / On te rabâche pourtant de retourner là-bas ». « Il y a assez peu de chansons qui évoquent ça frontalement parce que c'est un peu clivant. Ça reste un sujet clivant. (...) Pour aborder un sujet ou un thème, il faut que je sois très ému, bouleversé ou en colère. Là, je pense que c'était de la colère et j'ai essayé de le transformer en un portait, en prenant un peu plus de distance et en appuyant sur les choses que je voulais mettre en dérision quelque part aussi » explique-t-il à Pure Charts. Mais le chanteur tient à insuffler une petite dose d'optimisme. « Malgré tout ça, tu crois encore en l'être humain / Au verre à moitié plеin / Malgré tout ça, tu as un sentiment étrange / Pеut-être que le monde change » fredonne-t-il sur le refrain de sa chanson.

Ecoutez "Sentiment étrange" de Gauvain Sers :

Ce sujet du racisme prend encore plus de relief alors que le premier tour de l'élection présidentielle aura lieu ce dimanche 10 avril. « Il y a des sujets qui reviennent et qui tournent en rond, on est toujours dans les mêmes débats, on s'en rend compte et c'est terrible parce qu'on se sent tellement impuissants, par exemple sur ce qu'il se passe aujourd'hui en Afghanistan. On a l'impression de remettre les compteurs à zéro, 20 ans en arrière et de se dire que tout ça n'a servi à rien. C'est assez déprimant quand on regarde le prisme de ce côté-là » regrette Gauvain Sers, qui garde néanmoins « l'utopie et l'espoir que les chansons peuvent encore semer quelques graines d'humanité chez les gens ».