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Propos recueillis par Julien Gonçalves.

Le public a pu se demander pourquoi reprendre Joe Dassin sur cet album "Garou Joue Dassin" ?
Si les gens se demandent pourquoi je reprends Joe Dassin, c'est surtout parce que le public l'a demandé quelque part. Après, j'ai choisi Joe Dassin, ou il m'a choisi, je ne sais pas... Depuis que je suis tout petit, avec mes parents, on écoutait ses chansons à la maison ou dans la voiture, on chantait ça en famille très, très jeune. Depuis que j'ai 3 ans ! Quand je commence à faire de la musique avec mes potes, mais je ne veux pas être chanteur, je m'amuse autour du feu de camp, je sors la guitare, Joe Dassin est là. Pareil quand je commence à chanter dans les bars, je reprends Joe Dassin. Dans mes amourettes, Joe Dassin est là aussi, puis ensuite dans mes concerts. Même ma fille écoute Joe Dassin. Il était tout le temps là ! Et depuis un an sur ma tournée, je faisais un medley de Joe Dassin, et le public aimait tellement ça qu'on s'est dit : "Pourquoi on ne se lance pas dans une session en studio ?".

Ce sont des chansons qui vous ramènent à des souvenirs importants de votre vie...
Oui, quand j'ai commencé dans les bars, je chantais toujours : "La patronne va encore nous dire "Salut les amoureux" !" et tout le monde chantait. Avec un de mes premiers amours, notre chanson c'était "Siffler sur la colline". Il y a plein de chansons comme ça qui m'ont accompagné, comme "Les yeux d'Emilie" qui parle du Québec et qui est le prénom de ma fille aussi. On le sait pas trop mais il y a beaucoup de chansons que Joe allait chercher dans le répertoire de la folk américaine, pas nécessairement très connues, il les adaptait en français et en faisait des tubes. Il y en a une, "La beauté du diable", j'ai vu une performance de lui à la télé. Il la chantait en anglais et il avait l'air tellement heureux. Il n'arrive pas à arrêter de sourire ! Il prenait du plaisir à donner du plaisir aux gens. Et c'est ma démarche tout le temps, moi je chante pour faire du bien aux gens. Avec cet album là, c'est parfait.

Ces chansons ont un côté nostalgique et réconfortant ? Elles vous font du bien ?
Ce n'est pas tant pour moi en réalité, je pourrais les chanter tout seul à la maison, c'est vraiment pour le public. Comme le medley cartonnait, c'est comme si ils en demandaient plus. J'ai fait cet album pour que les gens se rappellent... Car c'est très drôle, il n'y a pas plus multigénérationnel que Joe Dassin mais si tu parles de Joe Dassin aux gens, ils ne savent pas trop mais tu peux leur chanter 28 chansons et ils vont dire : "Ah mais oui évidemment !". C'est bien de reconnecter le public avec ces chansons-là.

Comment vous avez choisi les titres pour cet album ?
C'était difficile de choisir car il y a tellement de tubes, et je ne voulais pas tomber dans "Je vais regarder les chansons les plus connues de Joe Dassin". Je me suis mis un quotient de difficulté. J'ai dit à mes musiciens : "On va faire un boeuf, je connais plein de chansons de Joe Dassin". C'était très spontané. Je voulais reprendre la pop française de Joe Dassin pour la ramener aux influences de la folk américaine. Et toutes les chansons ne pouvaient pas se jouer ainsi. Il a beaucoup de chansons mélancoliques, sentimentales et épiques, qui ne cadraient pas dans cet écrin-là. Ce quotient de difficulté m'a beaucoup aidé à choisir.



Ça a été évident de les revisiter ?
J'avais des mots-clés comme "ludique". C'est le premier mot qui me vient quand je pense à Joe Dassin. Je pensais aussi à des artistes comme Johnny Cash. C'est pour ça que ça donne une version un peu ralentie des "Dalton". Je voulais du galop ! Même sur le premier extrait "A toi", on est sur un cheval au galop, c'est le vieux film de spaghetti western à la Sergio Leone. Le compositeur Ennio Morricone, qui faisait la musique de beaucoup de ces films là, a été un mot clé aussi. Je demandais à mon guitariste de me sortir des accords qui rappelaient du Ennio Morricone...

On le disait, "Les Champs-Elysées", "Et si tu n'existais pas" ou "L'été indien" ne sont pas sur l'album...
Oui, "Et si tu n'existais pas" et "L'été indien", je les ai juste placés dans un medley "feu de camp" qui est le point de suspension de l'album. Quand j'ai travaillé sur le choix de chansons pour le disque, je me disais qu'elles ne cadraient pas forcément et je ne voulais pas aller dans ces évidences-là. Mais un jour, j'ai pris la guitare, j'ai gratté des petits bouts et le medley est sorti comme ça. Je l'ai enregistré sur mon iPhone et ça a donné à peu près ce qu'on entend sur l'album.

Il y a plein de chansons phares dans le répertoire de Joe Dassin. Est-ce que vous pensez à faire une suite ?
Je ne pense pas que je ferai un deuxième album parce qu'il y a plein d'autres gens qui peuvent reprendre Joe Dassin. Mais je suis très heureux de ma pâte sur ces chansons. La suite, c'est le live. Je ne fais pas un spectacle concept sur Joe Dassin, mais je vais intégrer beaucoup de chansons de l'album, on va refaire d'autres medleys. Le public aime ça et nous on adore aussi. Et c'est avec mes musiciens de scène qu'on a fait cet album donc c'est parfait !

C'est facile d'intégrer les chansons de Joe Dassin à votre répertoire sur scène ?
Oui ça cadre parfaitement car la vérité c'est que pendant le confinement, je me suis mis à écrire beaucoup de chansons, presque à mon insu. J'ai pas du tout calculé l'affaire. Je suis tombé dans quelque chose de très folk, très country, mais en français. On a vraiment aimé ce qu'on construisait. J'aurais dû sortir cet album mais j'ai bifurqué sur le projet de Joe Dassin. Donc je vais éventuellement sortir l'album de chansons originales et le public se dira sans doute que j'ai pris le son de l'album de Joe Dassin pour créer l'album original, mais en réalité c'est l'inverse. J'ai testé quelques chansons dans mes spectacles et ça a très bien pris. Donc oui ça s'imbrique très bien en live, et on a même repris "Seul", "Sous le vent" ou "La rivière de notre enfance" qu'on a remodelés dans cet écrin-là.




Quand sortira cet album original ?
Déjà, le prochain album après Joe Dassin, il va commencer à vivre sur scène. Ça m'éclate ! J'aime beaucoup tester les nouvelles chansons devant le public, et même si les gens ne les connaissent pas, je pense que j'ai la chance d'avoir un public très indulgent. Comme dans ma carrière, je suis parti dans plein de directions complètement différentes, ils sont déjà formés à l'indulgence donc je peux me permettre de le faire, de les tester. Comme ça, quand on va rentrer en studio, on va être encore bien meilleurs.

Après trois albums de reprises, vous avez donc retrouvé l'envie de faire des chansons originales ?
Pendant le confinement, j'ai eu envie de chansons originales mais j'ai surtout eu envie d'écrire comme jamais. Avant, je disais toujours : "Je vis à 300 à l'heure, je n'ai pas le temps de m'arrêter devant une page blanche". J'ai toujours eu une vie très excessive. Là-dessus, avec Joe Dassin, on doit se ressembler un peu. Il vivait tellement intensément qu'il n'écrivait pas tant que ça. Il a plus écrit au début de sa carrière.

Ces dernières années, Hélène Ségara a repris Joe Dassin, il y a eu un album multi-artistes aussi en 2020 et récemment -M- a revisité "A toi". Comment vous expliquez cette appétence pour ce répertoire ?
C'est normal que beaucoup d'artistes reprennent Joe Dassin. On se redonne le courage ! Je pense que Joe Dassin, c'est vraiment un plaisir coupable. Parfois, on ne sait pas trop si on a le droit, si c'est dépassé, un peu figé dans le temps. Mais pas du tout ! Quand on rouvre la boîte Joe Dassin, tout le monde a envie de plonger dedans. C'est complètement légitime et normal que plein de gens aient envie de le chanter.




Comment vous analysez le fait que ces chansons traversent le temps et les générations ?
Il y a déjà ce côté ludique dans les chansons qui fait que les enfants vont accrocher sur les "zaï zaï zaï zaï" ou "les petits pains au chocolat". Il y a tout cet esprit-là qui ramène l'enfance chez l'adulte, qui connecte avec l'enfance. Et puis les auteurs étaient très fins dans leur façon d'écrire. C'est ce que je préfère ! Moi, ceux qui vont se branler avec des mots trop compliqués pour avoir l'air intelligent... Parfois, tu écoutes bien et tu te dis : "Ah oui c'est vraiment pour avoir l'air intelligent". Là, dans le répertoire de Joe Dassin, ce sont des mots très simples, qui sont compréhensibles par tout le monde mais avec de grandes idées. Tu fredonnes la chanson et quand tu t'y attends le moins, il y a une phrase qui te percute. Il y a quelque chose de sentimental, de très émotionnel mais aussi de très intellectuel dans la façon d'écrire. Ils n'écrivaient pas nécessairement des mots intelligents mais des phrases intelligentes !

Vous avez demandé l'autorisation aux fils de Joe Dassin pour faire cet album ?
Pour le medley en live, on devait valider les droits. Mais oui je voulais le faire valider mais je ne savais pas trop comment. Je ne voulais pas que ce soit un album fait par comité. Là c'était : "Je prends les clés de la voiture, je vais me balader et je reviens avec les courses !" (Rires) Je voulais faire ça confiné dans mon studio avec mes potes. Mais un soir, c'est drôle, quand je terminais la tournée, je devais filer juste après le concert, mais on m'a arrêté et on m'a dit que je ne pouvais pas partir parce qu'il y avait Jonathan Dassin qui était là ! Je l'ai rencontré, on s'est échangé les contacts donc j'ai pu en parler avec eux. Ils m'ont dit : "On a hyper confiance en ce que tu vas faire. On est heureux que tu le fasses, on trouve que ça te va bien". Ils ont envie que ça continue mais pas à tout prix non plus !