The Weeknd : réussi ou raté ? On a vu son film "Hurry Up Tomorrow" avec Jenna Ortega
The Weeknd fait son cinéma dans "Hurry Up Tomorrow", thriller dans lequel le chanteur se met en scène dans son propre rôle aux côtés de l'actrice Jenna Ortega. Aussi mystérieux qu'inquiétant, le film tient-il ses promesses ? On l'a vu en avant-première, voici notre avis !

Lionsgate
Après l'album, le live ! Ce vendredi 16 mai, The Weeknd voit son nom s'afficher en grand dans les salles de cinéma avec la sortie de "Hurry Up Tomorrow". L'histoire ? « Abel, une star de la musique, est entraîné par une de ses fans dans une odyssée qui l'amènera à remettre en question les fondements mêmes de son existence ». Un synopsis officiel qui ne donne presque aucun indice pertinent sur le contenu du récit, et c'est tant mieux. "Hurry Up Tomorrow" s'apprécie davantage si l'on en sait le moins possible, pour se laisser happer par la vision unique de l'artiste. Si le prince canadien de la pop endosse la casquette de co-scénariste et producteur en plus de tenir le premier rôle, c'est parce que ce thriller psychologique s'inspire de sa propre expérience, et d'une mésaventure en particulier : le jour où il a perdu sa voix en plein concert à Los Angeles, un soir de septembre 2022. L'angoisse de tout performeur ! Car évidemment, annuler un show de cette envergure revient à décevoir des milliers de fans, contrarier les assurances, se justifier dans les médias, consulter des médecins pour s'assurer de pouvoir rechanter un jour, gérer de lourdes retombées financières... Le terreau fertile pour d'abyssales crises d'angoisse. Justin Bieber en sait quelque chose.

C'est cette pression invisible, pour qui ne l'a jamais expérimentée, qui constitue le coeur de "Hurry Up Tomorrow", film labyrinthique qui ne cesse de brouiller les frontières entre fiction et réalité. Abel Tesfaye joue The Weeknd, son personnage public, un artiste rongé de l'intérieur par une rupture amoureuse et qui craint de se retrouver seul. Soumis à un stress intense par son manager Lee (Barry Keoghan), il va perdre pied au beau milieu d'une tournée mondiale. Sa route croise, dans un entrelacement scénaristique alambiqué, celle d'Anima, une jeune fan égarée (Jenna Ortega) qui a fui son domicile après un incendie. Et ce qui ressemble à l'éclosion d'une idylle vire alors au cauchemar.

La descente aux enfers d'une star de la musique

Glamour, paillettes, star system et retournements dérangeants : on s'étonnerait presque de l'absence du film "Hurry Up Tomorrow" au Festival de Cannes, tant le cocktail a ce parfum sulfureux qu'aime tant la Croisette. D'autant que le réalisateur Trey Edward Shults ("It Comes at Night") sait filmer toutes les beautés et les dangers de la nuit (l'ouverture du concert, la virée en fête foraine), malgré un usage compulsif des travellings circulaires qui donne presque la nausée. Souvent contemplative, la plastique est propre mais le fil narratif, on l'a dit, tire parfois à blanc, s'étirant dans des séquences fantasmées pour perdre vainement le spectateur. Jusqu'à atteindre son véritable propos : les névroses de The Weeknd. Très convaincant devant la caméra, l'artiste se livre ici sans retenue, sans s'épargner aussi, sur sa relation toxique avec le besoin d'être adulé, de créer pour toujours se surpasser et être à la hauteur des attentes, jusqu'à multiplier des comportements extrêmes. Quelques lignes de dialogue audacieuses tournent même en dérision le fiasco de sa série "The Idol" et l'insuccès de certains de ses singles comme "Gasoline".



Le film "Hurry Up Tomorrow" cache ainsi sous ses airs de spirale destructrice une réflexion très personnelle sur les revers d'une vie sous le feu des projecteurs, et le (lourd) prix à payer pour la gloire. Abel Tesfaye voit d'ailleurs en ce long-métrage la conclusion d'une épopée qui marque les adieux de son personnage scénique : The Weeknd n'est et ne sera plus. Dommage que cette démarche, qu'on imagine thérapeutique, manque de simplicité et que les liens avec l'album soient finalement ténus : si les titres "Wake Me Up" ou "Open Hearts" rythment à merveille ces confessions cinématographiques, le film ne leur donne pas davantage d'épaisseur - comme l'avait promis le musicien - pour qui s'était déjà plongé de près dans les paroles.

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
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