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samedi 22 janvier 2022 14:14

Marina Kaye en interview : "Jean-Jacques Goldman a ce pouvoir de traverser les époques"

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
Marina Kaye est l'une des voix de l'album "L'Héritage Goldman", sur lequel elle reprend la chanson "Pas toi". De son admiration pour Jean-Jacques Goldman aux nouvelles chansons qu'elle écrit, la chanteuse entame l'année 2022 du bon pied, avec l'envie de "retrouver un peu de légèreté". Rencontre.
Crédits photo : Yann Orhan
Propos recueillis par Yohann Ruelle.

Tu es dans quel état d'esprit pour cette année 2022 qui commence ?
Bien ! Même si finalement on passe juste de décembre à janvier, c'est le pouvoir des nouvelles années de nous galvaniser par cette idée de page blanche. Je suis assez positive, et j'espère que je pourrai mieux pratiquer mon métier que durant les deux dernières années.

« J'ai la volonté de bien faire les choses »
Tu as pris de bonnes résolutions ?
Non, j'ai arrêté de prendre des bonnes résolutions ! Ce n'était pas trop mon délire à la base. Que ce soit d'année en année, de mois en mois ou de jour en jour, il faut toujours essayer de faire mieux et s'améliorer en tant qu'être humain, de travailler pour pouvoir accomplir nos rêves dans la vie. J'essaie tous les jours de le faire. Je me mets pas cette pression de me dire qu'en 2022, je dois réussir ça, ça ou ça. J'ai arrêté parce qu'à part te miner, ça ne t'aide pas. On ne peut pas contrôler les éléments, je pense qu'on s'en est bien rendu compte ces dernières temps ! (Rires) Tout ce que je peux contrôler, c'est ma volonté de bien faire les choses et ça, c'est le plus important.

Comment tu es arrivée sur le projet "L'Héritage Goldman" ?
J'ai été approchée par l'un des directeurs artistiques qui fait partie du projet, Michel Boulanger. En fait, j'ai tourné une émission pour TF1 il y a quelques mois et il m'a vue chanter. En me voyant, il s'est dit : "Il nous la faut sur ce projet !" Il a alors contacté mon producteur et c'est parti de là. Moi j'étais carrément partante pour le faire mais je voulais absolument chanter "Pas toi". Sauf que le titre n'était pas prévu pour l'album ! Ils ont accepté de le rajouter pour que je puisse le faire. Je suis venue à Paris, j'ai enregistré la chanson et voilà.

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Tu as dit oui tout de suite ?
Je n'ai pas eu d'hésitation. Je leur ai juste dit : "Les gars, laissez-moi faire ce titre, c'est vraiment celui que je veux". C'est un très beau projet, musicalement riche et intéressant. En plus Erick Benzi, qui a travaillé avec Jean-Jacques Goldman toute sa carrière, est l'arrangeur de l'album. C'est quelqu'un qui le connaît vraiment et qui a le respect de ce que Goldman souhaiterait pour ce genre de projet. Je me suis dit que ce serait une belle aventure à laquelle participer.

« Ce qui m'a toujours frappée chez Goldman, c'est sa puissance d'écriture »
Tu as 23 ans et son dernier album remonte à 21 ans... Tu connaissais bien l'univers de Jean-Jacques Goldman ?
Je ne suis pas de la Génération Goldman, mais finalement, y'en a-t-il vraiment une ? Il a ce pouvoir de traverser le temps et les époques. Nous les générations actuelles, on fait vivre sa musique à travers nos voix pour que les plus jeunes encore les découvrent, parce que c'est de la musique intemporelle. C'est ça le but. Je n'ai pas grandi en écoutant Goldman, en revanche, c'est un artiste qui est évidemment très vite venu à mes oreilles. Très jeune, j'ai quand même commencé à entendre sa musique. Ce qui m'a toujours frappée, c'est la puissance d'écriture et la profondeur dans ses textes. Pour quelqu'un comme moi qui écrit, c'est ce qu'il y a de plus important dans une chanson, c'est primordial de faire passer des messages. C'est fascinant de voir qu'il arrive à faire passer des messages comme il le fait, tout en faisant tube sur tube sur tube... Sa carrière est exemplaire. Même si on est pas de la même génération que la sienne, on ne peut pas passer à côté de sa musique.

Que représente-t-il pour toi ? Une plume ?
A mes yeux, oui. J'attache énormément d'importance à l'écriture. Je mets du temps à faire mes albums parce que je mets un point d'honneur à ne pas sortir de la musique pour sortir de la musique. Si je sors une chanson, c'est parce qu'elle a vraiment une histoire. Moi ce que je trouve magnifique dans les chansons de Goldman, c'est qu'elles ont toute une histoire, une vraie arrière-pensée, d'autant qu'il est capable d'écrire sur des sujets qu'il n'a pas lui-même vécu parfois. Il a vraiment un don. C'est ce qui me touche le plus.

Tu l'as déjà rencontré ?
Non, je n'ai pas eu cette chance !

J'imagine que tout artiste rêve qu'il lui écrive une chanson, c'est ton cas ?
Elle n'a pas vraiment de réponse cette question, déjà parce que je ne chante pas en français normalement. Mais ça m'est déjà arrivé ! Et si je devais le refaire, ce serait vraiment pour une telle occasion. (Sourire)

« Dans chaque chanson, je donne une partie de moi »
Tu as donc imposé la chanson "Pas toi" sur "L'Héritage Goldman". Quelle signification a-t-elle pour toi ?
Je suis quelqu'un qui est énormément dans l'émotion. La mélodie de la chanson me frappe en plein coeur, les paroles sont déchirantes. J'ai l'impression d'avoir vécu cette situation dans ma vie. Quand je l'interprète, ça me ramène à une période qui n'est pas forcément agréable mais au moins ça me permet d'incarner le titre avec justesse et me dire que je ne suis pas en train d'inventer quelque chose pendant que je chante les paroles. J'ai vraiment connu ce sentiment-là dans ma vie et pour moi, "Pas toi" est la chanson qui me saisit le plus. Je pense que je n'aurais pas réussi à donner autant de dimension à une autre chanson de Goldman que celle-ci.

Quand tu parles d'une situation, tu évoque une rupture ?
Pour moi, c'est bien au-delà d'une rupture. Ça porte sur ça mais ça parle aussi du sentiment d'être seul, même lorsqu'on est en couple, à ressentir le mal et la souffrance que cette relation procure. L'autre ne saigne pas comme nous on saigne, et ce terme, saigner, je le trouve incroyablement fort et réaliste. On a vraiment l'impression d'être écorché, de se prendre des coups de poignards en permanence dans le coeur et c'est le pire. C'est un sentiment qu'on a tous ressenti un jour où l'autre. C'est ce qui déchire le plus, d'avoir l'impression d'être seul dans une douleur.

Finalement, c'est ce que tu chantes beaucoup dans tes propres chansons.
Oui, mes textes partent toujours de quelque chose que j'ai ressenti, je couche sur papier ce qu'il y a au fond de moi. Dans chaque chanson, je donne une partie de moi. Je la prends, je la sors de moi et je la mets à l'extérieur. C'est facile à faire en studio et super difficile parfois à assumer derrière, une fois qu'elle appartient aux gens.

Amel Bent nous disait justement dans une récente interview qu'une de ses chansons, sur son père, possédait une "charge émotionnelle trop importante" pour qu'elle puisse la chanter en public...
Je la comprends totalement ! En studio, tu es dans l'émotion, tu donnes tout, tu pleures, t'es moche mais tu t'en fous parce que t'es entourée de personnes en qui tu as confiance, les personnes avec qui tu écris, tu composes. Pour nous les artistes, le studio est une espèce de sanctuaire, une bulle dans laquelle on rentre et c'est un endroit qui est sacré. C'est là que tout existe, tout sort : on n'y a pas honte, on n'y a pas peur. On ne pense jamais à cet "après", justement, où il va falloir gérer publiquement ce qui en émerge. C'est souvent pour ça qu'on se retrouve à bégayer quand il faut parler d'un titre très personnel. (Rires) C'est très compliqué émotionnellement.




Revenons au projet. C'était comment d'enregistrer avec le choeur gospel de Paris ?
C'était fou ! Bon, on n'a pas enregistré la chanson ensemble en studio parce qu'ils sont beaucoup trop nombreux. J'ai posé ma voix sur le titre avant qu'ils n'interviennent et après eux ont ajouté leur touche de magie.

« Katy Perry m'a fait rêver comme personne »
L'album est décrit comme « un hommage à la bande son de nos vies ». Si tu devais choisir une bande-son pour la tienne, ce serait qui ou quoi?
Oh là là... Tu me poses une colle. Ça ne peut pas être la bande-son de ma vie mais la personne qui m'a donné le plus envie de faire ce métier c'est Katy Perry. Je sais, ça n'a aucun rapport avec ma musique ! C'est tout l'inverse. (Rires) Je suis fan d'elle. Elle me touche. J'adore sa musique et le monde qu'elle a créé. Franchement, elle m'a fait rêver comme personne. Ça, je lui dois vraiment à elle.

Avec sa résidence à Las Vegas, on part vraiment dans un autre univers que le tien !
Oui, les toilettes géantes, faut l'assumer. (Rires) Elle est à un stade où elle se marre, elle donne tout pour s'amuser et amuser son public. Je l'adore vraiment parce qu'elle est l'archétype de l'artiste qui va au bout de son idée et qui ne la lâche pas. Elle a quand même passé les premières années de sa carrière à tendre qu'elle aurait dû être chose que ce qu'elle est ! Elle n'a pas cédé et juste pour ça, c'est un modèle de persévérance. Elle a une vraie personnalité, je l'admire énormément et je ne la trouve jamais ridicule, ce qui est quand même très fort. Après, je dirais que la BO de ma vie est une espèce de mélange entre Avril Lavigne et The Weeknd. J'ai beaucoup de personnalités différentes en fait, elles n'interviennent pas toutes au même moment !

« Je suis beaucoup en studio »
Hormis cette apparition sur l'album de reprises de Jean-Jacques Goldman, quelle est la suite de tes projets ?
Je suis beaucoup en studio ces derniers temps. J'ai écrit de nouveaux titres que je compte évidemment sortir cette année. Ça se compte en quelques semaines, quelques mois. A partir de là, j'aimerais gentiment reprendre le cours de ma vie d'artiste, en espérant que les choses se tassent un peu [sur le plan sanitaire], qu'on puisse reprendre les concerts et faire notre boulot.

Tu travailles donc sur un nouvel album ?
Je ne me prends pas le chou pour l'instant. Je suis en studio, je fais mes chansons, je ne réfléchis plus vraiment comme ça. Là pour moi le plus important, c'est de proposer titre par titre quelque chose de beau et génial, et j'ai l'impression d'en avoir deux super solides qui peuvent représenter ce que je fais aujourd'hui. À voir pour la suite. (Sourire)




« Il y a comme une espèce de cassure dans l'humanité »
Est-ce que la situation difficile que l'on traverse, les aléas de la pandémie, ça t'inspire des textes ?
Non, pas du tout. Honnêtement non, je n'écrirais jamais une chanson sur le Covid ou sur l'isolement. Vraiment... (Elle grimace) Non. Ce que j'écris concerne des sentiments hyper profonds de ma vie. Ce qu'il se passe, ça me saoule c'est tout. (Rires) Avant, j'étais déjà un peu socialement inadaptée et je le suis devenue encore plus à cause de ce virus. J'ai eu vraiment une phase où j'avais l'impression d'avoir du mal à m'exprimer publiquement. Même si on reprend un peu la vie, même si on refait des choses, il y a comme une espèce de cassure dans l'humanité. Et ce n'est pas fini... On a l'impression qu'on n'en sort pas, qu'on est pris dans des sables mouvants. Ce qui me fait le plus de peine, c'est de penser aux enfants et adolescents d'aujourd'hui. A quelle heure ils peuvent comprendre qu'il faut porter un masque, ne pas approcher les copains, ne pas se toucher ? On est en train de casser leurs instincts primaires et ça me fait peur pour les séquelles qu'ils garderont plus tard. Je suis bien triste pour la jeune génération.

On t'a vue pousser un coup de gueule sur Instagram après l'annonce des nouvelles mesures de restriction concernant les concerts. On sent qu'il y a un ras-le-bol général dans l'industrie musicale. En tant qu'artiste, tu ressens quoi ?
J'en peux plus. J'en peux plus pour moi, j'en peux plus pour le cinéma, parce que les réalisateurs font des films mais on ne peut même plus aller les voir, j'en peux plus pour toute la culture, l'art en général. Tout ce qui permet aux gens de s'évader, en fait. On aimerait que la vie ne soit pas qu'un métro-boulot-dodo et c'est un peu ce qu'on est en train de nous dire de faire : ne vous évadez plus, n'allez plus prendre l'air, n'allez plus voir un film, ayez peur... Je suis fatiguée. Je ne sais pas où ça nous mène. On va tous se présenter en politique comme ça on pourra faire notre métier.

C'est difficile pour une personnalité publique de prendre la parole sur un sujet aussi délicat ?
On nous rappelle souvent que ce n'est pas à nous les artistes de s'exprimer et qu'on doit rester à notre place. Je suis d'accord avec le fait que je ne suis qu'une chanteuse, je n'ai pas la vérité absolue. Tout ce que je sais, c'est que la pression morale qu'on nous met me semble être pire que le reste. Malheureusement, on est en train de basculer vers une espèce de ras-le-bol et de dépression collective. Ça, ça me paraît plus grave

« Je respecte les choix de tout le monde »
Comprends-tu que tes déclarations sur le vaccin aient pu interpeller ?
Bien sûr. Pour moi, le débat fait partie de la vie, on n'est pas censé tous être d'accord. Vaccinés ou pas vaccinés, moi je respecte les choix de tout le monde. Je n'ai jamais dit que j'étais contre le vaccin, loin de là. Ce que je n'aime pas, c'est la division. Là, on sent qu'il y a une scission entre les gens : vaccinés, pas vaccinés, oui, non... C'est ça que je n'aime pas. On devrait tous pouvoir vivre en communauté en respectant les choix des uns des autres. Ce n'est pas entre nous qu'il faut se battre, c'est contre ce virus et tout ce qu'il a créé. C'est dommage, aujourd'hui, que les gens se battent entre eux, et ça me peine.

Que peut-on te souhaiter pour cette année 2022 ?
C'est utopique mais que ça aille mieux ! Que ça se calme, qu'on aille vers le bon et qu'on retrouve un peu de légèreté.
Toute l'actu de Marina Kaye sur son site internet et sa page Facebook.
Ecoutez et/ou téléchargez le dernier album de Marina Kaye sur Pure Charts.

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