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« Il y a 30 ans jour pour jour, je sortais "Like a Prayer" et j'ai fait un clip qui a fait un gros scandale car j’embrassais un saint noir et je dansais devant des croix en flammes. J'ai aussi fait une pub pour Pepsi qui a été censuré car mon clip était considéré comme "inapproprié". Joyeux anniversaire à moi et à la Controverse. Je voulais poster ça hier mais ça a été bloqué. Quel scandale ! ». Voilà le message, en forme de pique, que postait Madonna sur Instagram à l'occasion des 30 ans de l'un de ses titres les plus iconiques, mais aussi le plus scandaleux : "Like a Prayer". Car s'il depuis devenu l'un de ses grands tubes, le titre a suscité énormément de polémiques à sa sortie.

Bien qu'elle sorte du triomphe de "True Blue" (25 millions de ventes), Madonna vit une année 1988 compliquée. Son film "Who's That Girl" est un échec, son expérience théâtrale sur "Speed the Plow" reçoit des critiques catastrophiques et son mariage avec Senn Penn tourne au drame. La popstar doit alors se refaire à tout prix une santé musicale et décide de s'impliquer pleinement dans la production de son quatrième album à venir. En optant pour des sonorités plus matures, elle va se livrer comme jamais avec "Like a Prayer", inspirée par son récent divorce avec l'acteur hollywoodien. « Je voulais que l'album et mes chansons parlent des choses de ma vie. C'était une période complexe » dira-t-elle. Au-delà de tout ça, Madonna veut évoquer Dieu, la religion et la spiritualité, ce qu'elle fait à merveille dans le single introductif, écrit en trois heures avec Patrick Leonard selon la légende.

Regardez le clip de "Like a Prayer" :

Sexe et religion : le cocktail parfait de la provocation

Mais dès le début, les paroles à double sens du refrain posent problème, pouvant rappeler autant une prière qu'un acte sexuel : « When you call my name, Its like a little Prayer, I'm down on my knees, I wanna take you there ». Si le producteur fait la moue, Madonna clame que ce sera ça ou rien. Après avoir fait appel à une chorale pour enregistrer les chœoeurs, la chanteuse se tient fin prête pour délivrer au monde le nouveau "son Madonna", dès le mois de mars 1989. A sa sortie, "Like a Prayer" reçoit des critiques positives. Pour Stephen Holden du New-York Times, "Like a Prayer" signe une réinvention « de la simple dance-pop hurlante à la douceur du True Blue post-Motown et la pop parfaite de Like a Prayer ».

Jusqu'ici, tout semble aller pour le mieux, d'autant plus que le morceau se classe en pole position des charts américains, anglais ou italiens. Cinq millions d'exemplaires sont vendus, soit la 11ème meilleure vente de l'année. Mais comme Madonna rime toujours avec provocation, l'arrivée du clip va susciter un énorme scandale. La vidéo est tout d'abord teasée par Pepsi qui annonce avoir signé un contrat de 5 millions de dollars avec la star, pour le financement de sa prochaine tournée et une pub avec "Like a Prayer" en bande-sonore. L'objectif pour la marque est de relever la tête face à Coca-Cola, qui vient de s'offrir George Michael. Vu par plus de 250 millions de téléspectateurs lors de sa première diffusion, l'encart publicitaire permet à la star de se remémorer des images de son enfance et de diffuser, fait unique, le titre avant même sa commercialisation.

Une affaire qui remonte jusqu'au Pape !

Le lendemain, la chanteuse dévoile le véritable clip du morceau. Elle y joue une femme témoin d'un meurtre qui se cache dans une église. Elle y voit la statue d'un saint noir qui devient humain et embrasse la star. Alors que l'église s'anime autour d'une chorale, Madonna, qui porte les stigmates, se met à danser devant des croix en feu. Il n'en faut pas plus pour déclencher les foudres de l'Eglise et de certains groupes extrémistes, jugeant le clip blasphématoire pour l'image de la religion. Ils appellent notamment au boycott de Pepsi qui tient bon au départ. Pire, en Italie le Pape se mêle de l'affaire et appelle au boycott de la chanteuse. La chaîne RAI et la branche italienne de Warner cèdent sous la pression de groupuscules chrétiens, tout comme Pepsi qui retire la pub après quelques jours et met fin au contrat qui le liait à la star.

Regardez la version live de "Like a Prayer" :


Ce qui sera l'un des plus gros scandales de la star n’entachera pas la carrière du titre, bien au contraire. Sorti le même jour, l'album s'écoule à plus de 15 millions d'exemplaires. C'est moins que ses deux prédécesseurs mais assez pour continuer à faire de la Madone la star qu'elle est. Dans la foulée, le "Blond Ambition Tour" continuera à faire souffler un parfum de scandale. Lors de son arrivée en Italie, Madonna fait face à de nombreuses protestations. Il faut dire qu'en plus de la polémique du clip, la chanteuse mime une masturbation sur scène. Elle ne jouera ainsi que deux des trois concerts prévus dans le pays, l'un des shows prévus à Rome est annulé faute de billets vendus et à cause d'une grève des ouvriers.

Depuis, "Like a Prayer" a fait taire la polémique pour se concentrer sur la musique. Un temps délaissé sur scène, le titre deviendra un classique, joué comme un véritable hymne lors de ses tournées en 2008 et 2012. En le choisissant comme clôture de sa mi-temps du Superbowl, Madonna a prouvé a quel point elle a su toujours mêler sexe, religion et provocation avec un succès sans précédent.