Instagram
« Il y a des projets qui changent un homme, qui changent une vie… Celui-là en fera partie ». C'est par ces mots que le chanteur M. Pokora a annoncé le 1er juillet la mise en chantier d'un téléfilm sur le massacre d'Oradour-sur-Glane, épisode tragique de la Seconde Guerre Mondiale. Diffusée prochainement sur TF1, ce téléfilm en deux épisodes, baptisée "Oradour, ne m'oublie pas", vient d'entrer en tourage du côté de la Belgique. À l'initiative du projet, M. Pokora incarnera Philippe Gerbier, un officier des Forces Françaises Libres parachuté près d'Oradour-sur-Glane, en Haute-Vienne. Le soldat de la résistance va y retrouver Marie, son amour de jeunesse incarnée par Caroline Anglade, qui fuit un mari violent avec sa fille. Deux destins qui vont s'entremêler à l'Histoire...
La ville réclame "le respect de la vérité historique"
Pour aborder au mieux ce rôle, M. Pokora a pu rencontrer en 2022 Robert Hebras, le dernier survivant de la tuerie ayant causé la mort de 643 habitants par les nazis, dont des femmes et des enfants. Seulement voilà, le maire de la ville d'Oradour-sur-Glane, Philippe Lacroix, fait part de son plus grand étonnement d'apprendre le développement du film par voie de presse. Et il se dit inquiet « par rapport au respect de la vérité historique ». « On n'a pas été consultés ou informés : qu'il y ait une fiction, c'est inévitable et ça peut être un bon moyen de faire connaître Oradour. Ce qui m'inquiète, c'est le côté respect de la vérité historique. D'après ce que j'ai lu, il est fait référence à la Résistance par un parachutage, ce qui perturbe la compréhension, car le 10 juin 1944 s'est déroulé en dehors de tout phénomène de Résistance » rappelle Benoît Sadry, président de l'Association nationale des familles de martyrs d'Oradour (ANFMOG), auprès de France 3.
Les deux hommes annoncent leur intention de saisir le Ministère de la Culture : « C'est assez surprenant qu'on n'ait eu aucun contact avec la production. Le maire et moi-même allons écrire à TF1 pour un appel à la vigilance historique ».
"Une reconstitution approximative peut créer des confusions"
Pour faire entendre leur voix, ils signent un communiqué conjoint avec le Conseil départemental de la Haute-Vienne et le Centre de la Mémoire d'Oradour, sous-titré « Appel à la responsabilité ». « Nous exprimons notre vive inquiétude quant au traitement historique de ce téléfilm. Si la fiction peut être un vecteur de sensibilisation, elle ne peut s'affranchir d'une rigueur historique absolue dès lors qu'elle s'inspire d'un événement d'une telle gravité et d'une telle portée mémorielle. (...) Une reconstitution approximative, même partielle, peut créer des confusions et compromettre le travail d'histoire et de mémoire mené depuis des années » s'alarment les signataires, qui estiment que cet « événement majeur de notre histoire nationale et européenne » existe « respect, précision et responsabilité ». « Nous n'avons connaissance d'aucune collaboration avec des historiens ou chercheurs de la mémoire, ce qui suscite de légitimes interrogations sur la solidité du projet » déplorent-ils.
Auprès de France 3, la direction de TF1 assure qu'une réponse sera apportée « dans les plus brefs délais ». L'interprète de "Reflet" ne s'est pour sa part pas exprimé sur la polémique.