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Louis Albi en interview : "Je veux faire avancer les choses pour la cause queer"

Par Julien GONCALVES | Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
Quelques mois après la "Star Academy", Louis Albi se confie en interview sur l'après, le lancement de sa carrière, son clip queer "Que tu te mentes", Enola, Slimane ou encore l'Eurovision. Rencontre avec un jeune artiste avec la tête sur les épaules !
Crédits photo : Joséphine Messien
Propos recueillis par Julien Gonçalves.

Comment as-tu vécu l'après "Star Academy" ?
Le dimanche, au lendemain de la finale, j'ai eu très peur. C'est le seul jour de down que j'ai eu. J'étais effrayé, c'est tout un monde que je ne connaissais pas. J'avais peur de ne plus être protégé dans la bulle dans laquelle on était. Je me demandais comment ça allait se passer... Je me posais plein de questions. Mais dès le lundi, je me suis dit : "Tu es le seul à pouvoir mettre en marche la machine donc il faut y aller". Tout s'est fait rapidement, j'ai rencontré les équipes de Columbia, on a parlé de mon projet, ils ont décidé de me signer, je me suis bien entouré, de managers, d'une équipe. Et on a commencé tout de suite à travailler, à faire de la musique en studio.

Michael Goldman et les professeurs m'ont aidé après la "Star Ac"
Alors comment on fait les bons choix ?
Je crois qu'il n'y a pas de bons ou de mauvais choix. Je fais tout par le coeur. Je suis très très sensible et je sens si ça matche ou pas. Si je n'ai pas de feeling, je ne donne pas suite. C'est comme ça que je fonctionne, j'ai toujours fait comme ça. Après on peut se tromper mais je mise sur mon instinct et mon coeur pour ne rien regretter. J'ai été aidé par, entre autres, Michael Goldman, des professeurs ou des artistes, j'ai demandé des conseils. Je fais partie de ceux qui ne connaissaient vraiment pas le métier parce que je n'ai jamais été sur Paris ni eu de contact dans ce milieu de près ou de loin. C'était très particulier pour moi d'arriver dans ce milieu, de me faire à tous ces nouveaux codes.

Et comment tu vis ces changements ? Car ce sont plein de premières fois j'imagine !
J'étais jamais réellement parti de chez mes parents. J'ai fait mes études à Bordeaux mais tous les week-end je rentrais, j'ai passé les confinements chez eux... Là, j'ai déménagé à Paris, je me suis dit que c'était un sacrifice à faire mais je voulais être là, ne rien regretter et bosser le plus possible. J'ai d'abord vécu pendant quatre mois chez ma meilleure amie dans 14 mètres carrés ! La pauvre ! (Rires) Je sais qu'il y a plein de gens qui le font mais venant de la campagne, c'était un peu particulier. Maintenant j'ai mon petit appartement, je suis bien, je suis installé. J'ai rencontré Valentin Marceau, on a travaillé directement sur mon album. On s'est éclaté à tout faire ensemble !

Je ne voulais pas arriver avec un album pathos
Tu le voyais comment ton projet ?
J'ai toujours été en phase avec ce que je voulais. Je suis entré à la "Star Ac" en sachant où je voulais aller, et en sortant, ça n'a fait que cadrer mes choix. C'est tellement un milieu qui m'attire que j'ai toujours dessiné et rêvé toute l'image et la musique je voulais faire. Je voulais quelque chose qui sonne assez international, car je n'écoute pas forcément beaucoup de musique française. Mes inspirations c'est Shawn Mendes, Harry Styles ou Charlie Puth. J'adore Taylor Swift aussi. Sur la scène française, je suis plutôt Clara Luciani ou Juliette Armanet avec des sons très organiques. Je voulais une musique inter mais à la française avec des belles paroles, des thèmes intéressants. Je ne voulais pas arriver avec un album pathos, je voulais quelque chose de frais, festif. En sortant de cette aventure, j'avais envie de m'éclater ! Le drama fait partie de moi, j'adore, mais j'avais cette joie en moi et j'avais besoin de l'exprimer.

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Comment tu as vécu la notoriété en sortant de l'émission ?
Pendant la "Star Academy", on ne s'en rend pas compte. Enfin, la fois au Zénith d'Orléans où le bus s'est fait poursuivre par des milliers de gens, là on s'est dit que c'était fou. Je suis conscient d'où je viens, qui je suis, donc je me dis : "Pourquoi moi ?" C'est particulier de passer d'un extrême à l'autre mais j'ai la tête sur les épaules. Dans la rue, tout se passe normalement, je ne suis tellement pas star... Je me dis qu'il y a des problèmes ou des situations bizarres quand on n'a plus forcément les pieds sur Terre ou quand on met une distance avec les gens. Mais on est des gens normaux, et quand je croise des personnes dans la rue, qui ont compris où j'habite, c'est sain, la proximité se crée naturellement. Je suis totalement normal, je fais ma petite vie mais oui je fais de la musique et je fais un métier dans la lumière. Tous les artistes devraient être comme ça ! (Sourire)

J'ai eu peur que les gens n'aiment pas
Tu as déjà dit avoir été victime de harcèlement scolaire. Quand on est adulé alors qu'on a longtemps été montré du doigt, comment on le vit ?
Je sais qu'il y a des gens qui le voient comme une revanche sur la vie mais je ne le vis pas du tout comme ça. C'est pas ce pour quoi je fais ce métier, je ne cherche pas à prouver quoi que ce soit à quelqu'un. C'est vraiment ce que j'aime, c'est là où je me sens à ma place, épanoui. Je suis soulagé d'avoir enfin trouvé l'endroit où je me sens bien.

Tu sors ton premier single "Que tu te mentes". Tu as eu la pression de transformer l'essai après l'émission ?
J'ai eu la peur que les gens n'aiment pas, évidemment. Mais c'était un parti pris que j'écrive, que je compose, qu'on se donne à fond avec mon équipe en y mettant du coeur et en étant le plus sincère possible. Après les gens l'aiment ou ne l'aiment pas mais à partir du moment où je suis vrai, je ne peux pas regretter quoi que ce soit. La veille de la sortie, je pleurais, j'appelais ma mère et ma meilleure amie, c'était n'importe quoi. Le lendemain, j'ai reçu toute une vague d'amour. La seule haine que j'ai reçue, c'étaient des critiques sur moi-même. J'ai compris que ce n'était pas la musique qui les dérangeait mais ce que je représente, la liberté que je représente. Donc ça m'a rassuré, et ça m'a donné envie de délivrer les autres messages de cet album.

J'ai vraiment envie de normaliser certaines choses
Comment cette chanson est-elle née ?
La chanson est née après que Mendelevitch est venu vers Marsö et moi avec une prod. On s'est dit qu'on allait créer quelque chose sur cette super base. Mais on ne savait pas trop de quoi parler... Je parle beaucoup et mon manager sait à peu près toute ma vie. Je lui avais raconté une histoire qui s'était passée, très peu de temps avant, avec un garçon qui est une personnalité publique et qui ne voulait pas forcément parler de sa sexualité. C'était juste un crush, un début d'histoire. Je trouvais ça dommage mais en même temps respectable parce que s'il ne se sentait pas prêt, et ce n'est pas à moi de l'outer. J'ai écris sur cette histoire, et j'ai voulu l'axer de manière universelle, l'ouvrir à toute personne qui ne peut pas vivre un amour au grand jour. Cette chanson raconte le courage qu'il faut parfois avoir d'aimer, c'est une invitation à se libérer, à s'accepter soi et être plus indulgent avec soi-même.

Tu peux me parler du clip, qui est très fort ?
Je trouvais ça important, en première prise de parole esthétique, de ne pas juste être beau, de sourire. On trouvait ça important de raconter une histoire, de travailler sur une identité visuelle. C'est un peu comme un court-métrage ce clip. On est super fier !




Tu me parlais de courage tout à l'heure... A ton âge et venant de la campagne, c'était facile pour toi d'assumer ton homosexualité publiquement et d'embrasser un garçon dans ton clip ?
C'était évident. Je voulais montrer que c'est normal. Dans des milliards de clips, il y a un homme et une femme qui s'embrassent. Dans le mien, je parle d'un garçon donc je vais embrasser un garçon. Je n'ai pas voulu en faire un événement, c'est normal, comme ça, ça a le droit d'exister. J'espère que ce clip sera vu. J'ai vraiment envie de normaliser certaines choses. C'était important de montrer cette histoire d'amour, qui serait la même si c'était une fille et un garçon. C'est juste mignon, c'est de l'amour, c'est universel.

Je veux faire de la musique populaire
Tu n'as pas redouté la réaction de certains membres de ta famille ?
Je me suis même pas posé la question. Je me suis dit : "C'est ma carrière, ce sont mes envies. Je ne fais de mal à personne." Au contraire, je pense que ça peut aider... Donc je fais ! Je ne veux pas forcément être un porte-parole car c'est lourd, mais tous ensemble, en mettant une pièce du puzzle, on peut construire quelque chose de grand. Donc voilà, j'ai mis ma pièce et je voulais dire que je suis engagé car je fais partie de cette cause, ça me touche directement et j'essaie de faire avancer les choses.

Comme Hoshi ou Bilal Hassani, as-tu pensé à une potentielle vague de haine sur les réseaux sociaux ?
Je suis préparé en fait. J'en ai tellement reçu avant et à la sortie de la "Star Ac". Contrairement aux autres élèves, c'était quotidiennement... J'ai vachement de distance par rapport à ça parce que je ne pensais pas avoir les épaules. J'arrive à prendre de la distance et à ne pas être affecté car ce qu'ils me reprochent, c'est d'être moi. Ce n'est pas juste un trait de caractère, c'est moi, mes désirs, mes goûts, et je ne vois pas où est le problème. A partir du moment où je ne fais de mal à personne, je n'ai rien à me reprocher. Je vis ma vie, ils vivent la leur.

De quoi vas-tu parler sur ton premier album ?
Je souhaite aborder plein de sujets qui me touchent. Sur cet album, qui est le premier, je veux me présenter. Les gens me connaissent à travers le prisme de la télé mais ils ne savent pas tout de moi. J'ai plein de choses à leur faire découvrir. C'est une mise à plat de ce que je suis aujourd'hui. Je leur donne une partie, il y en aura d'autres plus tard parce qu'on a plein de facettes. Je vais parler de mon enfance, mettre en avant ma sincérité, ce qu'il se passe dans ma vie. Il n'y a pas eu de compromis, je raconte mes histoires, ma vie, et je l'ouvre aussi aux autres. La musique c'est pas que parler de soi, c'est aussi parler des autres. Je veux faire de la musique pop, populaire.

As-tu prévu de faire un duo avec Enola, ta grande amie durant la "Star Academy" ?
Non, pas du tout. Elle est sur ses projets personnels, moi sur les miens. On ne voulait pas s'enfermer dans cette histoire "Star Ac". Je l'aime de tout mon coeur, c'est mon bébé, on se voit tout le temps. On est amis avant tout et c'est important qu'on prenne chacun notre direction artistique. On est proches et on a plein de choses en commun mais on n'a pas forcément le même univers. C'est bien que chacun s'affirme de son côté. Mais ça ne veut pas dire qu'on ne se retrouvera pas plus tard sur la plus grande chanson de tous les temps ! (Rires)

Slimane t'a offert la chanson "Même pas mal" durant la "Star Academy". Est-ce qu'il sera sur l'album ?
Non, il n'a pas travaillé sur le projet. Slimane m'a écrit une chanson, qui est superbe, mais qui ne correspond pas à la couleur de l'album que je voulais. Du coup, c'était important pour moi d'affirmer mes choix, mes envies musicales avec ce nouveau single, sans renier l'autre qui est super. C'est un titre que j'aime beaucoup. J'ai bossé avec Valentin Marceau, et tout s'est fait naturellement autour de lui. Slimane était dans ses projets, on en avait parlé mais ça n'a pas pu se faire, tout est allé très vite pour moi. Je l'aime beaucoup et je lui serai toujours reconnaissant d'avoir écrit ma première musique.

Dernière question, aimerais-tu représenter la France à l'Eurovision l'an prochain ?
J'ai reçu tellement de messages par rapport à ça ! (Rires) L'Eurovision m'a toujours fait rêver. Je suis le concours depuis toujours parce que j'adore le principe que chaque pays puisse chanter dans sa langue, avec des univers musicaux très différents et il y a cette union autour de la musique. C'est juste des discours de paix, de tolérance, d'acceptation. C'est quelque chose qui me plait mais actuellement je suis vraiment focalisé sur mon projet donc je ne pense pas que ça me dirait pour l'année prochaine. Mais dans quelques années qui sait ? Après si j'écris une chanson et qu'elle est parfaite pour l'Eurovision, je ne dis pas non car on ne sait pas ce qui peut se passer. J'attends la chanson, l'envie, la bonne rencontre, le moment. Je fonctionne à l'instinct !
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