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Corneille en interview : "Aya Nakamura symbolise un espoir pour les jeunes filles"

Par Théau BERTHELOT | Journaliste
Passionné par la musique autant que le cinéma, la littérature et le journalisme, il est incollable sur la scène rock indépendante et se prend de passion pour les dessous de l'industrie musicale et de l'organisation des concerts et festivals, où vous ne manquerez pas de le croiser.
Corneille crée la surprise avec une nouvelle version de son tube "Avec classe", partagée avec Aya Nakamura et Trinix. Joint depuis le Canada, le chanteur se confie sur cette collaboration inattendue, ses prochains projets et son point de vue sur le retour au premier plan du R&B des années 2000. Interview !
Crédits photo : Kevin Millet
Propos recueillis par Théau Berthelot.

Comment est venue l'idée de ce duo "Avec classe" avec Aya Nakamura ?
En fait, c'est pas du tout mon idée ! J'ai l'habitude d'être un producteur d'idées mais je n'ai absolument rien à voir avec ça. Ça a été quelque chose d'hyper spontané : Aya Nakamura avait l'habitude de reprendre "Avec classe" durant ses concerts. Quand j'ai appris ça, ça m'a beaucoup touché. Je me rappelle avoir fait un coucou dans l'émission "Clique", pour dire à quel point elle était importante sur la scène en tant que jeune fille noire avec le succès qu'elle a eu, ce qu'elle symbolise... Trinix, je les connaissais que de nom. Dès qu'ils trouvent un live ou un a cappella qui traîne, ils réalisent quelque chose. Ils avaient trouvé un live d'Aya qui faisait '"Avec classe" sur France Inter dans un guitare-voix assez simple. Ils ont pris sa voix et ont réarrangé le morceau. J'ai trouvé ça incroyable. Ses fans et mes fans n'ont pas arrêté de dire qu'il fallait le sortir... et on a écouté les gens (rires). Mais ça a vraiment été hyper spontané, on ne s'est pas appelés... Moi je suis sur d'autres projets au Canada, je suis coach dans "The Voice", je viens de partir d'un label... J'étais à fond dans le développement de jeunes artistes. Je n'avais pas prévu ça, Aya non plus ! Et c'est vraiment Trinix qui a eu cette idée qu'on a suivie.

Cette collaboration a été hyper spontanée
Tu as réenregistré ta partie ou ce sont les parties vocales de l'époque ?
Moi j'ai réenregistré parce que je trouvais ça tellement frais. Il y a 20 ans qui sont passés, ma voix a évolué. Alors qu'Aya c'est différent : c'est un live qu'elle a enregistré il y a un ou deux ans. Sa voix est exactement la même, c'est celle qu'on connaît. Donc je me suis dit : tant qu'à faire un morceau, je vais refaire ma partie.



A travers cette ressortie, il y a une volonté de faire découvrir ce titre à une nouvelle génération ?
C'est quelque chose qui a été créé en toute spontanéité et qui, aujourd'hui, sort. On va voir comment le public va le recevoir, mais c'est cool de pouvoir allier des générations. Cette rencontre générationnelle, c'est quelque chose qui m'a toujours parlé. On va voir la réaction des gens, des fans des uns et des autres, mais c'est sûr que la rencontre de plusieurs générations, il y a un truc très cool. Moi j'ai surtout envie de proposer ça car musicalement c'est très très chouette. Après, c'est au public de décider !

Il y a un son et un style Aya Nakamura
C'est facile de revisiter et moderniser un titre qui a marqué une époque musicale ?
C'est très difficile ! C'est pas tant au niveau de l'âge. La difficulté n'est pas dans la technique de prendre quelque chose du passé et de le réarranger, mais c'est de ne pas dénaturer quelque chose qui est dans la nostalgie et la conscience collective des gens. C'est la force de la chanson : c'est une photo audio d'une époque. Généralement, c'est dur de se détacher des versions originales, c'est pour ça que je suis toujours un peu frileux sur les reprises de mes titres, car une partie de moi veut laisser ça où c'est. Là pour le coup, comme ça ne venait pas de moi, il y avait une distance. Et les codes mis par Trinix me parlent énormément, c'est pas de l'EDM comme ils ont l'habitude, mais quelque chose de plus afro. Ils ont vraiment respecté l'esprit de la version originale. Juste assez de modernité sans dénaturer le truc. Quand les gens demandaient de le sortir, ça me paraissait une évidence car j'adhérais à la démarche artistique.

Tu en as déjà un peu parlé, mais que représente pour toi Aya Nakamura ?
Je sais pas si c'est le cas en France, mais au Canada on parle beaucoup de représentation et de diversité dans les grands médias. Il y a des groupes de gens clairement sous-représentés et le plus sous-représenté, ce sont les femmes noires. Et Aya, c'est une anomalie ! Ça dépasse l'exception. Je n'ai pas souvenir d'avoir vu en France une chanteuse noire avoir autant de succès chiffré médiatiquement parlant. Aussi au niveau de l'influence : il y a un son et un style Aya Nakamura, le langage qu'elle emploie, la forme de ce qu'elle fait et assumer aussi ce qu'elle représente comme personne. Et même c'est au-delà de la musique, son succès a dépassé le cadre strictement artistique. Elle symbolise un espoir pour toutes les jeunes filles, pas que noires.

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Il ne fallait pas dénaturer quelque chose de nostalgique
Tu te vois sortir un album de duos où tu revisites tes succès, comme l'ont fait Lorie, Véronique Sanson ou Florent Pagny ces derniers temps ?
Ah pourquoi pas oui ! Tant que la démarche artistique est honnête, je suis tout à fait partant. Puis ce serait cohérent, puisque comme tu l'as dit, je fais partie d'une autre génération. Mon premier album a marqué une génération de gens qui ont mon âge. Ces gens-là, aujourd'hui, sont des parents et je rencontre toujours des gens qui me disent que je suis leur premier concert et qu'ils m'écoutent toujours avec leurs enfants. Cette transmission me touche beaucoup. On verra comment se porte le single mais si je vois que ça se passe bien, qu'il y a un bon retour, ça peut me donner envie de continuer dans la foulée pour faire le pont entre les générations.

Aujourd'hui quels sont tes projets ? Tu travailles sur un nouvel album ?
Depuis plusieurs années, je suis très au Canada, ça fait longtemps que je n'ai rien fait en France pour des raisons familiales. On a beaucoup travaillé avec mon épouse ici. J'étais en train de préparer un projet où je sortais des chansons qui, pour moi, contenaient mes textes les plus forts, mais sur des albums qui n'ont pas connu le succès que certains autres ont eu ou qui ont été dans l'ombre d'autres chansons sur les mêmes albums qui, elles, ont eu beaucoup de succès. C'est un projet qui s'appelait "L'écho des perles", une idée de dire que ça s'applique aux humains : c'est pas parce que tu ne trouves pas la lumière au moment où tu t'exposes que tu n'y auras pas droit un jour. Quand il y a une chanson, une qualité, une inspiration profonde, ce n'est pas parce qu'elle ne marche pas aujourd'hui qu'il faut la mettre à la poubelle. Elle est peut-être juste un peu en avance sur son temps. L'idée m'est venue il y a deux ans en relisant les textes, je me rendais compte que j'étais archi inspiré à l'époque. Les thèmes sont encore d'actualité, ce sont des chansons qui se remettent très facilement au goût du jour et c'est là dessus que je bossais. C'était une sortie que j'allais surtout travailler pour le Canada... Mais là on verra, peut-être qu'avec Aya Nakamura et Trinix, ça va peut-être me forcer à sortir de mon cocon canadien (sourire).

Je suis un peu frileux sur les reprises de mes titres
Tu aurais envie de faire un autre duo avec Aya Nakamura sur un inédit ?
Ah bah ouais, carrément ! Au-delà de tout ce que je viens dire, je trouve qu'artistiquement et vocalement, elle a une vraie signature. T'entends Aya, tu sais que c'est elle. Et en plus elle est dans un style qui me parle, donc avec plaisir.



Il y a une tendance à l'âgisme : il faut rester éternellement jeune
Il y a un retour du R&B depuis quelques années où des artistes de la nouvelle génération samplent des tubes R&B des années 2000, qu'est-ce que ça te fait ?
Moi j'adore ! Je trouve qu'il y a une tendance à l'âgisme dans la société, où on a l'impression qu'il faut rester jeune éternellement. Cette pression de vouloir être dans les codes de la nouvelle génération, ça n'a pas de sens, on a le droit de grandir et d'évoluer. Ce que je trouve cool, c'est que quand la nouvelle génération sample des chansons de ma génération, c'est une validation à l'importance et à la pertinence de ce qu'on a fait. De la même façon de ce qu'a fait le hip-hop par le passé. Sampler, c'est rendre hommage. Il y a quelque chose qui s'est fait dans le passé, et c'était tellement bon, il y avait une telle force artistique qu'on ne peut pas recréer ça. Donc on emprunte et on rend hommage. J'adore cette démarche : c'est une façon de palier à cet âgisme qui touche toutes les sphères de nos expériences humaines. C'est une belle façon de rendre hommage aux anciens et en musique, quand ça marche, c'est très bien. Même dans la pop, on ramène au goût du jour des chansons d'Elton John... Ça me parle beaucoup, surtout de faire le pont entre les générations.

On t'avait déjà approché pour qu'on sample un de tes titres ?
C'est arrivé fréquemment. Des fois, ce n'était peut-être pas abouti, mais ça passait quand même. C'est déjà arrivé qu'il y ait des reprises de "Avec classe" ou "Parce qu'on vient de loin" sur les réseaux sociaux. Je me rappelle de Hatik qui avait fait une version super cool de "Comme un fils". La "Star Academy" avait fait il y a longtemps une version de "Parce qu'on vient de loin"... Mais pas de samples ! J'ai pas le souvenir d'avoir eu un vrai sample, où ils ont repris un morceau d'un de mes anciens titres. C'est peut-être arrivé et je suis pas au courant (rires).

Cette transmission entre générations me touche
Tu fais "The Voice", tu as participé à "Danse avec les stars"... Tu te verrais participer à une émission comme "Mask Singer" ?
"The Voice" c'est très particulier : c'est ce que j'ai toujours dit que j'aimerais faire, en dehors de ma propre musique. Encore plus que faire de la musique pour moi ou monter sur scène, ce que j'aime c'est le mentorat d'autres artistes. Ça fait plus de 20 ans que je fais ce métier et l'idée de la transmission, de partager mes bons coups et surtout mes mauvais coups pour aider la nouvelle génération à préparer leurs carrières avec un peu plus d'éducation. "The Voice", c'est l'endroit rêvé pour quelqu'un qui veut être dans le mentorat et pour permettre à un jeune artiste de faire un cours accéléré de la musique avec des moyens, mais aussi énormément de pression. C'est probablement le truc que j'ai le plus kiffé dans ma vie ! "The Voice" c'est une exception. "Mask Singer", ce n'est pas quelque chose que je me verrais faire. Je ne pense pas que j'aurais le même plaisir.

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