Yann Orhan
Florent Pagny est de retour. Après le succès de son disque de duos "2bis", paru en 2023, le chanteur sort aujourd'hui son véritable premier album de chansons originales depuis "L'avenir", il y a quatre ans déjà. Et le premier depuis l'annonce choc de son cancer du poumon. Pour ce comeback très attendu, celui qui quittera "The Voice" après la prochaine saison propose donc "Grandeur nature", un album de 17 pistes, dont six interludes, confectionnées par Vianney, Marc Lavoine, Alain Lanty, Jacques Veneruso, Daran ou Paul Ecole.
Une première partie en demi-teinte
Pour ce retour, Florent Pagny dresse comme un bilan, en parlant un peu de lui et beaucoup de nous, en tant que société, opérant un retour à l'essentiel, dans les thèmes comme dans les sonorités, entre variété et pop-rock. Humaniste, plein d'espoir, emprunt de liberté et truffé de messages inspirants - voire de leçons de vie pour la nouvelle génération, que certains jugeront un peu naïfs ou moralisateurs, le projet est celui d'un homme apaisé mais spectateur d'un monde qui ne tourne pas rond. La faute notamment aux... réseaux sociaux, comme il l'évoque à plusieurs reprises en proposant de « larguer les algorithmes » sur "Un peu d'altitude", sans grande originalité, ou en dénonçant notre obsession pour « un like un commentaire » sur "Le braquage des sentiments". « Est-ce qu'on n'est plus personne, si on ne poste rien ? » se demande Florent Pagny sur ce titre, là encore un peu facile.
Le baryton vise surtout juste quand il parle de lui. Alors que sa voix n'a sans doute jamais été aussi solide (c'est bluffant sur "La dernière chanson du monde" !), Florent Pagny assure qu'il ne parle pas de sa bataille contre son cancer sur cet album. Pourtant, impossible que cette épreuve ne s'invite pas en filigrane dans certaines paroles. Le premier single "T'aimer encore", signé Vianney, prend la forme d'une ballade radiophonique, une déclaration d'amour à sa femme Azucena et ses enfants, où il demande encore du temps pour profiter d'eux. « Qu'elle attende la mort » clame le chanteur, que l'on a rarement entendu aussi vulnérable, comme sur le superbe "L'amour est toujours devant nous", là encore destiné à la femme de sa vie. Aussi, sur le single potentiel "Je sais qui je suis", à l'âme pop-rock, Florent Pagny regarde en lui et chante qu'il faut « rester soi même quand il fait noir ».
Florent Pagny en grand sage
Si ce nouvel album renferme des messages intéressants, et qu'il est heureux d'entendre le timbre si reconnaissable de Florent Pagny résonner avec autant de passion, il faut reconnaître que les chansons manquent globalement d'envergure malgré un habillage pop-rock, la faute sans doute à une trop forte homogénéité. L'auditeur pourra regretter l'absence de tubes ou de chansons évidentes qui se transformeront en classiques de son répertoire. On retiendra tout de même "L'amour est toujours devant nous", mais aussi "Quand on a trop de coeur", titre électrisant et pensé pour le live, qui rappelle certaines fulgurances de Coldplay à la belle époque. Et surtout "Grandeur nature", qui ouvre le projet et lui donne son nom. Une ballade épique, émouvante et crescendo, superbement écrite, qui résume à elle seule qui est Florent Pagny, et sur laquelle il se pose en grand sage, comme en haut d'une montagne.
