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George Ezra en interview : "Je ne veux pas être plus connu que je ne le suis aujourd'hui"

Par Théau BERTHELOT | Journaliste
Passionné par la musique autant que le cinéma, la littérature et le journalisme, il est incollable sur la scène rock indépendante et se prend de passion pour les dessous de l'industrie musicale et de l'organisation des concerts et festivals, où vous ne manquerez pas de le croiser.
George Ezra est de retour avec son troisième album "Gold Rush Kid". En interview pour Pure Charts, la superstar anglaise se confie sur la façon dont le confinement a influencé ses nouvelles chansons ou sur son rapport particulier à la célébrité et au succès. Rencontre avec un artiste plus honnête que jamais.
Crédits photo : Columbia Records
« Comment s'est passé ton confinement ? ». Après deux années de confinements et de couvre-feu, George Ezra reste très préoccupé par la façon dont nous avons vécu ces 24 derniers mois pas comme les autres. Dans les locaux français de son label Columbia, le chanteur anglais, véritable superstar dans son pays, reste encore relativement peu identifié en France malgré quelques tubes en poche comme "Budapest" ou "Shotgun". Très honnête, l'artiste nous a avoué que les nombreux mois de confinement l'ont totalement transformé et qu'il ne veut pas avoir plus de succès qu'il en a actuellement.

Propos recueillis par Théau Berthelot.

Tu reviens avec ton troisième album "Gold Rush Kid". L'énorme succès des deux premiers albums t'a-t-il permis d'aborder celui-ci avec plus de sérénité ?
(Il sourit) La tournure de ta question me fait plaisir, car normalement on me demande toujours si je suis nerveux. Et je ne suis pas nerveux, bien au contraire ! Aujourd'hui, j'ai totalement conscience que je suis chanceux de faire ce que je fais. Ça semble être le bon moment, comme si c'était une sorte de crescendo. Tout ce que j'ai fait m'a mené à ce moment précis. Et je suis vraiment à l'aise avec ça.

Je suis bien plus à l'aise avec qui je suis aujourd'hui
Le succès est-il un poids parfois dans la création ?
J'ai ressenti ça la dernière fois, sur mon deuxième album "Staying At Tamara's". Mais cette fois-ci non. Je me sens bien plus à l'aise avec qui je suis aujourd'hui, qui je suis dans la musique, et je ne vais pas prétendre que le succès commercial n'est pas quelque chose de bien et que je ne veux pas travailler. Mais je n'ai pas l'impression que c'est la chose la plus importante aujourd'hui.

C'est-à-dire ?
C'est dur d'avoir ce genre de discussion sans parler de la pandémie. Et je pense que les deux dernières années ont remis énormément de choses en perspective. A quel point est-ce suffisant ? Est-ce la bonne chose de toujours courir derrière un tube ou un but commercial ? C'est une véritable question. Ce n'est pas que je veux m'en détourner, mais je suis heureux de laisser faire les choses telles qu'elles le sont. Et si ça veut dire que ça concerne le succès commercial, c'est génial, sinon ce n'est pas grave !




Quelle est la signification de ce titre "Gold Rush Kid" ?
C'est totalement en rapport avec ce que je viens de dire. A la lumière de ces deux dernières années, j'ai commencé à penser aux tournées, à tout ce que nous avons fait pour poursuivre notre carrière musicale. Les gens dont tu as besoin, les endroits que tu visites, les choses que tu fais... Et je me suis dit que c'était quelque chose que je voulais encore faire. La ruée vers l'or, c'est une poursuite, pas la recherche de quelque chose.

C'est comme quand on dit "Ce n'est pas la destination qui compte mais le chemin parcouru"...
Exactement ! C'est une belle façon de le dire. (Sourire)

Ce "Gold Rush Kid" fonctionne comme une sorte d'alter ego. Pourquoi avoir eu besoin d'en utiliser un pour cet album ?
Plus qu'un alter ego, c'est surtout un état d'esprit. Hier [l'interview a été réalisée fin mai, ndlr], j'ai joué au festival BBC Radio 1's Big Weekend à Coventry, au Royaume-Uni. C'était notre premier festival depuis 2019 et j'étais bien plus ému sur scène que d'habitude. Je prenais tout sur moi quand j'étais sur scène, car c'est vraiment un état d'esprit, une mentalité, il faut vraiment en profiter tant que c'est là. Et ce n'est pas seulement par rapport à avant la pandémie, mais ce sentiment est décuplé car on se rend compte à quel point ça nous manquait !

Comme d'habitude, tu nous fait voyager avec cet album. Quelles ont été les destinations qui t'ont inspirées pour celui-ci ?
Pour la grande majorité du disque, j'ai fait référence à des choses que j'avais écrites dans des carnets ou des journaux par le passé. Mais la plupart du disque a été écrit dans un appartement à Londres. (Sourire) Mais étrangement, ça reste mon album le plus cohérent : la pochette, les vidéos, les émotions... Tout est assez uniforme, comme si ça avait une image. Je sais que je voulais emmener le public à aucun autre endroit en particulier que dans le monde que j'ai moi-même créé.

Durant le 2ème album, je n'étais pas vraiment heureux
Effectivement, c'est au final assez paradoxal car il y a côté voyageur mais l'album a été fait à un moment où on ne pouvait plus tout du tout voyager !
Oui et je pense que c'est un résultat de tout ce qu'on a vécu. J'ai eu le temps de penser aux voyages, et j'ai beaucoup écrit sur moi-même sur cet album. C'est là où j'en étais à ce moment précis.

Justement, l'album est divisé en deux faces : une première plus solaire et festive, une seconde plus introspective avec quasiment que des ballades. Pourquoi cette dualité ?
J'ai eu une expérience vraiment unique ces huit dernières années. Et je suis si reconnaissant, non seulement de ces huit années, mais aussi d'avoir eu le temps de réfléchir sur cette expérience. Mais pendant ce temps, et surtout durant le deuxième album, j'ai trouvé ça très difficile, je n'étais pas vraiment heureux. Donc je devais réfléchir à tout ça pour me demander ce que c'était, que ce soit dans la musique mais aussi mes discussions avec mes amis, ma famille, moi-même... C'est quelque chose qui m'a fait du bien !



Dans une interview du Guardian, tu dis avoir failli mettre un terme à ta carrière en 2020. Pourquoi ?
Ce que j'essayais de dire dans cette interview, c'est que j'ai passé beaucoup de temps à me demander pourquoi je faisais les choses que je faisais de cette façon. Je trouve qu'il y a une vraie liberté dans la création, mais après tu dois décider de la manière d'approcher un projet. Et je l'ai toujours fait d'une façon commerciale et mainstream, ce qui est vraiment génial. Mais pendant cette période en 2020, j'ai pensé que j'étais prêt à arrêter de faire les choses de cette manière. Et ça a fini par être vrai : l'album que nous avons fait est un album pop, il doit être défendu et promu. Mais je ne pense pas faire ça indéfiniment.

Je savais que j'allais avoir des conversations difficiles avec moi-même
Ce n'est pas le modèle que tu aimes le plus ?
J'aimerais surtout essayer autre chose. Et à la fin de cet album, j'aurais 30 ans. Je pourrais donc revenir sur ma vingtaine et me dire que c'était incroyable. Mais pas de cette façon. Il y a d'autres façons de faire des expériences en musique. Ce ne sera peut-être pas aussi gros, mais ça restera authentique.

C'est pour ça que cet album est peut-être moins "mainstream" que les deux précédents, vu qu'il y a beaucoup de ballades ?
Oui, et j'ai aimé ça... Et c'est aussi dû au fait que je grandis. Je ressens ça et je ressens mon âge. Je ne dis pas que je suis une personne âgée, mais dans le monde de la pop, quand tu fais 3 albums, c'est quand même un long chemin !

Qu'est ce qui t'a finalement donné envie de continuer après cette période de doute ?
Je pense que beaucoup de gens peuvent se retrouver dans ce que je dis, mais je sens qu'il y a toujours un combat. Le fait de dire "je veux faire ci, je ne veux pas faire ça". A un certain point, ça doit être que ça doit être. Je veux toujours faire les concerts et les festivals que je fais et ça vient en faisant les choses dans l'autre sens aussi. On a besoin des deux.

Si je pouvais avoir un nouveau tube comme "Shotgun", ce serait génial
D'où la chanson "I Went Hunting" où tu parles de ça ?
A un moment, c'était devenu évident à mes yeux que j'allais avoir des discussions difficiles avec moi-même à propos de certains sujets. Dans un sens, c'est comme si je partais en chasse de tout ce que j'avais dans ma tête. C'est la première chanson que j'ai écrit pour la deuxième partie de l'album. Tu dois trouver où est le problème pour devoir le résoudre. C'est une chose difficile. Mais ces conversations ne m'ont pas servies seulement pour les chansons, ça a aussi changé ma manière de penser.

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Sortir et promouvoir ce nouvel album te donne quand même envie de continuer ta carrière ?
Oui bien sûr ! Dans l'immédiat, je me suis engagé pour cet album. Mais aussi, je suis musicien, je me suis rendu compte de ça. J'ai trouvé ça difficile parfois de savoir que les gens sachent qui je suis, j'aimais bien que les gens ne me connaissaient pas. D'une certaine façon, j'aimais bien ça.

Du coup, est-ce que ce nouvel album marque une sorte de renouveau dans ta carrière, un nouveau départ ?
Je le vois presque comme le troisième d'une trilogie, mais aussi comme le premier de ce qui va arriver ensuite. Je ne sais pas encore ce qui va arriver ensuite. J'ai des idées de ce que je veux faire mais maintenant, je me concentre surtout sur la sortie de ce nouvel album.

Être célèbre, ça ne me convient pas
Avec ce nouvel album, il y avait une envie de créer une chanson qui soit aussi forte et tubesque qu'un "Budapest" ou "Shotgun", comme par exemple "Green Green Grass" ou "Manila" ?
On y pense, c'est sûr ! On ne pense pas à la façon dont une chanson peut exister à la radio ou en streaming, mais plutôt à la façon dont elles sonnent en live. Et le fait d'avoir "Budapest" sur le premier album, "Shotgun" sur le deuxième... Si je pouvais avoir ça à nouveau, ce serait incroyable. Je ne sais pas, je pense que c'est très difficile à chaque fois, mais j'espère qu'on y arrivera. (Sourire) S'il y a une chanson qui peut être aussi énorme que ces deux-là, ce serait incroyable. Pour "Green Green Grass", on a déjà commencé à en faire la promo. On l'a joué cette semaine au Royaume-Uni et on sent vraiment que les gens l'adorent.

Tu es une grande star au Royaume-Uni, tu restes populaire dans toute l'Europe, mais un peu moins en France, qui est un pays plus difficile pour les artistes internationaux. Le marché français, c'est quelque chose que tu vises à terme ?
Le marché français est vraiment difficile. Mais je ne veux pas être plus connu que je ne le suis aujourd'hui. Au Royaume-Uni, c'est vraiment énorme, dans le reste de l'Europe c'est plus petit. Il y a des groupes de fans, mais c'est tout. J'aime bien la façon dont sont les choses aujourd'hui. Car rien n'a été fait comme un plan, on ne peut pas choisir.

Je n'ai pas beaucoup d'amis dans l'industrie musicale
Pourquoi tu ne veux pas être encore plus connu ?
Je ne pense pas qu'être célèbre est une bonne chose pour moi. Je n'en n'ai pas besoin. J'ai l'impression d'avoir essayé, et que ça ne me convient pas. Je pense que ça ne me correspond pas, je préfère avoir une vie plus simple, plus tranquille.




Tu disais aussi dans le Guardian ne pas vouloir cartonner aux Etats-Unis. Pourquoi ?
Aux Etats-Unis, en particulier, le succès musical va de pair avec la célébrité. Et je ne suis juste pas une bonne célébrité. (Rires) Ce qui me va ! J'ai toujours aimé tourner aux Etats-Unis. C'est l'endroit le plus amusant où faire des concerts, c'est incroyable, c'est comme un énorme terrain de jeu pour enfants. Mais c'est épuisant parce que tu dois donner beaucoup de ta vie juste pour essayer de percer. Et il y a d'autres choses que j'aimerais faire à la place.

La plupart des collaborations sont fake
C'est aussi un énorme pays avec de nombreuses cultures !
Exactement ! Quand on fait des concerts à New York, Los Angeles ou Nashville, c'est dans des salles de 5.000 personnes. Alors que quand on joue dans des plus petites villes, tout de suite c'est 1.000 places... Je ne sais pas trop, c'est juste que je n'en ai pas besoin.

Tu es aussi l'une des rares grosses popstars à n'avoir fait quasi aucun duo. Il n'y en a qu'un seul sur tes trois albums, avec le groupe First Aid Kit. C'est volontaire ?
Il y a plusieurs raisons à cela. Tout d'abord, c'est une histoire de confiance. Je cherche encore à savoir qui je suis, musicalement parlant. Mais aussi, quand j'ai du temps pour moi, je veux voir ma famille et mes amis. Donc je n'ai pas beaucoup d'amis dans l'industrie musicale. Il y a beaucoup d'artistes, si je les vois durant un festival par exemple, je vais les saluer. Mais je pense que de nombreuses collaborations sont fakes, je pense pas que ces personnes-là soient amies. Ils écrivent une chanson et ils savent que ça aura plus de succès s'ils ont quelqu'un d'autre dessus. Moi je ne veux pas faire ça. Il ne faut jamais dire jamais, si ça arrive naturellement ce serait superbe. Mais moi, j'aime faire mes propres trucs de mon côté.
Retrouvez l'univers de George Ezra sur son site officiel et sa page Facebook.
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