Crédits photo : EMMA BIRSKI
Propos recueillis par Julien Gonçalves.

Comment tu as abordé ce nouvel album "Une grande chose" ?
J'avais déjà quelques chansons qui étaient écrites mais pas beaucoup. Et quand je suis sortie de l'émission "The Voice All Stars", le retour des titans, j'ai écrit très vite. J'ai eu un gros regain d'énergie, j'étais pressée, il fallait que ça aille très vite. Toutes les autres chansons sont arrivées très vite. C'est l'album qui a été le plus rapide pour moi à écrire.

Qu'est-ce que ça t'a inspirée ?
En fait, ça m'a donné un coup de pied aux fesses pour me rendre compte que ce qui était important pour moi dans ma carrière, c'était d'assumer ce que j'avais à dire, et d'assumer aussi ma créativité, mes chansons, mon univers à moi.

L'album est plus lumineux, plus ouvert. C'était voulu dès le début ?
Oui ! J'ai eu un gros process sur mon écriture. Je ne sais pas si tu le sais, mais entre le premier et le deuxième album, j'en ai écrit un autre. Je l'ai enregistré à New York avec Mark Plati, un super réalisateur qui a bossé avec David Bowie, The Cure, Rita Mitsouko. J'ai pu écrire beaucoup de chansons entre les deux. Il n'est jamais sorti, et peut-être qu'il sortira un jour sous une autre forme. Et en revenant, j'ai pu me dire que les chansons étaient écrites pour être écoutées mais aussi pour être comprises par les autres. Je me suis rendue compte que c'était ce que je voulais, je voulais qu'on me comprenne. Donc pour ce nouvel album, je me suis rapprochée d'un message plus direct.

Est-ce que tu en as eu marre aussi de l'étiquette d'OVNI, qui a peut-être mis une barrière entre toi et le public ?
Non, pas du tout. Toutes ces parties-là elles co-existent en moi, j'ai un côté très progressif, très jazz... J'ai chanté du metal quand j'étais plus jeune. Tout ça fait partie de moi, et c'est très important pour moi de pouvoir tout être. Et je ne crois pas aux étiquettes. Il suffit que quelqu'un dise un truc de sympa pour que tout le monde pense la même chose. Ça arrive souvent donc ça ne me préoccupe pas trop et j'avance en essayant de faire fi de tout ça.

Pour que ton son soit plus lumineux, ça a été naturel ou tu as dû faire des concessions ?
C'était pas une bataille du tout. Il y a des chansons qui méritaient ça. C'est important pour moi d'aller jusqu'au bout. Quand j'écris une chanson, j'ai envie qu'elle passe un certain message donc il faut aller au bout de la démarche. Si je prends la chanson "Sensible" par exemple, l'arrangement un peu sautillant et joyeux, c'est aussi un hommage à la télévision et de ce dont je parle dans le titre. C'est important que la chanson représente le message que je veux faire passer. Et ça m'importe peu... Le qu'en-dira-t-on et ce que ça représente m'importe moins que ce que je veux dire. Je ne pourrais pas chanter quelque chose qui ne me ressemble pas. Je peux être vraiment beaucoup de choses donc tout me ressemble dans une certaine partie de moi.



En écoutant l'album, j'ai noté que la liberté était extrêmement importante pour toi, avec la métaphore de l'oiseau, tu parles aussi de liberté concrètement à plusieurs reprises...
C'est vrai que c'est un thème récurrent, je m'en suis rendue compte après. (Rires) C'est vraiment fondamental pour moi. Je suis allée la chercher d'ailleurs ! Et c'est pas de tout repos, comme j'en parle dans la chanson "Liberté" justement. En général la liberté on la veut, on la cherche mais quand on a la possibilité de l'avoir, on se rend compte que ce n'est pas facile. Choisir c'est très compliqué et ça implique plein de responsabilités à prendre.

L'album renferme une magnifique chanson baptisée "L'oiseau de nuit", dans laquelle tu chantes "Je fais des rêves de gloire". Est-ce que le succès à grande échelle, c'est quelque chose qui te fait envie ?
C'est très humain d'avoir envie d'être aimé. Je rêve d'un monde dans lequel je me sens entourée d'amour. Mais oui forcément quand on écrit une chanson, on a envie qu'elle soit très entendue. Mais après quand j'y réfléchis profondément, je ne rêve pas d'une gloire absolue, pas du tout. Ce qui m'intéresse dans la gloire, c'est le fait de pouvoir réitérer. Je veux pouvoir faire énormément d'albums, je veux pouvoir exprimer tout un tas de choses. Et la gloire est obligatoire pour pouvoir le faire. C'est pour ça que c'est important, et pour beaucoup d'artistes en plus, car on a juste envie de s'exprimer.

Sur le titre "Berceuse", tu t'adresses à toi-même, Ophélie, quand tu étais petite. Tu chantes "Tu t'es noyée enfant" ou "On se moquait à l'école". Doit-on comprendre que tu as été victime de harcèlement scolaire ?
Oui... En effet... C'est une chose qui marque quand on grandit, et qu'on arrive à s'affranchir de ce vécu, de ce passé-là. C'est quelque chose qui te marque à vie. C'était important pour moi de le dire. Il y a des choses qui ne s'effacent pas.

En écoutant la chanson, quand tu parles des moqueries à l'école, je me suis dit que quand tu as fait "The Voice", devant des millions de téléspectateurs, ça fait a dû être difficile. Surtout quand on a vécu ça...
C'est étrange mais j'ai l'impression que ça m'a insensibilisée. Mais finalement, ça a pu être une force pour la télé en particulier, car quand tu as vécu ça, tu es peut-être entraînée à recevoir certains commentaires, certaines mauvaises vibes on va dire. Ça t'insensibilise à ça et tu peux être plus attentive à ce pourquoi tu es là.

Et comment tu vis les commentaires sur les réseaux maintenant que tu es une personnalité publique ? Tu t'en protèges ?
Je suis quelqu'un de très attentive à ce que les gens m'envoient, c'est important pour moi de considérer les autres comme des égaux. Je ne me dis pas que parce que j'ai un statut particulier, je peux me permettre de dénigrer les autres par exemple. Je lis beaucoup ce que je reçois comme messages et commentaires. Par contre, je les considère comme ce qu'ils sont. Si parfois je reçois quelque chose de méchant, je sais que c'est le point de vue d'une personne, qui est certainement influencée par sa vie à elle. J'arrive à avoir un peu de recul là-dessus.




Quand on regarde les paroles, on sent que c'est aussi l'album d'une femme amoureuse, non ?
Exactement. Je m'en rends compte maintenant mais l'album est rouge, et c'est un album qui parle d'amour et de ce tout ce que peut être l'amour. "Une grande chose", c'est une chanson d'amour mais ce que j'en retiens, c'est que je parle aussi de la menace écologique qui plane sur le deuxième couplet. L'amour, c'est ce qu'il faut choisir pour pouvoir survivre à tout ce qui peut nous arriver. Ça parle d'amour amoureux mais aussi d'amour, comme une envie de considérer les autres. Quand on est malheureux, on peut avoir le réflexe de rejeter la faute sur les autres, et je pense que c'est une attitude à absolument bannir si on veut s'en sortir.

Ton ancienne coach Jenifer figure dans ton nouveau clip "Les copines", et tu vas assurer quelques premières parties de sa tournée. Quelle est votre relation aujourd'hui ?
Jenifer c'est l'une des premières personnes qui m'a comprise. Elle est un soutien qui est très important pour moi, pour mon projet. J'ai beaucoup de bienveillance pour elle et elle en a beaucoup pour moi. C'est un cadeau dans ma vie. On a un truc qui est difficile à expliquer, une grande tendresse en fait. Je crois que c'est ça. Ça m'émeut qu'on ait cette tendresse l'une pour l'autre.

On parlait de la gloire tout à l'heure. Jenifer est une artiste très populaire, autant aimée que critiquée, et ça a pu être étouffant pour elle la pression médiatique. Vous en avez déjà parlé ensemble ?
Je n'ai pas le souvenir de conversations à ce sujet. Mais je me dis que c'est parce que c'est un chemin qui est très solitaire ça. Ça dépend un peu de chacun, et c'est un chemin qui va évoluer dans l'intérieur des gens.

Dans le clip "Les copines", il y a donc de nombreuses guests, c'est une ode aux amitiés, à la sororité. C'était important de mettre ça en avant ?
C'est devenu important, mais ça ne l'était pas du tout à l'origine. Je l'ai écrite sans arrière-pensée, j'étais juste triste de ne pas avoir de copines. J'ai des amis mais je n'ai pas ce groupe auquel on pense avec confort. Je l'ai écrite très sincèrement, et oui il se trouve qu'elle s'inscrit dans une période où il est important de soutenir les femmes. Je trouve ça important et je lis pas mal de livres féministes, mais ce n'était pas mon but. Elle m'est arrivée en dix minutes après une déception.

Pour revenir à Jenifer, est-ce que vous pourriez sceller cette amitié en écrivant des chansons ensemble ?
Ce serait génial ! L'avenir nous le dira.