
Bonjour Fabrice, neuf mois après la parution de ton dernier album signé par Vincent Frèrebeau chez Tôt ou tard, es-tu satisfait de son accueil (Top 154) (Thierry Cadet, Rédacteur en Chef adjoint) ?
Fabrice Mauss : D'un point de vue du public, étant donné l'accueil que je reçois sur les concerts, j'ai envie de te dire oui. Après, d'un point de vue des médias, c'est une autre histoire. Tu le sais, le nerf de la guerre ce sont les radios, et il est de plus en plus difficile pour les artistes d'y accéder (sourire).
Tu en as étonné plus d'un, passant tranquillement de chez Universal à Tôt ou tard, un label plutôt chic (Yaël Naïm, Piers Faccini, Thomas Fersen, Têtes Raides, Robin Leduc, L...). Comment cela s'est-il déroulé ?
Vincent Frèrebeau m'a signé sur maquettes. Il m'a vu sur scène plus tard, dans une configuration plus léchée, plus acoustique que d'habitude, car je m'étais séparé de mon groupe de rock. A l'écoute des maquettes, il a été séduit par cette nouvelle formule, et a décidé de me proposer de rejoindre son label.
Parce que je crois qu'il se passe quelque chose avec Charlie. Sur scène aussi. C'est donc tout naturellement que cette nouvelle version, moins plombante et plus enjouée que l'original, est allée faire un tour en radios. On a certes chopé un bon démarrage avec « C'est la vie », mais ça s'est essoufflé très vite.
Ecoutez un extrait du nouveau single de Mauss + Charlie, "Le chat" :
Des regrets ?
pas de regrets, car je crois que cet album intimiste n'aurait pas supporté un label plus commercial non plus. Et puis artistiquement je l'estime cohérent, et avoir réussi à le mener là où je voulais aller. Peut être ai-je le cul entre deux chaises (sourire) ? Je trouve cela dit ce virage réussit à mes yeux, avec plus de maturité qu'auparavant. Je sais que certains fans des deux premiers albums au son pop/rock, se sont sentis lésés dans cet univers acoustique plus léché, mais je ne regrette rien.Depuis le succès du single « Je recherche », étiez-vous restés en contact avec Charlie ?
Le handicap qu'a subi de plein fouet Charlie, malgré un bel album, c'est la concurrence frontale pour les médias avec Olivia Ruiz. Même voix, même univers enfantin, même visuel...
Je peux déjà te confirmer que son nouveau disque sera encore plus personnel, avec une belle profondeur. Ce qu'il y avait déjà sur le premier cela dit. Si je suis ton raisonnement, j'espère juste qu'il ne sortira pas simultanément avec celui d'Olivia Ruiz (sourire).
Sur quel label sera-t-il signé (nldr : Charlie était jusqu'à présent sur le label indépendant (at)home) ?
Je n'en sais rien. Je sais qu'elle est en pourparlers actuellement.
Visionnez le clip de Mauss + Charlie, "Je recherche" (2008) :
Pour en revenir à ton disque, comment s'est passée la rencontre avec Da Silva qui l'a réalisé ?
Par email. Je l'ai contacté via MySpace.
A la grande époque de MySpace (sourire). Je me souviens qu'Elsa Lunghini l'avait contacté de la même manière, et récemment Hélène Ségara a déclaré lui avoir écrit elle aussi.
MySpace est encore pratique, mais pour les musiciens. Facebook a pris le relai au niveau du grand public.
D'ailleurs à l'époque, une certaine promotion se faisait sur MySpace, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.
C'est vrai. A l'époque de « Je recherche », nous avions bénéficié de la force de promotion de MySpace. D'autant plus que nous avions décroché un partenariat avec Meetic, Internet y est pour beaucoup aujourd'hui.
Comment as-tu procédé pour travailler avec Da Silva, lui étant à Paris et toi à Lyon ?
Il y a chez toi de nombreux thèmes récurrents, tels que l'amour bien sûr, mais aussi la fuite en avant et les inévitables questions “qu'allons-nous devenir ?”. Penses-tu qu'il y ait une recette pour l'amour, où te situes-tu par rapport à la fidélité et l’infidélité comme le traite le thème de « Mademoiselle » (« toi je t'aime et toi je t'aime ») ?
(sourire) C'est drôle que tu évoques ce thème pour cette chanson, parce que ce n'est pas du tout le cas. Mais ça se tient,
comme quoi chaque chanson peut vraiment avoir des interprétations différentes en fonction de ses auditeurs. Chacun s'y projette comme il veut. « Mademoiselle » c'est juste une espèce de scène de ménage de la vie quotidienne. Est-ce raisonnable qu'on s'aime quand même ? Telle est la question. C'est un rapport au bonheur, comment peut-on - au moment d'une dispute conjugale comme ça arrive à tous les couples, avoir ce sentiment que le meilleur ait pu passer, et ainsi tout remettre en question ? C'est très fragile l'amour finalement, il ne fonctionne que grâce à une alchimie commune, et aux interactions de chaque membre du couple. Quand les états d'âmes de l'un sont négatifs, avec les doutes dont je te parle, alors c'est tout le couple qui en pâti. Et en même temps, ces remises en questions sont nécessaires aussi.
Ecoutez un extrait du single de Fabrice Mauss, "Mademoiselle" :
C'est ce qu'évoque aussi la chanson « Minuit passé » : « il paraît qu'hier on s'est aimé, mais hier c'est loin, il est minuit passé... »
Oui (sourire).
Tu es très nostalgique dans les thèmes de tes chansons...
Oui, nostalgique et mélancolique. Le souvenir est quelque chose qui me hante, sous forme de cynisme parfois... (sourire).
As-tu peur de la mort ? C'est également un sujet qui revient régulièrement chez toi, notamment dans « Au paradis ». « Je n'irai pas au paradis, justifier mes diagonales... », quelles sont les tiennes ?
(sourire)
Tes chansons sont-elles autobiographiques ? « L'un contre l'autre » par exemple ?
Elles ne sont pas toutes directement autobiographiques, mais s'inspirent de ma vie, ou de celle de mes proches. « L'un contre l'autre », c'est quelle part de bonheur doit-on demander à l'autre ? Quelle part doit-on endosser pour être heureux ?
« L'eau des roses » est une espèce de constat sur l'actualité sociale et politique... les infos te touchent-elles à ce point ?
Évidemment.
Visionnez le clip de Fabrice Mauss, "C'est la vie" :
Si tu devais choisir une vie, serait-elle à Paris, à Lyon ? Où te projettes-tu dans dix ans par exemple ?
Pour l'instant j'ai choisi de poursuivre ma vie à Lyon, où je me sens bien. Je viens à Paris uniquement professionnellement, pour y faire des concerts aussi. Dans dix ans ? Je n'en sais rien. J'espère seulement vivre encore de la musique.
Parlons concert justement. Tu as peu tourné avec cet album, une seule date à Paris au Théâtre Traversière en janvier dernier, mais il semblerait que cet été tu sois pas mal sur les routes...
Oui. Mais dans une configuration acoustique, ce qui me permets plus de mobilité. Car il faut savoir que mes musiciens jouent aussi en dehors de mes concerts, et qu'ils ne sont pas toujours disponibles à me suivre partout.
blement sincère
Melissmell m'a paru indéniablement sincère.
Pour finir, tu as notamment composé pour la comédie musicale "Cléopâtre", la chanson "Je te serai fidèle", on ne t'attend pourtant pas dans ce genre de registre...
(sourire) Et bien comme quoi... c'est une occasion qui s'est présentée et je l'ai saisie, c'est en même temps un très bon exercice.
Et que deviennent ces chansons : "On a couru", "Le masque", "Je n'attends rien", "Nos retrouvailles", "L'amour est un combat", la plupart arrangées par Yannick Ferreboeuf, sans parler de "A ma fenêtre", "Le premier pas", "Dans mes poches"... ?
(étonné) Mais comment es-tu au courant de tout ça (sourire) ?
Je sais tout tu sais...
C'est incroyable ! Il s'agit de chansons mises de côté pour x raisons.
Et "Le condamné", "Un bilan" ou "Les restes", arrangées avec une certaine Caroline Mauss...
Mais comment sais-tu tout ça ? Caroline est ma sœur (sourire). Nous avons travaillé ensemble sur différents projets musicaux, du temps où elle avait un groupe notamment. Tu es incroyablement bien renseigné (rires) !
M'as-tu raconté la vérité, ou m'as-tu menti, comme tu le soulignes dans le titre d'ouverture de l'album, « Je mens »...
(sourire) Cette chanson traite de sujets qui nous touchent tellement personnellement, qu'on se ment à soi même, afin d'échapper à une certaine fatalité. Pour ma part, la cécité me fait terriblement peur par exemple, ne plus voir doit être une chose atroce. Le mal de la société me fait peur, la condition des sans-abris... et cette chanson parle indirectement de ces derniers. « Je suis sur le toit du monde », le SDF en question dans le texte de la chanson, s'invente sa vie. Celle qu'il n'a pas. Il se parle à lui seul, a une vision moins crue de la réalité, moins plaintive. Il parle de la vie, la sienne, mais aussi de celle des autres. Il y a quelque chose de lyrique, de beau, finalement (sourire).
Merci Fabrice pour cette chaleureuse interview.
Merci à toi Thierry.
