samedi 20 novembre 2010 16:00

Cali en interview

Pour son nouvel opus au titre au combien original "La vie est une truite arc-en-ciel qui nage dans mon cœur", le chanteur Cali revisite la thématique de "l'amour fou" qui inspira le Surréalisme français du XXème siècle. Ce n'est peut-être pas à deux mais à trois que nous nous sommes rencontrés puisque l'écrivain André Breton, initiateur de ce mouvement culturel, s'est fait une très grande place dans notre entretien. Ce disque est le témoignage d'une démarche singulière sur laquelle Cali a bien souhaité nous éclairés.
Tout juste deux ans après "L’Espoir", tu présentes un nouveau disque : "La vie est une truite arc-en-ciel qui nage dans mon cœur". C’est très rapide pour toi. C’était un besoin de repartir aussi vite en studio ? (Jonathan Hamard, journaliste)
Cali : C’est vrai que depuis mon premier album en 2003, j’ai enchaîné les albums et les tournées. Mine de rien, je n’ai pas arrêté. On m’a dit de prendre un peu de temps. J’ai pris quelques mois mais rapidement j’ai fait comme une petite dépression car je ne faisais plus ce que je devais faire. J’avais besoin de repartir en studio. Les chansons sont vite arrivées et tout s’est éclairé de nouveau. On a tout de suite fait un planning pour l’année 2010. On a commencé l’enregistrement très rapidement on a commencé à reparler de tournée.

D’ailleurs, c’est une tournée importante. Il y a beaucoup de dates, pas mal de zéniths.
Oui c’est une grosse tournée. Et encore, tu n’as dû voir que la première partie de la liste car il y aura vraiment beaucoup de dates. Dès que j’ai présenté mes vingt-deux nouvelles chansons, on a monté une équipe de tourneurs pour préparer un spectacle…

… qui donnera certainement une large place à ton nouveau disque. Il porte un titre très étrange pour lequel j’aimerais être éclairé.
Il n’y a pas d’explications à donner. Ce qui me plaît, c’est que des gens m’ont proposé des analyses du titre alors que je n’y avais même pas pensé. En fait, il m’est tombé comme ça, dans les bras, très tôt un matin. C’est un ami pêcheur qui m’avait écrit un message dans lequel il avait inscrit : « La vie est une truite arc-en-ciel qui nage dans mon cœur ». Et là, je lui ai d’emblée répondu qu’il venait de me trouver le titre de mon prochain album. C’est dingue.

Oui, en effet, c’est aussi fou que le premier extrait de ce disque : "L’amour fou". A ce sujet, et à l’écoute de cet album, j’aurais tendance à évoquer des inspirations et une démarche faisant référence au groupe surréaliste. Je pense que tu connais le groupe des surréalistes ?
Bien sûr. Ça me fait très plaisir que tu m’en parles, d’autant que l'album a été travaillé en Belgique. Ils connaissent bien le surréalisme.

« Si j’étais dans un avion prêt à se cracher, je crois que je sauterais au cou de ma voisine pour l’embrasser. »
Et en particulier pour le clip. Il est assez drôle et décalé. C’est Rémy Gaillard qui s’en est occupé.
Oui. Avec mon grand fils de treize ans, on est assez fan de Rémy Gaillard depuis des années. On rigole énormément avec sa poésie qui passe sur Internet. Et un jour, j’ai un ami qui m’a dit qu’il avait vu une interview de Rémy Gaillard à la télévision et qu’au fond de la pièce, il y avait une affiche de mon concert. Là, je me suis dit qu’on pourrait faire quelque chose. Et peu de temps après, j’ai vu sur la quatrième de couverture de Libération l’une des se interviews au cours de laquelle il expliquait que mon album "L’amour parfait" (NDLR : 2004) l’avait sauvé d’un naufrage amoureux. J’ai donc pris l’initiative de le contacter pour mon clip "L’amour fou" et il m’a répondu qu’il était d’accord, qu’il me devait bien ça. Je lui ai donné carte blanche en lui disant que je lui faisais confiance et il a eu cette idée de tourner ces séquences folles dans les rues. Il m’a même piégé jusqu’au bout à Taratata. L’idée c’est que c’est en vivant n’importe quoi qu’on peut vivre l’amour fou : quand il embrasse une fille inconnue sur la plage, il se prend une baffe. Quoi qu’il en soit, je crie un idéal dans ce clip. Il faut profiter de la vie et du bonheur qu’elle nous apporte. Je sais que si j’étais dans un avion prêt à se cracher, j’aurais bien évidemment peur comme les autres mais je crois que je sauterais au cou de ma voisine pour l’embrasser.

Regardez le clip "L’amour fou", premier extrait du nouvel album de Cali :


Dans sa conception, il s'inspire de la démarche des surréalistes. C’est André Breton qui définit toutes ces choses là. Il est l’initiateur du surréalisme du XXème siècle. On lui doit le livre "L’amour fou" qui représente un idéal de beauté féminin et par lequel il décrit à sa manière l’amour. Il y a des personnages et des idées caractéristiques du surréalisme que l’on retrouve dans cet album.
Oui, il y a cette tendre madame Butterfly. Le chagrin d’amour la détruit à petit feu. J’imaginais une ruelle où on la regardait mourir. On aurait pu abuser d’elle sans qu'elle ne réponde quoi que ce soit. Elle est déjà morte. Plus qu’un homme, elle a perdu l’amour. C’est vraiment lié au livret de Puccini que j’aime beaucoup, et je dirais même au film de Frédéric Mitterrand qui est très bien fait.

« Je pense que le premier amour que l’on connait est celui qui nous arrache véritablement le ventre. »
L’amour peut conduire à la mort ?
Oui, je dirai même vers la petite mort. Je pense que le premier amour que l’on connait est celui qui nous arrache véritablement le ventre. Les suivants ne sont que des autres rendez-vous mais n’équivalent jamais vraiment le premier amour. Une fois que l’on a vécu cette secousse là, on n’aime plus pareil. Je le dis également sur le titre "Murano" aussi. Je parle à une femme que j’aime éperdument. Je suis à genou devant elle en la suppliant de m’aimer comme je l’aime mais elle a perdu un être qui lui était cher et qu’elle a aimé avant moi. Jamais, elle ne sera véritablement consolable.

Pour "Murano", j’ai davantage compris que tu donnais à voir une image de l’amour comme un combat où il ne faut jamais baisser les armes, une lutte permanente.
Il ne faut effectivement jamais baisser les armes, ou alors avec panache. Tu sais, j’adore ces films où le combattant lâche les armes et se jète en en avant, le buste droit. En amour, c’est ça : il faut que ce soit violent, mais pas physiquement. Il faut que ça remue les choses. Je suis insupportable à ce niveau là et ça fait dix ans qu’avec la même personne on se déchire quand se laisse le matin et on se retrouve le soir avec la même ferveur : on se marie et on s’aime de nouveau. C’est quelque chose qui est essentiel pour moi dans ma vie de vivre l’amour de cette manière là. Cela veut dire qu’il n’y a jamais d’accalmie. C’est usant parfois mais c’est vivant. C’est ce que je souhaite en tout cas.

On retrouve d’autres références autres que la culture italienne, comme par exemple Éric Cantona. Pourquoi lui avoir rendu hommage sur ce disque ? Ne serait-ce pas plutôt une invitation à le présenter comme un exemple ?
Encore une fois, l’idée c’est de présenter le héros qu’il incarne. J’avais 20 ans et dans ma chambre j’avais accroché son poster sur les murs. Lui, avec son maillot rouge numéro 7 de l’équipe de Manchester, il a été élu meilleur joueur du siècle en Angleterre mais en même temps, c’est lui qui crachait à la tête des arbitres. C’est lui aussi qui a insulté l’entraineur de l’équipe de France de sac à merde. Quand il marquait des buts, il était le héros national et quand il faisait le reste, c’était le paria total. Je suis touché par cette volonté d’être entier et de ne pas chercher à être lisse tout le temps, à ne pas dissimuler ce côté sombre. Et puis sur le refrain, j’ai voulu mettre ce fameux but énorme qu'il a marqué contre Sunderland. C’est plus qu’un moment de sport mais un instant de grâce. Quand il marque, au lieu de faire comme tous les joueurs, c'est à dire de crier partout et de lever son T-Shirt, il lève les bras au ciel en le regardant. Une vraie vie d’homme à laquelle j’ai souhaité voulu rendre hommage.



On pourrait continuer à écluser toutes les références que l’on retrouve sur ce disque. L’une d’entre elles à retenu mon attention. C’est celle qui est fait pour le titre "Lettre au ministre". C’est une référence directe à la Lettre adressée à monsieur le président de Boris Vian (1954). Tu reprends en quelque sorte cette idée de doléance envers le gouvernement. Doit-on comprendre que l’évolution n’a pas été positive en 70 ans ?
Malheureusement oui. L’histoire se répète et ne donne jamais de leçons. Pourtant, on apprend cette histoire et on en tire des conclusions qui ne servent à rien. Et des textes comme ceux-là, qui sont repris, fonctionnent toujours aujourd’hui. Les mêmes colères sont là. Je suis assez subjugué car j’ai un grand père qui s’est battu pour les brigades internationales contre Franco et qui a été accueilli comme un chien dans les camps de concentration français. Aujourd’hui, il reste encore des vestiges qui nous permettent de nous souvenir mais on refait les mêmes erreurs. On perpétue aujourd’hui les mêmes exactions en traitant avec horreur les étrangers de la République.

Pourquoi viser le ministre plutôt que le président comme la "Lettre" de Vian le suggérait ?
Parce que c’est une lettre au ministre responsable des saccages des familles et des jeunes existences dévastées.

« Besson, Hortefeux et Nicolas Sarkozy, c’est le ticket gagnant... ou totalement perdu. »
C’est le ministre de l’immigration que tu interpelles directement alors ?
Oui, évidemment. Besson, Hortefeux et Nicolas Sarkozy, c’est le ticket gagnant... ou totalement perdu. Cette chanson, elle s’inspire d’une histoire vraie. Une nuit, j’ai vu un policier complètement qui revenait d'une soirée de beuverie. Il m'a expliqué que lorsqu’il avait souhaité être policier, ce n’était certainement pas pour faire ce genre de choses. Il ne voulait pas aller rafler des familles tôt le matin, ni même les envoyer dans des centres de rétention avant de les renvoyer dans des pays en guerre pour qu’ils se fassent tuer. J’ai été très touché par ce témoignage de ce policier qui s’exprime sur ce qu’il pense vraiment et sur la désillusion qui l’habite aujourd’hui.

On parle politique. Tu as toujours eu l’habitude de t’exprimer sans langue de bois en prenant position. Quel regard as-tu aujourd’hui sur le « malaise sociale » dont on parle, et notamment sur les dernières grandes grèves qui se terminent ?

Les dirigeants se moquent de nous et utilisent le mépris pour commenter le fait que des milliers de personnes défilent dans les rues. En s’attaquant aux retraites, on s’attaque également au travail de nos enfants. C’est normal que les étudiants soient dans les rues. Les enseignants n’en peuvent plus. On est en train de sacrifier beaucoup des privilèges qu’avait l’éducation. Tout ça fait qu’on est rentré dans une spirale où le gouvernement prend des décisions qui ne sont pas acceptées par le peuple. Il continue dans cette voie quand même. Ça ne peut que finir dans la violence.

Au final, un album sombre ou plein d’espoir ?
Oui, je suis extrêmement confiant en la jeunesse. C’est un album couvert de bleus mais le combat est fini et on est encore debout. On ne sait pas s’il est gagné ou perdu mais on est encore là.

On parle encore de violence. La boucle est donc bouclée comme on dit. Je te remercie Cali.
Merci beaucoup à toi. Je cours me procurer ce livre d’André Breton.

Pour en savoir plus, visitez calimusic.fr, ou son MySpace officiel.
Pour écouter et/ou télécharger le nouvel album de Cali, cliquez sur ce lien.
Pour réserver vos places de concert, cliquez sur ce lien.

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