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samedi 15 février 2020 13:26

"The Slow Rush" : Tame Impala, à contre-temps, fascine autant qu'il déroute (CRITIQUE)

Par Théau BERTHELOT | Journaliste
Passionné par la musique autant que le cinéma, la littérature et le journalisme, il est incollable sur la scène rock indépendante et se prend de passion pour les dessous de l'industrie musicale et de l'organisation des concerts et festivals, où vous ne manquerez pas de le croiser.
Cinq ans après "Currents", Tame Impala est de retour avec "The Slow Rush", l'un des disques les plus attendus de l'année. Misant sur la perception du temps et 12 chansons plus psychédéliques que jamais, Kevin Parker nous prend à contre-pied et signe un album aussi exaltant que déconcertant.
Crédits photo : Neil Krug
L'épreuve est encore plus difficile que celle du second album. Comment donner vie au successeur de la pièce maîtresse qui vous a offert la gloire publique et critique ? Cette question, Kevin Parker a dû se la poser des tonnes de fois durant ces quatre dernières années. Mais le résultat est enfin là, à notre portée. Attendu de pied ferme, "The Slow Rush" a donc la difficile tâche de succéder à "Currents" (2015), tout en essayant de ne pas en proposer une pâle copie mais, au moins, quelque chose d'aussi fort. Alors, qu'en est-il de cette "lente précipitation" ? Osons-le dire tout de suite, on est loin de "Currents" et "Lonerism", ni même dans une tentative de suite facile. Au contraire, Kevin Parker a décidé de suivre une direction personnelle, dénuée des guitares mais toujours dotée d'une certaine dose de psychédélisme très ancrée années 80. Il aura bien fait de prévenir sur "Instant Destiny" : « Je vais faire quelque chose de fou ».

Tame Impala en mode vintage


En résulte l'énorme "One More Year", ouverture psychédélique folle, où Kevin Parker se languit du temps passé et fait déjà appel à notre nostalgie. « Do you remember we were standing here a year ago / Our minds were racing and time went slow » lance-t-il en ouverture, sur des nappes de synthés et de percussions, probablement les deux instruments maîtres de l'album, laissant de côté les guitares qui ont fait la renommée du projet depuis dix ans : « We've got a whole year / 52 weeks, 7 days each ». Car la perception du temps est bel et bien la thématique au coeur de cette oeuvre de Tame Impala, qui aura mis cinq ans à voir le jour mais s'écoute d'une traite, comme un trip d'une heure, avec ses montées et ses descentes.



C'est là son point fort comme son point faible. A contrario d'un "Currents" où des titres comme "Let It Happen" et "The Less I Know The Better" nous sautaient aux oreilles comme une évidence dès la première écoute, ici il est presque impossible de déceler un morceau fort ou un tube en puissance au premier essai. Il faudra plusieurs écoutes complètes pour en déceler ces pépites, comme autant de petits bouts qui se révèlent à nos oreilles au fil du temps. Il y a l’évident "Lost in Yesterday", premier single clippé et sorte de jumeau de "The Less I Know The Better", ou encore "Breathe Deeper", pièce maîtresse psyché s'étirant sur six minutes sans jamais lâcher notre attention. Quant aux quatre singles sortis jusque là, ils s'intègrent parfaitement dans la mécanique d'un disque qui sait, justement, prendre son temps. C'est notamment le cas d'un "Borderline" retravaillé qui gagne en intensité et en puissance, mais moins avec les inédits "On Track", copie décevante de "Eventually", ou "Is It True", qui tourne vite en rond.

Un voyage cosmique à travers les âges


Derrière le côté dansant et solaire des titres, Kevin Parker signe des textes emprunts d'une grande mélancolie. Qu'ils évoquent l'absence de son père ("Posthumous Forgiveness"), les regrets ("Lost in Yesterday") ou l'effet du temps sur les gens ("It Might Be Time"), le multi-instrumentiste australien semble se morfondre dans des doléances nostalgiques, parées de sonorités elles aussi venues d'une autre époque, à la jonction entre la fougue des années 60, le disco des 70's et la new-wave estampillée 80, donnant au disque, une proposition à mi-chemin entre modernité et évocation d'un temps passé. Si Kevin Parker signe un disque parfait pour l'été à venir, il en oublie néanmoins l'essentiel : y glisser "Patience", single du grand retour sorti au printemps 2019 et le meilleur titre proposé jusqu'ici.

A l'instar d'Arctic Monkeys avec "Tranquility Base Hotel + Casino" il y a deux ans, Tame Impala prend son auditeur à contre-pied et à contre-temps, mais fait preuve d'un tour de force à la fois audacieux et remarquable, qui fait de "The Slow Rush" un album qui s'apprivoise petit à petit, qui se (re)découvre à chaque écoute, nous lâchant la main pour mieux nous la reprendre au moment suivant. « Whatever I've done, I've did it for fun, for love, for fame » chante Kevin Parker sur le dernier morceau "One More Hour". On ne peut pas lui en vouloir. C'est sûr, le disque va diviser. Mais c'est à ça que l'on reconnaît ceux qui nous marquent durablement.



Clairement, "The Slow Rush" est un (très) bon projet de Tame Impala et clairement, il reste en deçà des deux précédents disques. S'il a de quoi dérouter, l'album grandit au fil des écoutes et révèle toute ses subtilités. L'attente était peut-être trop grande, mais Kevin Parker nous prouve là une nouvelle facette de son génie musical. C'est peut-être en ça qu'il nous fascine toujours autant.

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