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samedi 25 novembre 2023 15:33

"J'ai dû céder..." : ces conditions folles de Jean-Jacques Goldman pour l'interviewer

Par Théau BERTHELOT | Journaliste
Passionné par la musique autant que le cinéma, la littérature et le journalisme, il est incollable sur la scène rock indépendante et se prend de passion pour les dessous de l'industrie musicale et de l'organisation des concerts et festivals, où vous ne manquerez pas de le croiser.
Jean-Jacques Goldman reste un héros phare mais discret de la chanson française. Dans une enquête de l'INA, plusieurs journalistes se souviennent des conditions imposées par l'artiste pour avoir la chance de l'interviewer. Le chanteur se justifie : "Je ne sollicite pas, on me sollicite".
Crédits photo : Abaca
C'est l'artiste le plus discret et le plus populaire de la chanson française. Et c'est sans doute ça qui fait sa force. Jean-Jacques Goldman fascine pour son côté mystérieux, que certains ont essayé de décrypter dans des livres ou des documentaires. Très rare dans les médias, l'interprète du tube "Au bout de mes rêves" n'a que très rarement pris la parole ces dernières années. Outre quelques déclarations, notamment sur le livre polémique d'Ivan Jablonka, sa dernière véritable interview remonte à 2015 pour une pastille humoristique du "Petit Journal" sur Canal +, après la polémique entourant la chanson des Enfoirés, "Toute la vie". « Il voulait intervenir sur le terrain de l'humour. On a écrit un sketch en quelques heures, on l'a rejoint à la montagne et quand on l'a lu avec lui, on s'est rendu compte que ce serait encore plus drôle de faire une interview très dramatique. Il était à fond dans l'autodérision alors on l'a tournée. Et puis, après, on a partagé des carottes râpées » se souviennent les humoristes Éric et Quentin au fil d'une longue enquête menée par l'INA.

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Une lettre de motivation requise !


Dans un article pour "La revue des médias", notre confrère Mathieu Deslandes est allé à la recherche de journalistes ayant interviewé Jean-Jacques Goldman. Et même durant sa carrière musicale des années 80 jusqu'au début des années 2000, l'artiste était très dur à interroger. Pire, il exigeait certaines conditions pour avoir une chance de l'approcher. Parmi laquelle celle, insolite, de l'envoi d'une lettre de motivation, soit une demande écrite et envoyée par fax où les journalistes devaient expliquer leurs raisons de l'interviewer. « Une demande écrite, avec le pourquoi et le comment, je peux la lire moi-même, sans intermédiaire, et décider avec qui je veux ou ne veux pas discuter » se justifiait à l'époque Jean-Jacques Goldman. Avec ironie, le journaliste musical Christophe Conte a avoué sur son compte X, suite à la parution de cette enquête, avoir envoyé en 2001 « une lettre de non-motivation qui [lui] valu de [se] faire pourrir pendant 10 ans ».

"J'avais tenté de négocier..."


Autre requête faisant état de sa modestie et de sa discrétion : il exigeait de ne pas apparaître en Une des journaux ou magazines l'interviewant. Ce que raconte Yves Derai, l'ancien directeur du mensuel Tribune juive : « J'avais tenté de négocier une demi-couv, un quart de couv, une petite photo. Et puis j'ai dû céder et signer une lettre dans laquelle je m'engageais à ne pas le faire. Ça m'avait fait chier, évidemment ; mais il ne voulait pas qu'on vende sur son nom ». Ce à quoi Jean-Jacques Goldman rétorquait : « Le jour où mon album est sorti, quatre journalistes sont morts en Afghanistan. Je ne veux pas que ma photo remplace la leur. (...) Apparaître dans un quotidien avant 53 morts en Algérie, des élections en Pologne ou en Bosnie, ça me paraît obscène ». Selon le très populaire auteur-compositeur-interprète, c'est le public qui devrait faire « la démarche qui consiste à venir à [sa] rencontre » : « Moi, je ne sollicite pas ; on me sollicite ».

Dans ce même ordre d'idée, l'interprète de "Je te donne" refusait que ses albums soient envoyés à la presse musicale. Au contraire, c'était aux journalistes eux-mêmes de manifester leur intérêt à chacun de ses disques. Ceux qui avaient la chance de l'interviewer le découvraient dans des conditions inédites, voire insolites, comme le rappelle Gilles Médioni, à l'époque envoyé pour L'Express : « Je découvre qu'il avait aussi donné rendez-vous à deux lycéens qui réalisaient un fanzine. (...) Goldman, qui ne faisait pas de hiérarchie entre nos deux titres, a proposé qu'on fasse l'entretien tous ensemble ». Et s'« il n'y avait pas de sujet interdit », l'artiste demandait toutefois que ses propos soient enregistrés et de relire l'interview avant publication : « Je ne modifie jamais ce que je dis, mais je refuse qu'ils modifient, eux. Parce que des fois tu dis : "Ça, ça me gonfle..." et ils réécrivent : "Oui, cela m'ennuie" parce qu'ils trouvent que "ça me gonfle", c'est pas bien. Mais si tu dis "ça me gonfle", c'est parce que t'as envie de dire "ça me gonfle" ».



Mais ceux qui ont eu la chance de déflorer quelque peu le mystère Goldman parlent d'un homme passionnant et à l'écoute. « Il nous donnait la sensation de faire notre métier en haute altitude. Il nous bousculait dans nos certitudes » atteste Dider Varrod, l'actuel directeur musical de Radio France. Voire même blagueur. « Je n'ai jamais eu de complexes en face d'un journaliste, je savais que j'avais fait plus d'études que lui ! » déclarait notamment Jean-Jacques Goldman. Jamais avare en bons mots !

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