Crédits photo : Pochette de l'album
En 2003, Pascal Obispo est un artiste-phare du paysage musical français : déjà plusieurs tubes à son actif ("Tombé pour elle", "Lucie") mais aussi plusieurs millions d'exemplaires vendus. Quatre ans après "Soledad", le chanteur s'apprête à sortir son sixième album au concept particulier (un disque studio + un live) et surtout un vibrant hommage à son idole, Michel Polnareff. Son nom ? "Fan", et Pascal Obispo le défend avec le morceau-titre sorti le 30 mai 2003, soit... un an avant l'album. Et les premières notes ne trompent pas : comme sur "Lucie", la mélodie rappelle étrangement "Lettre à France" de Michel Polnareff. Véritable source d'inspiration d'Obispo, l'esprit de l'Amiral plane sur ce titre tubesque qui mêle ainsi couplets au piano et refrains électriques. Le chanteur y clame même son amour véritable pour la légende : « J'en ai suivi des galères / Pris des trains, fait des kilomètres / Pour te voir » Et dans l'interlude « Qui peut dire qu'il existe ? / Et le dire pour la vie », l'on croirait directement entendre l'Amiral.

Aidé par une grosse rotation radio, la chanson est un véritable succès : 300.000 singles vendus et une entrée à la première place des charts. Le morceau est même nommé aux NRJ Music Awards et aux Victoires de la Musique pour la chanson francophone de l'année. Pour concrétiser ce nouveau hit, Pascal Obispo mise sur un clip qui va rester dans les mémoires : tour à tour, l'artiste se grime en Freddie Mercury, Robert De Niro, Elvis Presley, Marilyn Monroe, JoeyStarr, Klaus Nomi et bien sûr... Michel Polnareff ! Le single est par ailleurs sorti avec dix visuels différents reprenant les différents déguisements du clip. Sorti un an plus tard, l'album connaît un succès fulgurant avec plus de 400.000 ventes. Mais l'Amiral ne reçoit pas ce projet d'une belle oreille. A la sortie du disque en 2004, Polnareff ouvre les hostilités en déclarant : « il faut que je me dépêche de sortir mon disque, avant que Pascal ne sorte le mien ». Sans doute blessé, Obispo reste silencieux. A la place, il part dans une grande tournée des Zéniths, récompensée par le prix du spectacle de l'année aux Victoires de la Musique 2003.

Crédits photo : Montage Pure Charts / YouTube

Une brouille amère

Mais la brouille est ranimée en 2007 : Michel Polnareff, qui opère cette année-là son grand retour scénique après 34 ans d'absence, décide de mettre Pascal Obispo sur une liste noire, l'écartant de ses invités d'un soir. Le principal intéressé reçoit la nouvelle avec choc au Nouvel Obs : « Il est fou de faire ça. Je ne suis pas sûr qu'il me soit reconnaissant d'avoir pu aimer ses chansons. Je suis halluciné qu'un mec dont j'ai chanté les chansons devant tout le monde (…) ne m'invite pas et qu'il y ait une liste noire ! ». Une réaction au goût amer que l'artiste réitère deux ans plus tard sur Europe 1 : « Quand on dit qu'on aime un artiste, c'est parce qu'on aime ses chansons et ce qu'il représente. Après quand on découvre qui est la personne en dehors de la musique et de ce qu'il fait, ça c'est différent ».

Regardez le clip de "Fan" :


Si les propos se calment, les rapports s'enveniment une nouvelle fois en 2014 : sur le plateau de l'émission "On n'est pas couché", Pascal Obispo rappelle les origines de son amour pour l'Amiral. « Quand j'ai réécouté Polnareff, je me suis dit que ça pouvait être un bon filon donc je lui ai piqué sa voix (...) J'ai fait une reprise de "La Mouche" pour tourner dans les maisons de disques. Ça n'a pas pris donc j'ai repris avec "Holidays", je me suis rendu compte que ça m'allait bien » déclare-t-il avant d'annoncer s'être rapproché de Polnareff, pour lui prêter main forte lors de l'enregistrement de son nouvel album : « Nos rapports sont très bons. On parle. Il n'y pas eu de fâcheries réelles. C'est son entourage qui a grossi des choses. J'aimerais bien chanter avec lui, composer avec lui. S'il a besoin d'un coup de main, je lui ai déjà dit : Michel, je suis là, si t'as besoin, même d'une oreille ».

"J'ai travaillé avec les plus grands, il n'en fait pas partie"

Polnareff prend très mal la nouvelle et pense que, par cette proposition, Obispo sous-entend qu'il n'a plus d'inspiration et a désormais besoin des autres pour composer. Sur Twitter, l'homme aux lunettes blanches fustige : « Je suis très sensible à la proposition de Pascal Obispo de m'aider à composer mes nouvelles chansons, ce qui équivaut à ma proposition d'aider Einstein à terminer l'énoncé de sa théorie sur la relativité ». L'Amiral conclut son post d'un cinglant : « Aucun mépris, prétention mal placée au niveau musical. J'ai travaillé avec les plus grands et il n'en fait pas partie ». Sur un autre tweet, l'interprète de "Tout tout pour ma chérie" se fait tout aussi violent : « À l'attention de ceux qui confondent clin d'oeil et oeil au beurre noir, P.O. m'a fait parvenir son dernier disque dédicacé par lui ».

Afin de clore le débat, Pascal Obispo ne veut plus s'étaler sur l'affaire, comme il l'a déclaré en 2016 : « Toute cette histoire me fait vraiment de la peine. Ça fait 20 ans qu'on en parle, ça me fait plus de peine qu'autre chose ». Deux ans plus tard, c'est l'Amiral qui est invité dans l'émission de Laurent Ruquier. « C'est une fausse bagarre.J'ai vu l'émission où il disait que toute cette histoire lui faisait de la peine, et ça m'a touché. Je le taquine Obispo (...) Pourquoi voulez-vous que je fasse souffrir quelqu'un qui se prétend fan de moi. Je l'ai appelé suite à l'émission en lui disant que j'étais désolé si je lui avais fait de la peine ». Aujourd'hui, Pascal Obispo continue de chanter le tube tout en ne voulant plus évoquer ce dialogue de sourd qui dure depuis maintenant quinze ans. Peu importe au fond : le public, lui, continue d'être "Fan" !

Regardez Pascal Obispo chanter "Fan" en live :