mardi 21 septembre 2010 0:00

Benoît Dorémus en interview

Fort de la parution de son intime second album "2020" (déjà porté par le single "Bilan carbone", et depuis rejoint par "T'as la loose"), Benoît Dorémus - actuellement en tournée en France, se produira notamment le 13 octobre prochain, au Café de la Danse de Paris. Nous avons rencontré un jeune homme, bien plus sensible qu'il n'en a l'air.
Bonjour Benoît, il y a quatre mois paraissait ton nouvel et second album, "2020" (Top 88), un disque que tu a porté sur scène - notamment en première partie des concerts de Renan Luce, et actuellement sur ta propre tournée. Dans quel état d'esprit es-tu à quelques semaines de ton Café de la Danse, le 13 octobre prochain, à Paris (Thierry Cadet, Rédacteur en Chef adjoint) ?
Benoît Dorémus : Salut Thierry. Oui je suis actuellement en tournée. Sur les concerts de Renan, j'étais seul sur scène avec ma guitare, en formation réduite (sourire), alors que là je propose un spectacle durant lequel nous sommes trois. Il y a un deuxième guitariste à mes côtés, qui fait aussi de la basse quand il le faut, et un multi-instrumentiste, qui joue à la fois du clavier, des percus et de l'accordéon (sourire).

Comment prépares-tu cette scène parisienne du 13 octobre prochain, au Café de la Danse ?
Sur scène justement, on rode le spectacle.

Tu as également proposé un EP 5 titres acoustiques, "En attendant mon nouvel album", disponible uniquement en téléchargement légal, peu avant la parution du disque. Un EP avec les versions acoustiques de cinq de tes nouvelles chansons. Pour quelles raisons ?
Pour faire patienter les gens qui attendaient l'album, tout simplement. Sachant qu'en plus la sortie avait été repoussée d'un mois, en mai dernier. Et puis aussi parce-que ces 5 chansons se suffisaient à elles-mêmes, et tenaient en acoustique, guitare/voix, un peu comme je les avais jouées en premières parties de Renan (sourire).

« Les choses sont difficiles, faut pas se leurrer »
Je t'ai vu sur scène à Paris il y a cinq années environ, juste avant la parution de ton premier album "Jeunesse se passe" (Top 163 en 2007). Tu avais à ton actif un disque auto-produit. Qu'est-ce que cela a changé pour toi d'être signé en Major ?
Les moyens, et puis la force de frappe. Même si les choses sont difficiles aussi, faut pas se leurrer (sourire). Le marché du disque se casse véritablement la gueule. J'ai écoulé à peu près 10 000 exemplaires de mon premier album, Renaud me disait lui, que dans les années 70/80, même avec 2 000 ventes, ils te laissaient une chance d'en faire un autre. Aujourd'hui c'est bien différent (sourire).

Cela dit, ton label croit en toi puisque tu as eu la chance d'en faire un second, non ?
C'est pas faux. On me laisse écrire et faire (à peu près) ce que je veux ! Je fais des chansons artisanales et je suis chanceux d'avoir une maison de disques qui les défende. En revanche il est difficile de se faire une place, de remplir les salles, quand on chante comme moi des chansons personnelles, en français, en ce moment. En tout cas, ça peut prendre du temps, beaucoup de chanteurs avant moi l'ont montré. Et le temps, ça tombe bien, je l'ai.

Visionnez le premier clip de Benoît Dorémus, "J'écris faux, je chante de la main gauche" (2007) :
Le player Dailymotion est en train de se charger...


Tu chantes dans le morceau "De l'autre côté de l'ordi" sur ton nouvel album : «deux secondes pour vous parler de ma pomme, c'est peut être mon dernier album, pas au sens où je veux plus en faire, mais dans le sens où dans ce genre d'affaire, y'a une énorme prise de risque, y'a une énorme crise du disque .../... je cramponne un permis de chanter». Doit-on y voir une suite à "J'apprends le métier", présent sur ton album précédent (voir le clip en fin d'article) ?
Oui. Je continue à faire mon métier, j'aime ce que je fais, mais j'en suis là à présent. Je passe le cap du second album, et après ? Tu sais, un premier album c'est déjà un rêve qui se réalise.

« J'ai longtemps été écartelé, aujourd'hui ça semble s'équilibrer »
Tu sembles moins énervé sur ce second disque. Les thèmes que tu traites sont plus portés vers les autres, moins sur toi, et sont abordés plus en douceur. Il y a aussi un côté “chanson” qu'il y avait moins sur le premier album. Jeunesse s'est-elle passée ?
(rires) Non, jeunesse ne s'est pas entièrement passée fort heureusement, mais j'ai 30 ans, quelques années de plus donc, et je n'aborde pas les choses de la même manière. Sur le premier disque il y avait une connotation rap/hip-hop par rapport à mes influences, notamment Eminem, et on m'a mis dans cette case là à cause du débit des textes, ce que j'ai adoré d'ailleurs. Mais depuis j'ai pris des cours de chant, et je me suis laissé aller à une évolution naturelle (sourire). Cela dit, pour en revenir à cette période plus “énervée” comme tu dis, le plus beau cadeau qu'on ait pu me faire, c'est le mail d'un type qui m'a écrit qu'à l'époque, grâce à "Jeunesse se passe", il a pris conscience qu'il n'était pas heureux, et il a quitté son taf pour changer de vie (sourire).

Penses-tu avoir toujours “le cul entre deux chaises”, trop “chanson” pour la presse rock, et trop “rock” pour la presse chanson ?
J'ai longtemps été écartelé en effet, aujourd'hui ça semble s'équilibrer. "Télérama" a par exemple fait une critique dans ce sens sur mon second album, même si ce n'est pas encore ça (sourire). Cela dit, je m'en fous, et je trouve ça plutôt bien qu'on ne puisse pas me mettre dans une case.



« Je trouve ça plutôt bien qu'on ne puisse pas me mettre dans une case »
Ton écriture a par ailleurs aussi un côté très touchant, et nous révèle de toi quelqu'un de très sensible, sur "Tu dors à contre-jour", "Deux pieds dedans", "Depuis hier"... me trompe-je ?
Si tu le dis (sourire). Concernant les deux dernières chansons que tu cites, qui traitent de la fugue d'un ado de chez ses parents, la seconde "Depuis hier", m'a été suggérée par un spectateur qui était venu me voir après avoir entendu la première "Deux pieds dedans", qui est un enfant qui s'adresse à ses parents sur la fugue qu'il vient de commettre. Il m'a glissé à l'oreille le fait que ce serait intéressant d'écrire aussi du point de vue des parents. Il avait raison. C'est la raison pour laquelle elles sont sous-titrées “Première partie” et “Deuxième partie”.

C'est d'ailleurs la slammeuse Luciole qui t'accompagne en duo sur cette “Deuxième partie”, "Depuis hier". Comment l'as tu rencontrée ?
Nous avons été présentés. Et je le regrette pas, elle a exactement le timbre, le phrasé, et la sensibilité, que j'imaginais pour cette chanson.



Pourquoi avoir choisi "Bilan carbone" en qualité de premier single issu du disque ?
Ce titre nous semblait d'actualité. Aujourd'hui on culpabilise de tout faire. Moi qui aime prendre des douches très longues par exemple, je pense à environnement, au manque d'eau sur la planète, et tout est comme ça. Par ailleurs je trie mes déchets, je fais le minimum quoi, je crois que c'est vraiment important.

Visionnez le clip de Benoît Dorémus, "Bilan carbone" :
Le player Dailymotion est en train de se charger...


« C'est très difficile d'obtenir de l'Airplay »
Penses-tu avoir suffisamment été soutenu de la part des radios avec ce premier extrait ?
(sourire) Je l'ai été par quelques passages sur Virgin Radio, Europe 1, France Bleu, et quelques radios locales ou Web, mais j'aurais aimé l'être un peu plus, évidemment... Même si je sais qu'aujourd'hui c'est difficile pour tout le monde, à moins d'avoir de la chance. C'est très difficile d'obtenir de l'Airplay, pour plusieurs raisons d'ailleurs, la ligne éditoriale et musicale de la radio, les partenariats qui viennent se mettre en travers de tout ça, la multi-diffusion des vieux tubes de U2, Police ou Phil Collins, que j'adore au demeurant, mais qui ont une trentaine d'années... Mais je ne suis pas le seul, on est pas mal dans mon cas, de Jeanne Cherhal à Mathieu Boogaerts. On ne sait plus comment s'y prendre (sourire). On attend, on espère quelques bons articles, des passages radios, on espère que les fans vont continuer à aimer, etc. Forcément ça met un peu la pression, la maison de disques y contribue un peu aussi il est vrai. Jusque là on a couvé les chansons chez soi, dans sa tête, dans sa guitare, puis en studio, et vient le moment où elles appartiennent aux autres. A ces moments d'incertitude se mêlent aussi une grande excitation, un vrai soulagement.

C'est donc "T'as la loose !" qui a été choisi en qualité de second extrait, pour succéder à "Bilan carbone", qui est ce type que tu dépeints dans cette chanson ?
C'est un de mes potes musiciens. Je parle de ses p'tits bobos de la vie (sourire). Mais il y a beaucoup de tendresse dans ce texte, ce n'est en aucun cas un règlement de compte, ça va sans dire (sourire). A cette occasion, un concours est d'ailleurs lancé sur taslaloose.fr.



Renaud a produit "Jeunesse se passe", pourquoi n'est-il pas producteur de ce second disque ?
Pour des questions techniques simplement. Nous sommes chez EMI tous les deux, alors il m'a laissé gérer ça directement avec eux. Ce qui n'a par ailleurs absolument rien changé entre nous.



As-tu souffert de la comparaison immédiate avec Renaud à la sortie de ton premier album ? Penses-tu que ce mimétisme dans la manière de chanter t'a desservi au niveau des médias ?
Je ne sais pas. Grâce à Renaud il y a eu un avant et un après. Avant lui, je chantais dans les bars mais ce n'était pas mon métier. C'est vrai que c'était à double tranchant, mais je n'en serais pas là aujourd'hui. Évidemment que Renaud m'a influencé, m'a marqué, et je ne regrette rien, c'était le point de départ et puis ça a évolué depuis. D'autant plus qu'actuellement sur les concerts que je donne, personne ne vient me voir pour me dire : «tiens, ça me fait penser à Renaud».

« C'est un des plus beaux cadeaux de ma vie »
Renaud qui d'ailleurs à l'époque sur son album "Rouge sang" a repris l'une de tes chansons, "Rien à te mettre", qui existe donc à présent en deux versions, sur ton premier disque, et sur le sien. Qu'est-ce que ça fait d'être repris par l'un de ses mentors ?
C'est un des plus beaux cadeaux de ma vie. J'ai rencontré Renaud dans un bar et je lui ai donné mon auto-produit, c'est ensuite qu'il m'a demandé s'il pouvait reprendre ma chanson. C'était assez incroyable (sourire).

Visionnez Renaud et Benoît Dorémus en duo dans "Taratata" (2007) :


Comment as-tu rencontré Renan Luce ? Est-ce par l'intermédiaire de Lolita, la fille de Renaud, avec laquelle il s'est récemment marié ?
Non pas vraiment, même si on est évidemment tous assez proches, les uns des autres. Je l'ai rencontré il y a cinq ans, à peu près en même temps que Renaud. Je faisais la première partie de Renan au Théâtre Méry, à Paris, en octobre/novembre 2005, et Renaud est venu. Alors aujourd'hui en effet la boucle est bouclée (sourire). Renan est une des rares personnes qui me sont chères dans ce métier, à qui je confie mes brouillons, à qui je demande conseil.

« Renan Luce et Renaud sont les rares personnes qui me sont chères dans ce métier »
Vous avez d'ailleurs tous les deux co-composé "Je sors avec une étudiante" sur ton nouvel album, et tu as également glissé son numéro de portable dans le livret de ton album. Personnellement j'ai appelé, je suis tombé directement sur un répondeur, sans indication...
(rires) Oui, sous la forme d'un clin d'œil en effet. Laisse un message, tu verras bien si on te rappelle (sourire). C'est d'ailleurs parti d'un délire. Renan m'avait invité à chanter avec lui et Alexis HK, sur son disque "Le clan des miros", en trio sur "Grand-père (Papy gâteau)". Je suis content d'avoir pu l'inviter à mon tour sur mon disque.



Une chose m'a frappée, c'est le côté Gainsbourg sur le texte de "Chose rare", un petit côté "Les p'tits papiers" notamment.
On me l'a déjà dit. Mais je crois que c'est parce que ce texte est un exercice de style. Et puis concernant cette chanson, l'écriture a aussi quelque chose de très orgasmique, et ça Gainsbourg l'avait compris (sourire).



Cette chanson "Paris" est intéressante elle aussi, toi qui es originaire de Besançon, aimes tu Paris autant que tu la détestes ?
C'est exactement ça. Je suis en amour et désamour permanent avec cette ville. Je veux en partir, et quand j'y suis plus, je veux y revenir. Paris est une ville avec une énergie tellement incroyable qu'elle en est épuisante.

Une «ville pauvre, dans un pays de pauvres» ?
C'est ça, suffit pas de gratter beaucoup pour s'en rendre compte. Je ne parle pas du Paris du Baron, des Champs-Elysées. Je te parle de celui des clochards, je les vois peut être plus que certains parce que j'ai toujours été plus attiré par les gens en peine, que par ceux qui réussissent.



Et "Calumet" ?
(sourire) Là pour le coup c'est une chanson “vénère” tu vois. Oui ben, tout est dit dans la chanson, je n'ai rien à ajouter de plus (sourire).

« Je persiste à croire que vivre au jour le jour est probablement l'une des clefs du bonheur »
Pour finir, pourquoi avoir appelé cet album "2020" ?
Le premier album était porté sur le passé, sur ma jeunesse, et celui-ci est plutôt tourné vers le futur. C'est un disque que je qualifierai d'existencialo-futuriste. Il y a d'ailleurs une chanson qui s'appelle "Ne pas lire avant 2020" qui clôt l'album, et qui est à lire après coup pour voir ce qui s'est passé entre temps. Même si je persiste à croire que vivre au jour le jour est probablement l'une des clefs du bonheur (sourire).

Cette “tête d'œuf”, dans le texte de cette chanson de fin d'album, il s'agit donc de toi ?
Oui voilà, dans dix ans, avec quelques cheveux en moins (sourire)...

Merci de ta sincérité Benoît.
Merci à toi Thierry, et à bientôt.

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Pour en savoir plus, visitez benoitdoremus.com, ou son MySpace officiel.
Pour réserver vos places de concert, cliquez sur ce lien.
Pour écouter et/ou télécharger le nouvel album de Benoît Dorémus, "2020", cliquez sur ce lien.
Pour écouter et/ou télécharger le nouvel EP de Benoît Dorémus, "En attendant mon nouvel album", avec la version acoustique du single "Bilan carbone", cliquez sur ce lien.
Visionnez le clip de Benoît Dorémus, "J'apprends le métier" (2003) :

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