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mercredi 15 novembre 2023 19:04

"Take Care" de Drake fête ses 12 ans : pourquoi c'est un chef d'oeuvre ?

Par Guillaume NARDUZZI | Journaliste
Rappeur le plus populaire de sa génération, Drake jouit toujours d'un succès commercial inégalé à ce jour, malgré des retours critiques plutôt inégaux. Pourtant, il avait dévoilé l'étendue de son potentiel artistique sur son grandiose deuxième album studio, "Take Care", paru il y a douze ans jour pour jour. Un disque qui lui a permis de bâtir sa légende.
Crédits photo : Cover
Au fil des années et des projets, Drake est peut-être devenu la plus grosse star de l'histoire du hip-hop. Fort de nombreux records, il est actuellement le chanteur le plus écouté de tous les temps, avec des chiffres toujours aussi exceptionnels sur les plateformes de streaming (83 millions d'auditeurs mensuels, 3ème artiste le plus écouté dans le monde). Et ce même si ses derniers projets ont bénéficié de retours plutôt mitigés d'un point de vue purement artistique, à l'instar de son dernier effort en date, "For All The Dogs". Il faut dire que l'artiste canadien, 37 années au compteur aujourd'hui, avait pris l'habitude de mettre la barre sacrément haut au début des années 2010.

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Entre rap et R&B, Drake à la croisée des chemins


Le point culminant fût probablement la parution de "Take Care", il y 12 ans jour pour jour, le 15 novembre 2011. Car la sortie de son premier album en 2010, "Thank Me Later" avait terriblement souffert de la comparaison "So Far Gone", sa précédente mixtape dévoilée en 2009 qui lui avait quant à elle permis de s'établir comme l'une des jeunes pousses les plus prometteuses de la scène nord-américaine. Pour ne pas répéter la même erreur, celui que l'on surnomme Drizzy a décidé de prendre son temps afin de concevoir un véritable album digne de ce nom - un procédé qui va d'ailleurs lui permettre de trouver le nom de ce nouveau projet. Et bien lui en prend.



Dès les mises en ligne des premiers singles, "Headlines", pourtant l'une des pistes les plus faibles du disque, et "Make Me Proud" avec Nicki Minaj, les avis sont dithyrambiques et tout le monde se languit de ce nouvel album. Une attente récompensée avec un projet splendide. Drake y revient à l'essence de sa proposition musicale et se révèle plus sincère et touchant qu'il ne le sera jamais par la suite. Sa musique, créée en étroite collaboration avec Noah "40" Shebib, son producteur attitré et véritable architecte des sonorités de "Take Care" (il est crédité 16 fois en tant qu'auteur et 14 fois comme producteur), est plus épurée. "Marvins Room", enregistré dans le studio du même nom à Los Angeles, situé en plein Sunset Boulevard à Hollywood et fondé en 1975 par Marvin Gaye en personne, en est peut-être l'exemple le plus brillant. Mais l'artiste est toujours tiraillé entre ses contradictions.

Les déboires d'une star naissante


Sur "Take Care", Champagne Papi expose autant sa nouvelle notoriété, que sa réussite (financière, surtout), et ses déboires sentimentaux. À l'heure de l'avènement des réseaux sociaux, le rappeur se livre sans filtre : toujours aussi égocentré, il oscille entre autoglorification et mélancolie. Un tiraillement parfaitement illustré par cette pochette devenue iconique prise par Hyghly Alleyne, où l'on voit l'artiste canadien, la mine triste, dans un cadre somptueux, qui n'est autre que l'un de ses restaurants préférés de Toronto. De quoi permettre au disque d'atteindre un autre niveau en s'apparentant à une sorte de réflexion à coeur ouvert, avec en toile de fonds la nostalgie de relations amoureuses gâchées.



Mais au-delà du discours affiché, c'est bien au niveau musical que ce contraste est particulièrement prégnant. Sa formule, qui jongle plus ou moins habilement entre bangers rap et morceaux R&B suaves, est plus peaufinée que jamais. Et pour cause, Drake s'est pour l'occasion entouré de ce qui se fait de mieux en la matière pour ce disque paru sur le label Young Money de Lil Wayne - qui s'invite lui-même à trois reprises sur la tracklist (si l'on inclut la piste bonus "The Motto") - alors sur le point de bâtir une véritable dynastie avec également Tyga et Nicki Minaj dans ses rangs, qui prennent eux aussi bien entendu part au disque (le remix bonus de "The Motto" pour le premier, "Make Me Proud" pour la seconde). L'alchimie entre Drake et son mentor de La Nouvelle-Orléans est toujours aussi efficace que sur leurs (nombreux) précédents featurings.



Un casting sans la moindre fausse note


Mais quand on parle de R&B, qui plus est quand il nous vient tout droit du Canda, comment ne pas penser à The Weeknd ? En effet, celui qui était alors un jeune chanteur prometteur avec sa voix déjà exceptionnelle a lui aussi grandement contribué à cet énorme succès. Abel Tesfaye est mentionné à cinq reprises en tant qu'auteur et deux fois comme co-producteur, et est présent en duo sur "Crew Love", pour l'une de ses premières collaborations particulièrement remarquées, qui contribueront à lancer son incroyable carrière, explosant aux yeux du monde entier aujourd'hui. Mais ce n'est pas tout puisqu'on peut également l'entendre sur "Good Ones Go" et "The Ride". Des morceaux somptueux, qui auraient dû connaitre un autre sort puisque "The Shot", deuxième piste du projet, "Crew Love" et "The Ride", devaient figurer sur "House of Balloons", la toute première mixtape de The Weeknd parue quelques mois plus tôt. Mais face à l'insistance de son compatriote, l'artiste a fini par accepter de les céder. Un deal gagnant-gagnant, avec le recul dont on dispose aujourd'hui.



Parmi les autres guests d'envergure, on retrouve aussi Stevie Wonder sur "Doing It Wrong", non pas pour donner de la voix mais bien... pour jouer de l'harmonica. Cependant, loin de se contenter de ce rôle secondaire improbable, le mythique chanteur a également pris le soin de conseiller au mieux son jeune homologue, et cela se ressent dans la maturité du projet. Drake convie également Kendrick Lamar, qui n'était pas encore la superstar qu'il devenu par la suite, pour l'intégralité de son "Buried Alive Interlude". André 3000, moitié du légendaire groupe Outkast, s'invite sur "The Real Her" avec Lil Wayne, tandis que Birdman ("We'll Be Fine") et Rick Ross ("Lord Knows") apportent chacun leur pierre à cet édifice dans un registre rap plus traditionnel. Mais la collaboration la plus marquante demeure incontestablement le tube "Take Care", porté par une Rihanna envoûtante, et sublimé par le travail du toujours excellent Jamie XX. Il faut dire que la production reprend son propre titre, "I'll Take Care of You ", paru un an plus tôt, avec la seule voix de l'immense Gil Scott-Heron.



"Take Care", classique intemporel


Logiquement, "Take Care" est un raz-de-marée à tous les niveaux. Les retours critiques sont excellents. Ceux du public également. Drake a réussi son pari. L'album s'empare de la première place du Billboard dès sa première semaine d'exploitation - presque une formalité pour lui, tout comme "Thank Me Later", mais la saveur de cette réussite est bien différente. Certifié à six reprises disque de platine sur le sol américain, il remporte sans la moindre contestation possible le Grammy Award du Meilleur album rap en 2013. Et ce même si Drake visait davantage la catégorie reine, puisqu'il estime que "Take Care" n'est pas un album de rap - et il a à moitié raison. Mais l'important est ailleurs, puisque découle de tout ce succès probablement le meilleur album de sa discographie, avec un niveau qui ne sera approché par la suite que par ses deux successeurs, dans un esprit davantage rap que R&B : "Nothing Was the Same" en 2013 et la mixtape "If You're Reading This It's Too Late" en 2015. Un classique indémodable encore aujourd'hui et pour un bon bout de temps.

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