vendredi 24 juin 2011 15:40

Danses de l'été : plutôt "Macarena" ou "Lambada" ?

Par Alexandre JOULIE | Rédacteur
Elles s’appellent "Macarena", "Asereje", "Lambada" ou "Soca Dance", et elles reviennent chaque année à la même saison pour nous faire danser tout l’été. Oui mais voilà, si au début des années 90 les chansons et danses de l’été battaient tous les records, atteignant des chiffres de ventes à donner le vertige, il semblerait que les déhanchés se grippent… Alors espèce en voie de disparition ou faisant son retour après dix années d’absence ? Pure Charts s’est posé la question...


C’est au coeur des Etats-Unis des années 60 qu'il faut se plonger pour trouver les prémices des danses et tubes de l’été avec Ernest Evan, alias Chubby Checker. Super star de l’époque, il popularisera le twist avec sa reprise d’une face B d’Hank Ballard And The Midnighters : "The Twist". Ce titre sera repris en français par le groupe d’Eddy Mitchell, Les Chaussettes Noires : "Le Twist". Peu après, Checker récidive avec "Twist Again". Repris cette fois par Johnny Hallyday, Richard Anthony et Dick Rviers avec "Viens danser le Twist". Les Chats Sauvages, encore eux, chanteront même "Twist à Saint-Tropez" en 1961, Dalida quant à elle entonnera "La leçon de Twist". Une nouvelle danse est née, et aujourd’hui on la danse encore dans les mariages et autres Bar-mitsvas. Et puis pendant près de trente ans, plus rien. Alors oui, il y aura bien ces tubes qui vous rappelleront vos vacances, comme "Lady Marmelade" de Patti Labelle, "Born to be Alive" de Patrick Hernandez ou encore "99 Luftballons" de Nena, mais rien de très chorégraphié... Il faut attendre 1989 et la "Lambada" pour que la série des danses de l’été débarquent en France et dans le monde entier.


Quand un courant musical en est réduit à une chanson


La lambada est d’abord un courant musical à part entière et non le titre d’une chanson, qui apparaît sur la scène musicale nord brésilienne au milieu des années 1970. La lambada est originaire des alentours de la ville de Belém, connue pour être une danse de couple caractérisée par une chorégraphie particulièrement sensuelle, où le contact corporel étroit et permanent entre des danseurs légèrement vêtus se cadence à travers des mouvements suggestifs des hanches. C’est l’aspect chorégraphique qui donne à ce courant une connotation particulièrement érotique dépassant largement celle des autres danses "latines" globalisées comme la cumbia, la salsa ou le merengue. C’est en 1988 que la lambada explose au niveau planétaire, quand les producteurs français Jean Karakos et Olivier Lorsac (Olivier Lamotte d’Incamps) en font la découverte lors d’un séjour dans la ville de Porto Seguro. De retour en France, les deux associés montent un groupe international qu’ils baptisent Kaoma, composé de la chanteuse brésilienne Loalwa Braz et du célèbre bandonéoniste de tango argentin, Juan José Mosalini, deux artistes résidant en France depuis longtemps. En 1989, Kaoma enregistre la reprise de "Chorando se foi", change le titre de la chanson d’origine en la baptisant simplement "Lambada", et l’inscrivent à la SACEM sous le pseudonyme de "Chico de Oliveira". Une fois conçue et produite en France, la "Lambada" est diffusée par la chaîne planétaire CBS accompagnée d’un clip promu par la marque "Orangina". Dans cette vidéo, on y voit une jeune fille blonde et un enfant noir, rayonnants, entrelacés de manière innocente dans le feu de la danse. Ces images sont mêlées à celles de plages tropicales.

En 1989, la "Lambada" explose sur le marché international et s’avère rapidement promue au sommet des charts sur les cinq continents, dont au Brésil ! En Europe, elle reste à la première place du Music&Media pendant plusieurs mois et aux Etats-Unis le produit, distribué sous le nom de "World Beat", obtient un disque d'or et un n°1 au Billboard Latin Music Chart. En France, la "Lambada" est dans le Top 10 des chansons les plus vendues de tous les temps (1 735 000 exemplaires). Néanmoins, le succès de la "Lambada" est éclipsé par un scandale juridique, lorsqu’EMI Music, défendant les intérêts du groupe "Los Kjarkas", déclenche une action en justice contre Karakos et Lorsac. Au terme du procès, les deux parties arrivent à un accord et les producteurs français abandonnent les droits d’auteur. Lorsac reçoit même un blâme de la SACEM et une partie importante des bénéfices reviennent aux frères Hermosa. À partir de ce moment, la "Lambada" commence alors à disparaître de manière progressive des sommets de la scène discographique mondiale. Le groupe Kaoma sortira d'autres tubes comme "Dançando La Lambada" et "Tago Mago", mais sans grands succès. Chico et Roberta, les deux enfants que l'on voit dans le clip, quant à eux sortiront eux aussi un 45 Tours, "Frente a frente". Le succès de la "Lambada" reste sans pareil, Jennifer Lopez l’a d’ailleurs samplé dans son tube de 2011, "On the Floor".

Redécouvrez le clip de la "Lambada" :


Si le matraquage publicitaire et le sponsoring ont contribué au succès de la "Lambada", la méthode fut dupliquée les années suivantes. Un an après la "Lambada", c’est un titre musical venu des îles qui va faire danser la France tout l’été. La "Soca Dance", chanté par un certain Charles D. Lewis n’aurait certainement pas été aussi populaire si TF1 et Orangina n’avaient pas sponsorisé et mitraillé le clip avant tout ses programmes de l’été. Aujourd’hui encore, le motif jaune à petits pois noirs de la jupe volante de la danseuse ne peut être dissocié de la boisson. C'est au printemps de l'année 1990 que Roberto Vannucci, alors responsable artistique de Baxter Music, découvre Charles D. Lewis, originaire de Saint-Vincent et Grenadines, vivant à Düsseldorf en Allemagne. Les choses sont ensuite allées très vite. Le recrutement du chorégraphe anglais Andy Shaft, puis l'organisation d'un casting de danseurs organisé par Roberto Vannucci pour le tournage du clip. Ce dernier fut tourné dans la foulée à Trinité-et-Tobago. Pour l'anecdote, la Soca est un genre musical caribéen et une danse particulièrement populaire à Trinité-et-Tobago, une version accélérée du calypso en fait. Soca est la contraction de Soul-Calypso.

1990 nous a donc fait découvrir la "Soca Dance", mais cette dernière devra se partager les dance-floor avec deux autres danses qui cartonneront cet été-là : "Le Jerk" de Thierry Hazard (500 000 exemplaires vendus) et le zouk des Zouk Machine avec "Maldon". Numéro 1 au Top 50 durant neuf semaines en 1989, il deviendra le titre de zouk le plus vendu de tous les temps avec plus d'un million de singles vendus et un disque de platine.

Redécouvrez le clip de la "Soca Dance"


Avec la "Lambada", le "Jerk" et la "Soca Dance", un filon s'est créé et c’est Yannick Noah qui décide de l'exploiter à nouveau en 1991 avec "Saga Africa". Ce single est associé à jamais à la manière de le danser : une chenille à secousses. Véritable tube de l'été, il atteint la première place du Top 50 pendant une semaine en août 1991. Yannick Noah fait notamment sensation à Lyon en la chantant sur le court du Palais des Sports de Gerland, lors du tour d'honneur suivant la victoire de l'équipe de France en Coupe Davis (dont il était capitaine), accompagné par son équipe pour la danse. Yannick Noah signe lui-même les paroles, mélange de français et d'expressions camerounaises. Il chante volontairement avec un accent relativement prononcé.

Redécouvrez Yannick Noah chantant "Saga Africa" avec l'équipe de France de Tennis :


Il faut ensuite attendre 1995 et 1996 pour qu’une nouvelle flopée de tubes chorégraphiés débarquent. En 1995, le groupe latino Felicidad et son "Dam Dam Deo" nous fait pointer les doigts en haut et en bas, mais c'est l’année suivante que la terre entière danse la "Macarena".

"Dale a tu cuerpo alegría, Ma'dalena, que tu cuerpo e' pa' darle alegría y cosa' buena, Hey Macarena !" : ainsi parlait ma grand-mère Jacqueline lors du barbecue de mon tonton Jean-Jacques en août 1996. Eh bien oui ! Tout le monde a succombé à la "Macarena", du groupe andalou Los Del Rio, sortie en 1993... Même les plus réfractaires ! Et pour cause, le single se classe numéro 1 du Top pendant sept semaines. Plus qu’un tube de l’été, cette chanson s’est retrouvée en 2002 dans le classement des plus grands hits de tous les temps de la chaîne musicale américaine VH1. Un million de singles vendus rien qu’en France. Elle fut même l’hymne de campagne de Bill Clinton. Sa secrétaire à la Défense, la très stricte Madeleine Albright, a été surprise à plusieurs reprises en train de "mover son body" sur cet immense tube. Sacrée Madeleine ! La chanson sortie dans une version rumba flamenca en 1993, puis dans une version plus pop, moins traditionnelle, a d'abord connu le succès en Espagne, puis au Mexique et à Porto Rico. Les touristes américains, qui ont l’habitude d’y séjourner, l'ont fait connaître dans leur pays, où elle connut le succès, particulièrement dans les communautés latino-américaines de Miami et de New York. Pour rappel, la chanson dont la chorégraphie est signée Mya Frye, se danse en ligne, comme un madison, et le mouvement se découpe comme il suit : allonger chaque bras, retourner chaque main paumes vers le haut, puis croiser les bras, mettre les mains derrière la tête, croiser les mains sur les hanches, poser les mains sur le bas du dos, et enfin bouger le bassin puis faire un quart de tour avant de recommencer… La rumeur voudrait que, comme dans la publicité pour Heineken, Mya Frye ait inventé cette chorégraphie en cherchant son décapsuleur et en exécutant d’étranges mouvements. La "Macarena" a laissé en 1996 peu de place à la concurrence, mais en France le groupe "Carrapicho" et son tube "Tic Tic Tac", a tout de même réussi à être numéro 1 des ventes. C'est Patrick Bruel qui, lors du tournage du film "Le Jaguar", a repéré le groupe et la chanson. Il a alors joué les intermèdes pour exporter le morceau en France. Le titre est devenu un tube de l'été 1996.

Redécouvrez le clip de la "Macarena" avec Mia Frye :



Les danseurs épuisés par la "Macarena" ?


L’année suivante, le monde découvre Ricky Martin et son "1,2,3 Maria" ainsi que la "Samba de Janeiro" de Bellini. En 1998, si la France est en liesse sur "I Will Survive", du côté des danses de l’été, Coumba Gawlo et son "Pata pata" et le "Yakalelo" des Nomads (chorégraphié encore par Mia Frye) peinent à s’imposer. Et puis pendant cinq ans, plus rien ou presque. Les tubes de l’été sont bien là, Lou Bega et son "Mambo n°5" par exemple, mais les danses n'y sont plus. Il faut attendre 2002 pour que les Français aient de nouveau envie de se rendre ridicule. Et ce sont trois andalouses qui remettront les mouvements abracadabrantesques à la mode. Forcément, vous vous souvenez de ces trois chanteuses espagnoles pas vraiment jolies, qui chantaient un refrain incompréhensible à l’été 2002 ? Oui, "Las Ketchup", ce groupe composé de trois sœurs, Lola, Pilar, Lucía, originaire de Cordoue en Andalousie, connurent un énorme succès avec "Aseje (The Ketchup Song)". L’album dont la chanson est issu, "Las Hijas del Tomate", s’écoula à 12 millions de copies à travers le monde. Le groupe a ensuite représenté l'Espagne lors du concours Eurovision de la chanson 2006, avec la chanson "Bloody Mary" où il a terminé à la 21ème place. Les paroles du refrain de "Asereje" ne veulent absolument rien dire et sont difficiles à prononcer. Il s'agit en réalité des paroles en phonétique (yaourt) de la chanson du groupe de rap de Sugarhill Gang, "Rapper's Delight" datant de 1979 : "I said a hip hop, the hippie, the hippie". Et oui, comme quoi, on n'est jamais à l'abri d'une surprise.

Découvrez le clip "Aseje (The Ketchup Song)" de Las Ketchup :


Pendant près de dix ans, plus rien, du tout. Alors oui, on a découvert Magic System, oui Lorie nous a proposé de zouker avec elle, ou de faire un pas de salsa sur "Un Air Latino", oui on a eu droit au Collectif Métissé, mais si ces titres sont des tubes de l'été incontestés, en revanche plus de traces de danse de l'été. Pourquoi ? Sans doute le côté kitsch dont nous ne voulons plus. Il a fallu attendre la Coupe du Monde de l'année dernière et la belle Shakira pour que le monde entier apprenne le "Waka Waka".

"Waka Waka (This Time for Africa)" fut la musique officielle de la Coupe du Monde de Football 2010, en Afrique du Sud. Shakira et le groupe Freshlyground ont interprété ce titre le 10 juin 2010 lors du concert d'ouverture du mondial dans le stade d'Orlando à Soweto. "Waka Waka" s'est écoulé à plus de 5 millions d'exemplaires à travers le monde et s'est classé numéro 1 dans plus d'une quarantaine de pays. Il est devenu le titre composé pour une Coupe du Monde le plus vendu de l'histoire. Et les pas de danse nous emmenant de droite à gauche sont de nouveaux biens présents. Le "Waka Waka" est la dernière danse de l'été en date, il y a bien René La Taupe qui nous propose sont "Oulala" cette année... mais là on dit non !

Redécouvrez le "Waka Waka" de Shakira :
Quels seront selon vous les tubes de l'été 2011 ? Pure Charts vous propose de retrouver notre liste complète et donner votre avis en votant pour élire votre chanson, dès maintenant, et jusqu'au mois de septembre. Rendez-vous à la rentrée pour les résultats !

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