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dimanche 16 avril 2017 13:00

Roch Voisine en interview : "En France, on croit que j'ai toujours fait la même chose"

Par Julien GONCALVES | Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
A l'occasion de la sortie de son nouvel album "Devant nous", Roch Voisine se confie à Pure Charts. Le chanteur évoque son besoin de renouveau, son image de romantique en France, ses collaborations avec Patxi ou Luc Plamondon, ainsi que son absence aux Enfoirés et la difficulté de vieillir. Interview !
Crédits photo : Laurence Labat
Propos recueillis par Julien Gonçalves.

Vous revenez avec "Devant nous", un album plus pop, plus positif. Vous aviez envie de changement ?
En fait, pour ce 22ème album, j'avais un peu le syndrome de la page blanche. Je me suis dit : "Qu'est-ce qu'on va faire cette fois-ci ?". C'est un peu normal. Surtout que depuis dix ans, j'ai essayé pas mal de choses avec la country, du crooning avec les Gentlemen, et mes albums en anglais plus rock progressif, qui sont assez différent de ce que je fais ici. J'ai décidé de me poser les bonnes questions et dans l'univers j'ai eu les réponses. Les gens n'écoutent plus la musique comme avant. Plus personne ne s'assoit devant une chaîne hi-fi pour écouter un album. On en écoute dans la rue ou au travail avec un casque, sur un smartphone. Donc on s'est demandé : "Où sont les gens ? Que font-ils ?". Et on va vers eux. La musique pop, ça sert à ça. Les chansons de quatre minutes et demi, ça n'existe plus.

« J'aurais pu tourner en rond »
Et donc ça s'est traduit comment dans le son ?
Je me suis demandé ce que j'aimais et ce qui tournait aujourd'hui, pour être dans un élément motivant et fun. J'ai fait une liste, surtout de la pop anglaise, et je me suis dit que ça pouvait sonner en français. Un processus s'est fait, et on s'est lancé là-dedans avec des références. Je savais que ce serait cool car j'ai travaillé à la cave avec trois copains. J'ai jamais fait ça ! J'ai toujours eu le privilège des grands studios avec des musiciens etc... J'étais très motivé du coup par toute cette nouveauté. On a bossé 12-13 heures par jour pendant deux mois et demi ou trois mois.

Ça a été facile de trouver le bon son ?
Oui, il faut juste avoir l'intelligence de trouver les bonnes références. Et les miennes sont d'aujourd'hui. Moi si je me mets à chanter dans ce format-là, ma voix va s'adapter toute seule, c'est comme ça. J'ai collé au style et voilà... Après, trouver les bons titres ça reste le principal et le travail reste le même en fait.

Vous avez parfois eu la sensation de chanter toujours la même chose durant votre carrière ?
Non, mais j'aurais pu. J'ai une carrière en France mais aussi au Québec et au Canada, et ça ne se croise pas nécessairement. Ici, on peut avoir ce point de vue-là, mais j'ai fait des choses tellement différentes, sans compter mes projets en plus de mes albums à moi. Je n'ai pas cette sensation d'avoir tourné en rond mais ce qu'on a retenu souvent en France c'est un son ou quelques tubes. Mais ça, ce n'est plus mon problème.

« Le succès peut devenir un peu lourd à porter »
D'avoir autant cartonné à vos débuts, vous avez pris ça comme une bénédiction ou est-ce que c'était peut-être un peu trop et trop tôt ?
C'est difficile... Il y en a qui disent qu'ils préfèrent avoir le succès au bout de vingt ans pour avoir l'expérience. Mais le succès ça ne se commande pas. Moi, il se trouve que je l'ai eu surtout au début. C'est une bénédiction d'abord et puis ça peut devenir un peu lourd à porter après. Comme je n'en étais pas prisonnier dans la vie... C'est à dire que je n'ai pas eu de succès qu'en France par exemple. Si ça avait été ça, je serai peut-être devenu fou ! (Rires) J'habitais au Canada et puis après j'habitais plus du tout là-bas, j'étais partout. J'avais une vie qui me permettait d'explorer personnellement et artistiquement. J'ai eu la chance d'aller ailleurs, ça m'a permis de m'équilibrer artistiquement. Mais c'est vrai qu'ici, quand on croit que j'ai toujours fait la même chose c'est qu'ils n'ont regardé que dans une seule direction ou alors c'est une erreur marketing de nous. En tout cas, je me suis beaucoup amusé pendant toutes ces années !

C'est vrai qu'en France, le grand public vous connait surtout pour des ballades romantiques...
C'est ce que les gens aimaient écouter. Je n'ai pas toujours fait ça. J'ai souvent fait de la pop sur mes autres albums mais on ne retenait pas trop ça.




Et donc vous avez travaillé avec Patxi sur "Tout me ramène à toi". Comment est née votre collaboration ?
On avait des amis en commun. On a parlé et ça l'a intéressé. On a déjeuné ensemble, je ne le connaissais pas. C'était très cool. On a parlé de nos vies, de ce que je voulais faire comme album, et on s'est laissé inspirer. iil m'a sorti un titre extraordinaire, comme une bouteille à la mer. Je suis vraiment content !

« Travailler avec Luc Plamondon, c'est un petit miracle »
Qu'est-ce qu'il vous a apporté ?
Cette fraîcheur, la nouveauté, sa jeunesse. Son talent, cette façon d'écrire bien à lui. C'est important. Ça ne marche pas toujours avec tout le monde. J'ai travaillé avec tellement d'auteurs dans ma vie, parfois ça le fait, parfois pas. La jeunesse avait définitivement sa place sur cet album. Mais j'ai aussi gardé des vieilles relations, des gens de ma génération, qui m'ont aidé à écrire des chansons. (Rires)

Il y a Luc Plamondon aussi aux crédits de cet album...
Luc, ça fait des années qu'on veut travailler ensemble mais ça n'arrivait jamais. C'est un peu le petit miracle de l'album. C'est un peu dingue, je l'avoue. On s'est souvent très croisé, il me disait qu'il allait penser à quelque chose et puis... Finalement, il m'a envoyé un texte et j'avais une mélodie que j'avais faite avec un copain. On a finalisé tout ça en studio. Il ne faut pas trop se poser de questions !

Vous êtes toujours à la recherche du tube ?
Pas de tube, pas de radio, pas de contact avec le public, pas de concert ! (Rires) On est toujours à la recherche de la chanson parfaite. Mais ça n'existe pas. Un jour quelqu'un m'a dit quelque chose de très juste : « Une bonne chanson c'est une chanson que les gens aiment écouter. Un tube c'est une chanson dont les gens ont besoin ». Ça devient une drogue. Finalement, c'est la même chose mais pas tout à fait la même dose !

« La musique, ce n'est pas gratuit »
Vous vous intéressez un peu aux ventes alors que l'industrie est en pleine mutation ?
Oui... C'est très très difficile. C'est en transformation, on ne sait pas trop. Il y a des conséquences terribles à ça.

Le CD est mort pour vous ?
Ça s'efface doucement et on va arriver à un moment où il n'y aura plus d'albums physiques. Je pense que c'est indéniable. Le problème qu'on a maintenant c'est qu'on ne réussit pas à organiser le digital pour pouvoir gagner sa vie. La musique, ça a l'air gratuit, mais ça ne l'est pas. C'est un système de valeur qui va devoir changer.




Pourquoi on ne vous voit pas sur la pochette de l’album ?
Parce que ça ne me tentait pas. (Rires) C'est la seule fois en trente ans de carrière. Je n'avais pas d'idée. Je suis comme ça ! Finalement, j'ai préféré la métaphore que ça représente. Et finalement les gens ont leur petite idée là-dessus et ils réagissent beaucoup plus que sur une pochette normale. Ça a créé une nouvelle conversation autour du sujet, c'est pas mal !

Quel sera le prochain single de votre album ?
On ne sait pas trop. "Comme au cinéma" ou "Entre tes mains" peut-être.

Vous parlez des gens qui travaillent dans l'ombre sur le titre "La fée"...
Oui, ils sont essentiels à notre succès, à notre survie. Il vivent aussi un peu par procuration le rêve qu'on vit. On a tous des fées.

Vous avez toujours bien vécu la célébrité ?
J'ai toujours vécu à l'écart de tout ça. Vous ne me voyez jamais dans les dîners, les avant-premières... Je ne fais pas ça pour ça. Je le disais au début mais les gens rigolaient, maintenant au bout de trente ans ils commencent à me croire ! (Rires)

« C'est chiant de vieillir ! »
Même lorsque vous étiez harcelé par des hordes de fans, c'était facile à gérer ?
Finalement, on a assez d'amour pour toute une vie. Et aujourd'hui, on n'a plus besoin de ce côté-là... Au début, on fait des réserves pour la suite. (Sourire)

Vous évoquez aussi la religion sur la chanson "Dieux verts" alors que le monde est de plus en plus compliqué...
Oui... On est en plein dedans. Avec les "Forever Gentleman", on est arrivé à Paris en tournée onze jours après le Bataclan. Tout le monde dit que ça n'arrive qu'en Europe ou en Afrique, mais il y a eu six meurtres dans une mosquée au Québec. C'est dingue... Il faut quand même en parler. Je crois que c'est important. Tout l'album est un peu comme ça, c'est ce qui se passe aujourd'hui, là maintenant.

Il y a un titre sur l'album qui s'appelle "J'veux pas vieillir". Ça vous obsède le temps qui passe ?
Non, ça ne m'obsède pas... C'est la seule justice sur la Terre, on va tous vieillir. Certains mieux que d'autres, comme on dit. Même si ce n'est pas parce qu'on vieillit bien à l'extérieur qu'on vieillit bien à l'intérieur, dans sa tête. Mais c'est chiant de vieillir !

« Je ne suis plus aux Enfoirés car je bosse tout le temps »
C'est difficile de vieillir dans cette industrie ?
Oui. Ça va tellement vite. On devient obsolète tellement rapidement. C'est au-delà de l'image. C'est au niveau de la musique, du style. On aime, c'est bien et puis on n'aime plus. Je vois mon fils, il change de chanson favorite toutes les semaines ! Ils ne sont pas comme on a été à une certaine époque. Nous on se souvient de chansons qui sont rattachées à une période. Eux non, ils ne s'attachent pas, ils n'ont pas le temps. Donc ils n'auront pas ce genre de lien avec la musique.

Vous n'êtes plus aux Enfoirés depuis 2005. Pourquoi ?
Je bosse tout le temps ! Ce n'est jamais la bonne période pour moi. Je suis toujours en concert. C'est toujours technique finalement. Sinon, j'y serai avec plaisir.

Il y aura une suite à "Forever Gentleman" ?
(Il réfléchit) Ici en France, une déclinaison... Peut-être. Ça fait déjà un petit moment qu'on passe. C'est un projet qui peut être cyclique, qui peut revenir sous diverses formes. Il me semble que ça pourrait le faire. Mais ce n'est pas moi qui décide. C'est une marque TF1 donc c'est un peu compliqué de savoir...
Pour en savoir plus, visitez rochvoisine.com.
Écoutez et/ou téléchargez l'album "Devant nous" de Roch Voisine.

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