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samedi 20 mai 2017 13:00

Isabelle Boulay en interview : "Il paraît que je ne suis pas assez romantique dans la vie"

Par Julien GONCALVES | Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
A l'occasion de la sortie de son nouvel album "En vérité", où elle s'est entourée de Benjamin Biolay ou Raphaël, Isabelle Boulay se confie sur la magie autour de ce disque, son rapport avec la célébrité ou le romantisme, et même la chirurgie esthétique.
Crédits photo : Peter Lindbergh
Jeudi en fin d'après-midi dans les coulisses de l'émission "On n'est pas couché", Isabelle Boulay ouvre la porte de sa loge, me lance un sourire sincère et me tend la main, avant de m'inviter à entrer. Installés sur le canapé, les yeux dans les yeux, on commence l'interview et c'est comme si on se connaissait déjà. Avec un naturel et une franchise rares, entre deux éclats de rires où elle me tape sur le genou comme si elle était l'une de mes meilleures amies, Isabelle Boulay instaure d'emblée une proximité, authentique. Sa force ? Une humanité innée. Entretien intimiste avec une artiste comme il en existe peu.

Propos recueillis par Julien Gonçalves.

Vous êtes dans quel état d'esprit alors que sort votre nouvel album "En vérité", emmené par "Un souvenir" ou "Mon amour" ? On a toujours le trac ?
Oh oui ! C'est un métier de fil-de-fériste, à chaque nouveau disque il y a un mélange de soulagement, de fébrilité, d'envie, de partage. Il y a plein d'émotions très intenses. C'est un moment de doute aussi où on retient un peu notre souffle. On a toujours envie que les gens le comprennent de la bonne manière. Il y a une grande fatigue et une très grande joie également.

Il représente quoi pour vous ?
J'en suis particulièrement fière. C'est un album important. Il y a plein de mes exigences qui se sont enfin rencontrées. C'est comme si tout avait été exaucé. On ne le sait pas quand quelque chose nous manque mais on le sait quand il n'y a plus rien qui nous manque. (Rires)

« On a des destins avec nos chansons »
C'est vrai ça ! Réunir un casting 5 étoiles avec Benjamin Biolay, Raphael, Coeur de Pirate ou Carla Bruni, s'entourer autant et aussi bien, c'est aussi une façon de se rassurer ?
Oui mais ce sont surtout des gens dont je suis moi-même le public, avec qui j'ai des affinités secrètes. Ils ne savent pas à quel point ils ont eu de l'importance dans ma vie. Ils ont souvent des chansons dont j'aurais aimé être l'interprète. C'est un grand privilège. Je me rends compte de la chance que j'ai. Parce que j'ai déjà demandé des chansons à des gens pour qui j'avais beaucoup d'admiration et il m'est arrivé de ne pas les prendre. Là, la rencontre s'est faite à chaque fois, mon voeu a été exaucé. C'est ça la magie de cet album-là.

On peut dire non facilement à des gens qu'on admire ?
Oh oui, au contraire... Les gens de grand talent comprennent. Ils ont l'intelligence du coeur. C'est toujours délicat c'est sûr, mais ça m'est arrivé très peu. Si une chanson me convient moins, si je ne suis pas la bonne interprète, je ne rendrai service à personne. Il m'est arrivé d'éloigner des chansons très belles mais je ne sentais pas de résonance. Je crois qu'on a des destins avec nos chansons.

C'est à dire ?
Quand j'ai reçu "Le garçon triste" par exemple...

Elle est sublime...
Merci ! Je trouvais ça très beau de la part de Carla Bruni de m'offrir une chanson pareille car elle était en train de travailler sur son album. J'avais envie qu'elle m'écrive une chanson depuis longtemps mais je ne l'avais jamais rencontrée. Dans les coulisses d'un Téléthon, je voulais aller vers elle mais c'est elle qui est venue en me disant qu'elle rêvait de me faire une belle chanson. Elle m'a enlevé les mots de la bouche ! Quand je l'ai reçue, j'ai tout de suite su qu'elle était pour moi. J'ai été subjuguée.




Il y a trois reprises sur cet album aussi, pourquoi ?
Dans les chansons qui existent déjà, il y en a qui sont irrésistibles. C'est mon côté interprète ça. Quand je les fais, elles me comblent. J'aurais envie que ce soit les miennes. Je suis tombée amoureuse de ces chansons-là. Celle de Willie Nelson, on avait essayé de l'enregistrer sur "Les grands espaces", un ancien album sur lequel je collaborais déjà avec Benjamin (Biolay, ndlr). On ne l'avait pas gardée car je n'avais pas en moi ce qu'il fallait à ce moment-là. Et là, au début, pour nous faire faire un tour de chauffe, Benjamin a voulu qu'on la fasse. Et là... C'était le moment parfait. Ce qu'on a gardé c'est la deuxième prise.

« Les ouvriers tiennent le monde »
Celle de Bernard Lavilliers, "Les mains d'or", est très réussie aussi.
J'ai grandi dans un milieu d'ouvrier. Mon directeur artistique avec qui je travaille depuis 20 ans m'avait parlé de cette chanson, et mon compagnon, sans le savoir, m'a aussi dit qu'elle m'irait très bien. Je me suis dit qu'il y avait quelque chose à faire. Je connais Bernard, on a chanté ensemble, mais je n'étais pas certaine de la reprendre car il est exigeant, j'avais un peu peur. Mais je peux la porter facilement car je viens de là. Elle a un caractère social assez fort. Elle est assez proche de mes convictions. Je pense que les ouvriers tiennent le monde. Je me considère comme une ouvrière de la chanson.

C'est comment de travailler avec Benjamin Biolay ?
Son travail c'est de me pousser dans mes retranchements. Sur la reprise en italien par exemple, "Una Storia d'Amore", je luttais avec lui pour ne pas la chanter trop haut. J'ai négocié. (Rires) Mais il y est arrivé... Il voit plus haut et plus loin que moi. Il a une tête de plus que moi ! C'est pour ça que j'ai confiance en lui.

« Pour moi, chanter c'est aimer »
Vous chantez en italien et en anglais sur cet album, il y a un titre country, une mélodie cubaine... C'est surprenant de votre part...
Oui, c'était très clair pour moi. Quand on a commencé la production de l'album, je sentais qu'il y avait quelque chose qui remuait plus fort que d'habitude. J'ai beaucoup aimé ça.

Est-ce que c'est pour prouver que vous saviez faire ça aussi ? Et ne pas qu'on vous enferme dans une image de chanteuse à voix, sur des ballades à texte...
Non, je n'y ai pas pensé. Ce sont des portes que je n'avais jamais ouvertes. Je les avais ouvertes en moi mais pas vers l'extérieur.

Regardez le clip "Un souvenir" :



Il y a des très belles chansons d'amour dans votre répertoire. Vous êtes une romantique dans la vie ?
(Elle soupire) Il parait que je ne le suis pas assez ! (Elle éclate de rire) C'est pour ça que je fais des chansons d'amour. C'est particulier car pour une femme, faire le métier que je fais, ça ne laisse pas beaucoup d'espace à des propensions romantiques. Si je parle autant d'amour... Pour moi, chanter c'est aimer. C'est une vie tellement prenante, on est toujours entouré, on a très peu de temps... Mais j'ai la chance d'être aimée quand même ! (Rires)

Heureusement ! Mais j'imagine que vous le rendez très bien...
Je le rends mais d'une autre façon... Je suis attentive, fidèle mais ce métier prend beaucoup de place, donc avoir quelqu'un dans ma vie c'est déjà un cadeau. Mais l'amour, pour tout le monde, ce n'est jamais quelque chose de simple. C'est un cadeau du ciel, c'est la loterie !

« Quand je chante, j'ai toujours l'intention de soulager les gens »
Vous chantez sur l'album "Pour vivre heureux, vivons cachés". C'est votre devise ?
On connait peu de choses de ma vie, même si on connait maintenant mon amoureux. On s'est fait prendre à notre insu. Je suis quelqu'un d'assez secret. C'est un métier qui prend déjà beaucoup de choses de nos vies. Si je ne parle pas trop de mes amours, c'est parce que je veux que le public se projette dans mes chansons. Je veux qu'elles aient plus d'amplitude et qu'elles ne s'arrêtent pas à moi.

C'est votre nature...
J'ai toujours été discrète, mais c'est difficile quand on est quelqu'un de public, acteur, chanteur... J'ai toujours fait une différence entre la popularité et la peopolisation. Il y a des artistes très à l'aise avec ça et je ne les condamne pas du tout. Quand les autres veulent parler de leurs amours, je lis volontiers ! (Rires) Mais j'ai l'impression que je perdrais quelque chose d'essentiel...

J'aime beaucoup la manière dont vous chantez "Travailler encore" sur le titre "Les mains d'or". Vous auriez fait quoi si vous n'aviez pas été chanteuse ?
Je n'aurais pas pu faire un métier où je n'aurais pas fait une différence pour quelqu'un. J'ai grandi dans le bar et le restaurant de mes parents, je voyais que quand je chantais ça consolait les adultes. Je ne pouvais rien faire d'autre, j'étais démunie face au chagrin des grandes personnes. J'avais des oncles qui souffraient de maladie mentale, la bipolarité. Ils ont parfois été internés alors j'ai fréquenté les hôpitaux psychiatriques. Je suis assez sensible à ces gens-là. Je pense que j'aurais fait quelque chose dans ce domaine-là. Pour moi, il faut que j'apporte une forme de soulagement.




Quand vous chantez, vous pensez à l'impact que ça a sur les gens ?
Quand je monte sur scène, j'ai toujours l'intention de soulager les gens. J'ai envie que ce soit comme une espèce de remède. J'ai cette volonté d'apporter du réconfort. Je chante pour le partage, mais un peu pour moi aussi. Si je monte sur scène, c'est aussi pour me convaincre qu'on est jamais seuls.

Il y a une citation de vous dans le livret...
C'était trop long, j'ai dû raccourcir pas mal ! (Rires)

« Je n'ai jamais misé sur mon physique pour ma carrière »
Elle dit : "En vérité, c'est, d'une certaine manière, devenir capable de se voir tel que l'on est". C'est difficile de vieillir quand on est une femme dans ce métier ?
C'est plus difficile... Enfin, je dis ça mais ce n'est même pas vrai. (Elle réfléchit) C'est sûr qu'on est soumis au regard d'un plus grand nombre. Mais j'ai commencé à me voir vieillir quand j'avais 21 ans, quand j'étais dans "Starmania". D'une année à l'autre, je constatais que mes paupières étaient un peu moins fermes ! (Rires) C'est un peu la seule justice. Mais je me félicite, je n'ai pas cédé encore...

C'est à dire ?
Je vais vous raconter quelque chose de très drôle. Une fois, je suis allée dans une clinique de médecine esthétique car je connais le médecin. Mais je n'y allais pas pour ça, j'y allais car j'avais une inflammation à l'oeil et comme j'étais coach de "La Voix" au Québec, je ne pouvais pas aller à la télé comme ça. Je suis allée au rendez-vous avec mon assistante de 32 ans. Moi je vais avoir 45 ans, ça ne me gène pas le dire. Et l'assistante du docteur me dit : "Vous pouvez emmener votre fille avec vous !". (Rires) Je me suis demandée s'ils le faisaient exprès pour que je prenne un rendez-vous ! J'ai trouvé ça drôle. Mais oui c'est délicat...

Vous le vivez très bien...
Oui car je n'ai jamais misé sur mon physique, ma beauté, pour ma carrière. Je ne pense pas que les gens retiendront de moi ! C'est un tout... Je ne réunis pas tous les critères de sélection naturelle. (Rires) Du coup, ça m'inquiète moins. Mais j'en suis consciente, je me vois vieillir. Même quand on est plus jeune, se voir, s'entendre... Maintenant j'arrive à m'écouter chanter mais avant j'en étais incapable. Mais même quand on est avec des amis et que certains filment, je me dis "Mais je parle comme ça ? C'est ma voix ? Mon Dieu !". (Rires)

Et pourtant, c'est votre voix que les gens adorent...
C'est vrai... Mais je ne suis pas assez vaniteuse. (Sourire)

Retrouvez toute l’actualité d’Isabelle Boulay sur son site internet officiel.
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