Crédits photo : Capture d'écran France 5
Jusqu'à son dernier souffle, Charles Aznavour sentait battre la rage de vivre dans ses veines. L'icône de la chanson française, dont la disparition ce lundi provoque une vive émotion en France et dans le monde, était invité vendredi soir dans l'émission "C À Vous" pour évoquer sa carrière. Et c'est un Charles Aznavour « très coquet », le sourire aux lèvres, qui s'était présenté face à Anne-Élisabeth Lemoine après avoir donné ces derniers jours deux concerts au Japon - son grand retour sur scène après une vilaine chute qui le tenait éloigné des salles de spectacles depuis le mois de mai. « Comme je dis, j'ai eu trois fractures mais j'en ai une beaucoup plus lourde. C'est celle que je paye » lançait-il avec humour, se voulant alors rassurant sur son état de santé. « Je travaille. J'ai ce qu'il faut à la maison pour me soigner. J'ai deux kinés qui sont formidables. Je nage, je fais de la bicyclette dans l'eau. Il y a plein de choses que je ne faisais pas avant, mais il le faut. Je ne vais pas arriver devant le public comme un malheureux. Etant donné mon âge, j'ai écrit une chanson sur l'âge que je vais leur chanter la prochaine fois » expliquait-il, étincelle de malice au fond des yeux. Le chanteur se disait même prêt à amener sa canne sur scène : « Je ne peux pas danser, mais je vais y arriver petit à petit ! ».

"Je me sens vivant. L'âge n'existe pas"

A 94 ans, Charles Aznavour refusait de vivre dans le passé : son regard se braquait toujours vers l'horizon. « Je vais de l'avant. Il n'y a pas de marche arrière chez moi » confiait-il sur France 5. La retraite ? L'inoubliable interprète de "La bohème" ne voulait pas en entendre parler... même quand sa femme lui suggérait d'arrêter : « Je lui ai dit "Je mourrais", elle m'a dit "Continues alors" ». Car c'est bien face à son public que Charles Aznavour se sentait vivant : « Moi, je ne peux pas ne pas vivre et je vis en scène. Je suis heureux en scène et ça se voit ». Interrogé sur son extraordinaire carrière, commencée en 1946 et qui le verra vendre plus de 180 millions de disques, le chanteur de "Hier encore" expliquait avoir toujours su au fond de lui qu'il serait un jour "en haut de l'affiche". « J'ai toujours pensé que j'allais m'en sortir. Je pense toujours que je peux sortir de tout. Quand je suis tombé, je suis tombé deux fois sur le bras et sur la tête. Ça se voit moins mais c'était ouvert. J'assume. C'est comme ça. Je me sens vivant et c'est très important. L'âge n'existe pas (...) C'est une question de force intérieure. C'est de là que ça sort » affirmait-il, se souvenant alors des commentaires acerbes qu'il avait reçus à ses débuts : « Les critiques, je n'y ai pas résisté : je les ai ignorées ».

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Si ses chansons (plus de 1.300 !) ont traversé et enchanté les générations, c'est aussi parce que Charles Aznavour avait toujours pris la peine de les partager au plus grand nombre, dans pas moins de huit langues différentes. Son souhait le plus cher était qu'on continue à faire gagner à la langue française ses lettres de noblesse : « Ce que je voudrais, c'est de savoir mes confrères et mes consoeurs apprendre les langues. Faire traduire leurs chansons. Il n'y a pas de meilleurs textes que les Français dans la chanson. La musique j'en parle pas, c'est vrai qu'il y a des musiques extraordinaires partout : les Anglais, les Américains etc. Mais les textes, on est les plus forts ». Enfin, dans ce qui est sans doute le passage le plus bouleversant de l'émission à la lueur de son décès, Charles Aznavour divulguait la promesse qu'il s'était faite : « On a décidé avec ma soeur qu'on allait passer les 100. C'est écrit. Elle n'a pas le droit de lâcher ça et je n'ai pas le droit ». Le destin en aura décidé autrement. Adieu, monsieur l'artiste...

Regardez la dernière interview de Charles Aznavour :